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Quelques scientifiques: Hoffet et Colani

Dans les années 1930, nous avons en tout deux auteurs qui nous renseignent sur les Brou. Le premier est un géologue, J. H. Hoffet qui parcourt en 1930-31 l’arrière pays de Huê et de Da Nang (Hoffet, 1933 ; et 1994). Comme tous les auteurs de son époque, il souligne la culture fondamentalement «identique» des «Moï». Mais, son grand mérite est d’attirer l’attention, pour la première fois dans la littérature, sur les différences existant dans l’architecture et la disposition des villages des montagnards,

c’est-à-dire les différences que même un observateur superficiel peut voir à première vue. Ainsi, à l’aide de dessins et de photos, il présente les types de maisons et la disposition de villages de 22 ethnies visitées par lui (dont les Brou les plus au nord, et les populations du plateau Boloven les plus au sud) - un sommaire comparatif hors pair par rapport aux descriptions de son temps. Dans cet article, page 27., il reproduit les deux types fondamentaux de maison brou (ici, illustration 24 A et B), et note que les «villages [sont] sans dispositions spéciales». Il ajoute également que «soumis de très longue date, [ils] sont très dégénérés. La paix dans laquelle ils vivent leur a permis de disloquer leur villages et d’habiter dans des fermes isolées»

(1933:27).

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Cette remarque sur le caractère non fortifié et la disposition non circulaire des villages brou nous importe pour plusieurs raisons. D’abord, par ce qu’il prouve sans équivoque que, - contrairement à ce que certains auteurs (par exemple Minority Groups, 1966; Không Diên, 1978 etc.) prétendent à tort -, les Brou ne connaissent pas cette disposition (ce qui va de soi, s’agissant d’une population extrêmement pacifique), pas plus, d’ailleurs, que les maisons communes. C’est une opposition évidente avec leurs voisins belliqueux, les Tau-Oi et les Katu qui, de leur côté, ont des villages fortifiés en forme circulaire, avec des maisons communes à leur centre - une disposition dont la relation avec la guerre est évidente. Deuxièmement, parce que, au delà de la différence architecturale et spatiale, ce fait nous semble traduire une différence plus profonde: celle qui sépare les populations pacifiques des plaines avec leurs villages ouverts, et les ethnies montagnardes enfermées dans leurs villages fortifiés. Serait-ce que les Brou sont, à l’origine, plutôt une population des plaines? Nous reviendrons sur cette question à la fin de notre exposé.

La deuxième partie, moins intéressante et dépassée de l’article de Hoffet traite de la religion des «Moï»: il discute du rôle du buffle, des traces du totémisme présumé: le sacrifice du buffle et de personnes humaines ainsi que la chasse au sang des Katu (pour lui «Cao»).

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L’autre auteur est Madeleine Colani, l’illustre archéologue et préhistorienne, premier chercheur professionnel à s’intéresser aux Brou. En mai 1936, elle fait une tournée d’étude chez les «Kha Leu» (épelé également « Kha L½ « par elle) du huyên Huong Hoa (= Khe Sanh). Cette date est importante: c’est la première fois qu’un scientifique visite les Brou avec l’idée explicite de faire des enquêtes ethnographi-ques sur eux. Dans son monumental Essai d’ethnographie comparée (1936), elle reproduit un objet recueilli par elle dans le village de Ba Xuôi: «un gilet en écorce d’arbre...

[fait] d’une seule pièce, sans manche et sans la moindre couture...[que] les Kha L½ portent surtout quand il fait froid et aussi les jours de pluie» (1936:239-240), dont elle donne également le dessin de patron (Figs. 51/1 et 2, ici illustration n° 31)44. Puisque visiblement elle a assisté à sa confection, à en juger d’après sa note 2, page 239,

44 Ce gilet est identique jusqu’aux détails les plus minuscules à celui que nous avons collecté lors de notre travail sur le terrain, et dont la confection (une sorte de reconstruction faite sur notre demande) a été enregistrée sur vidéo. Ce gilet se trouve aujourd’hui au Musée Ethnographique de Budapest.

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nous pouvons considérer

venant après Lemire, elle remarque que «dans une autre habitation sur pilotis, celle du maire, un angle était réservé aux génies protecteurs» (1936:273) et dans sa note 2. de la même page, elle ajoute que «c’est le cas, je crois, dans toutes les maisons de Kha L½ ; l’Européen y est bien accueilli, mais ne doit pas s’approcher de ce coin sacré» - cependant elle ne mentionne pas les autels domestiques. Elle décrit également «en face, au mur, bien rangé, quarante deux crânes de singes d’une petite espèce, avec leur mandibules. Pièces magiques sans doute» (1936:273) - en fait, les mandibules des animaux tués sont accrochés selon les règles sous l’autel dédié à la divinité de la chasse, yiang Priyan.

45 Voir même sa photo „Feu dans la forêt, les branches étant disposées en étoile” (n° 34-307-69) à la photothèque du Musée de l’Homme. Il est inutile d’expliquer que cette forme n’a rien à voir avec la religion, mais a des raisons bien pratiques: les bûches ne sont en contact les unes avec les autres qu’à leurs extrémités, ainsi leur combustion est économique.

Aussi, il est facile de les écarter les unes des autres, et cesser le feu à un moment voulu. De surcroît, les bûches ainsi disposées gardent mieux la braise ce qui est utile dans ces sociétés où on préfère garder le feu plutôt que de le rallumer. On retrouve cette méthode de combus-tion pratiquement dans le monde entier: en Amazonie, en Papouasie-Nouvelle-Guinée, en Asie du Sud-Est etc.

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