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K. K. H. O. F. B | B L I O TH E K OSTERR. NATIONALBIBLIOTHEK
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| TESTAMENT
POLITIQUE ET MORAL
DU PRINCE
R A K O C Z I.
TO ME PREMIER,
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TESTAMENT
POLITIQUE ET MORAL
ID U P R I N C E
R A K O C Z I.
TOME PREMIER.
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× × ×ķ
×4- ×
×
A LA HAYE,
Chez Sc H E U R L E E R.
M D C C L I.
*esesssssssssssss
A V I S
D E L E D IT E U R.
E ne dirai rien de la perfon
ne du Prince RAKoczi, elle
ett affez célébre par fa fermeté, par fes malheurs, & par fa re
traite : d’ailleurs, fa vie eft en tre les mains de tout le monde,& je ne pourrois repéter, que ce que l’on a déja dit.
On eft donc fuffiſamment inf
truit de fes aćtions ; mais j’ai cru qu’on feroit curieux de con
noître fon
eſprit ; c’eſt pour quoi je donne au Public ce Ma nufcrit, telqu’il eſt forti de fes mains , à la réferve de quel ques fautes de langage , & de uelques répétitions un peu trop équentées, que j’ai corrigées.
a 11)
șj Á v r s b : LE’D IT E U x;
Je fçais qu’on pourroit
donner une meilleure forme à l’Ou
vrage , & y répandre un peu plus de style; mais ce ne feroit plus le Teſtament du Prince RAKoczi. J'ai donc cru , que
je ne pouvois trop conferver le
caraćtere original de l'Auteur; &
que lorſqu’il s'agit dinſtruction,
on doit préférer le fond des chofes à
:
maniere de les di re: elle m’ont parues affez importantes par elles-mêmes pour pouvoir fe paffer d'ornemens:
C’eſt aux Lecteurs à juger, fi
je me fuis trompé,
víj
A ::::::::::::: * si
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$ $ $ $ $ $ $ №:#;">'; * # : ;
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T A B L E
D E S
C H A PIT RES.
Þ R E M I E R E P A R T I E.
RAITE” De za Pvz.fr/zw.cz page I.
CHAPITRE I. De la Puiſanee don
née de Dieu à l’Homme. 5
CHAP. II. De la Puifance donnée à l'homme par la cupidité. 8
CHAP. III. De la liberté de l'hom
7726 * I 2,
CHAP. IV. De la
puiſſance
de lazdroite traiſon en l'homme, dans l’é tat de la nature corrompue. I 9
viij DE S C H APITRES.
CHAP. V. De la liberté d'origine, du peuple de Dieu. 27
CHAP. VI. De la Miſſion de Moiſe
au peuple. 37
CHAP. VII. De l’Alliance de Dieu
avec fon peuple. 53
CHAP. VIII. De la punition & des peiner infligées au peuple à eaufe de la prévarication de la loi. 59
CHAP. IX. De la Loi morale é de
la Loi de culte. 7o
CHAP. X. De l'autorité de la Loi
divine & humaine. 78 CHAP. XI. De la Puifance exécu
trice des Loix. 97
CHAP. XII. De la Puifance Royal
. & du Gouvernement der Rois du
peuple de Dieu, est du différent
caraĉiere de Prince & de Roi.
CHAP. XIII. Suite du précédent.
I 43
CHAP. XIV. Du droit der armes du
peuple de Dieu. I 59
*
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D E
H Ecoutez Princes, &peu
Ples dela terre, le Seigneur m'a appellé du fein de ma
"mere, non pour m’établir
en prophete,docteur,ou réformateur,
mais en exemple de fa juſtice dansmon abaiffement & de fa miféricor
de , dans ma confervation, & mon humiliation. Qu’il me foit doncper
mis d'élever ma voix du fond de la
folitude ou plâtôt de l'antre obſcu re de mon pélerinage , & deparler
à mes enfans dans
::::::
de moncorur , & la candeur de mon ame,
1. Tfs I AMENT POLITIQUE * * *
puiſqu'il ne me reſte que cette feule occafion où je puiſſe, & où je doi ve me fouvenir que je fuis pere,
:
un ouvrage convenable en tout fens à la vérité,confor me à ma vocation,mais je vais traiter unematiere quibleſſe la cupidité, &
qui par là fera expoſée à bien des cenſures, & de jugemens, peut-être même à l'indignation des hommes;
auffi n'auroit-elle jamais vûe le jour, fimon état, & celui demes enfansne
m’eût engagé à paſſer par-deſſus ces conſidérations,pour rendre public ce Traité de la Puiflance, afin qu'il pût plusfacilement parvenir à ceux à qui il ef adreffé, & à qui il peut être uti le; mais que les lećteurs qui fe plai
fent dans une érudition recherchée
& qui n'aiment que des apophteg mes, des fentences & des pareles re marquables des anciens fages, ne s'attachent point à la lećture de ce petit ouvrage ; & que ceux qui çherchent la délicateffe du ftile, ne commencent pas même à le lire,
gar j'ai écris ce que je dis aux con
4
DU PRINCE RAKoczi. ; fins de l'Europe éloigné de tout commerce des favans & des fages,
deſtitué de tout fecours de livres ,
& loin de rechercher une ſcience mondaine, j’ai voulu & il a fallu
proportionner à la fimplicité chré tienne les maximes qu’un Prince,
& un pere chrétien tranſmet à fes enfans pour fujet de leurs reflexions,
& pour modele de leur conduite,afin que fi la toute-puistante providen ce de Dieu les a appellés à obéir, ou
à commander ils fachent faire l’un ,
& l’autre chrétiennement.
Dans cette vue j’ai tiré de l’Ecritu re, c'eſt-à-dire de la parole de Dieu, l'origine de la puiſſance donnée de Dieu auxhommes,de fixer fes bornes felon fon eſprit, m’attachant à me
conformer à la droite raifon & non
aux fentimens & opinions de tous les Auteurs, & me foumettant à la do ćtrine de la fainte Eglife orthodoxe catholique, Apoſtolique & Romaine, dans la filiale obéiſſance qui lui eft důe. Je demande aux Princes de ne
pas croire que je veuille entrepren
A ij
4 TesTAMENT PoLITIQUE dre de détruire la puiſſance qu'ils onț reçue de Dieu qui eſt par conféquent légitime, ni de fomenter l'eſprit de révolte & d’indépendance, qui n’eſt que trop affecté à l'humanité; je de man de cette grace auffi aux Théolo giens , & aux Sçavans de ne pas s’at tâcher trop ſcrupuleufement aux ex
preſſions impropres qui ont pů m'é
chapper.
C'eſt à vous adorable providence de la divine Trinité que j’offre ces confeils d’un pere à fes en f ns. Je vous les préfente dans l'ef prit
d'humilité
, devant la Majeſté de votre vérité & parole. Regardez d’un oeil favorable la pureté de mon intention, & de mes obligations pa ternelles , gouvernez mon entendement, guidez ma, plume afin que
mes ecrits foient bien plus de vousque de moi-même, & que toute la
gloire vous en foit rendue parceux
quiles liront. Ainſi ſoit-il.
*
eU PRINCE RAkoczn. f
=
P R E MIER E PA RTI E.
De la puiſſance de la droite
Raifon.
* L - 4-,- mimit
CH A PITRE PREMIER.
De la Puiſſance donnée de Dieu.
à l'Homme.
Ieu à créé l’homme à fon ima ge & reffemblancedit l’Ecritu re, car après que fon infinie bonté, eut réfolu d’étendre en quelque ma niere fa gloire hors de lui-même,
& que fa parole toute puifante, eut tiré du néant, ou produit & formé les élemens, la terre, & toutes les créatures, d'une fubſtance déja créée, que pouvoit-il y avoir de plus con venable à fa gloire que de propofer
à toutesles créatures fon image&ref. *
femblance ? Il la forma du limon de
A iij
6 TesrAMEMr Politique
||
la terte & fouflant dans fa face elle
devint une ame vivante, mais qui dans ce compoſé d'argile eût pů re connoître l'image & reffemblance
du Créateur , fi l'Ecriture même ne
nous l'eût défigné dans le texte déja cité ? Nous favons que Dieu eſt ef prit par fa révelation même, & quoi que perſonne n’ait vû l'ame de l'homme, la raifon, c’eſt-à-dire el le-même connoît fon exiſtence, &
croit par la foi qu’elle eſt éternelle.
Une fubſtance donc qui par fa pro pre idée connoît fon exiſtence eft
une véritable image du Créateur dans
rhomme. L'inviſibilité de cetteam62
eft une propriété de la fimplicité, &
cette ſimplicité eſt une propriété de
la droiture, ou de la vérité. Cette
droite raifon eſt donc l’image de Dieu, parce qu'il eſt ſimple, & com me elle n'a été créée que par le fou fle, elle a reçû fon être de Dieu.
Cette image de la Divinité ayant été ainfi imprimée dans l'Homme, Dieu
lui donna le fouverain domaine fur
toutes les créatures, pour qu’il leur
bU PRINce RAxoczt; }
commandât; mais il n’auroit pas en core été ſemblable à Dieu, fi après avoir obtenu cette puiſſance il n’eût acquis en même tems le libre arbi tre, c'eſt-à-dire la puiſſance de la ropre volonté, qui lui fut donnée
}
ample, & fi illimitée qu'il eut le pouvoir de contrevenir même au précepte de fon Createur , & nous n’avons que:
reconnu cette étendue étonnante de fa liberté par cette prévarication qui eſt devenue fi fu neſte à fa poſtérité.
Dieu donna une puiſſance fi fubli
me à la volonté de l'homme & un
empire fi étendu fur toutes les créa tures, que ni les Anges, ni les diá bles n’en n’ont point de femblable.
C’est cette libre volonté quieſt la ref.
femblance de la puiflance de Dieu, que la droite raiſon comme image de
Dieu devoit conduire& modérer dans
le premier homme, mais parce qu'il préfera fa volonté à la droite raifon qui devoit le contenir dans lesbornes de l'obéiſſance due au Créateur , ila juſtement porté la peine de la pré
A iiij
|
2 TESTAMErrr PoLITIQgg varication & de ſon péché. Voyons ce qui en eſt arrivée.
C H A P I T R E I I.
De la puiſſance donnée à l'homme par la Cupidité.
E fut le premier homme for
C
mé à l'image & reſſemblance du Créateur, qui commit le premier crime de leze Majeſté, de rebellion,& d'infidélité, parce qu'il n’obéit pas à la puiſſance de Dieu fon Créa teur, n'obſerva pas fa loi, & enfin prefera fa propre volonté à celle de fon Souverain Maître, & s'éloignant par là de la droiture de fa raifon, il abuſa du pouvoir de fa volonté.
C'eſt par-là qu'il en courut la juſte fentence de mort; fans perdre ce pendant l'image & refſemblance de Dieu, & retint par conféquent & la droite raifon, & la libre volonté,
& le pouvoir fur les créatures, mais
hélas! il paya cher la faute de fa
* Du PRINCE RAKoczi. . . déſobéiſſance, puiſqu’il fut livré lui même à la puiſſance de fa cupidité,
& ce fut la loi du péché, que com
me il avoit fait en
:
, ilne peut déformais plus dans la con duite de fa vie, & dans fes oeuvres agir par fes forces naturelles: mais
į:
la fuggeſtion de fa cupidité,a droite raiſon devoit contenir la
volonté de l'homme fous ces deux loix, de faire aux autres ce qu’il vou droit qui lui fût fait, & de ne leur pas
faire ce qu'il ne voudroit pas qu'ils lui fiffent. Mais cetteloi fi équitable
de la droite raiſon fut tellement obf curcie, par la cupidité qu'il ne s’eſt trouvé après le péché du premier homme qu'un petit nombre de Pa triarches & d’Elus qui l’ayent gardée Par la cupidité cet amour pro pre, & défordonné dont l'hom me commença à s’aimer plus que la juſtice, il s'arrogea le pouvoir, mais un pouvoir illegitime & uſurpé de faire tout pour lui-même, & c'eſt là l’origine
:
ce criminel orgueil qui attaque la puiſſance de Dieu mêA iiij
'ro TesTAMENT PoLITrque me fon Créateur, à qui feul appar tient de tout faire pour lui, & pour fa gloire. C’eſt ce malheureux pou voir dans l'homme, que la
::
té dépravée fuivant fon funeſte pen chant, après avoir obſcurci les fai nes lumieres de la raifon, étend plus
ou moins felon la meſure de fon
amour propre, mais il eſt illegitime, injurieux à Dieu, & l’homme droit eft tenu d’y réfifter.
Quand donc l’Apôtre dit que toute puiſſance eſt de Dieu, il en tend la puiſſance légitime don née de Dieu aux hommes, & non
l'illégitime que l’orgueil, l'amour
į:
& la cupidité, ce funeſte ruit du péché leur a donnée & à qui le faint Eſprit nous enfeigne par S.Pierre, & S. Jean, de réfifter , lorf qu'ils difoient devant le confeil d’u ne puiſſance fouveraine: Qu'ils de voient obéir à Dieu plús-tot qu’aux
hommes.
Après avoir ainfi recherché les différentes fources de la puiſſan ce légitime qui vient toujours de
Dieu, & de
r::
qui provient:
:
-,
:
DU PRINCE RAxocz1. ' I m
de la corruption de la nature, con fidérons l’hiſtoire du genre humain pour y démêler les oeuvres de Dieu, d’avec celles des hommes, delà cou
leront comme de leur fource les prin cipes de la puiſſance légitime felon lefquels l’homme chrétien doit com mander, & obéir.
L'infinie bonté de Dieu n'a pas voulu que le fil des exemples qui peuvent nous les démontrer
:
interrompu, mais fi nous les cher chions dans les hiſtoires propha
nes nous nous écarterions des oeuvres
de Dieu pour rechercher celles des hommes, & nous pourrions nous égarer dans les Ecritures mêmes fi nous ne nous attachions pas exaćte ment à l’hiſtoire & aux exemples des Patriarches, & du Peuple de Dieu.
Nous defcendrons
:
comme par dégré juſqu’à l’avenement de no-tre Sauveur, au commencement ,
à la propagation & pour ainfi di re à l’établiſſement temporel de
fon Rovaume nous verrons les
oeuvres de la puiſſance l'égitime, &
- A vj
il Testament Politique. donnée de Dieu, & celles de là puissance illégitime, qui ne finira qu’avec l’esprit du monde, & la des
truction du régné de l’Ante-Christ à la fin de siécles, où la véritable puissance du Roi des siécles triom
phera sur ses ruines, & tous ses en
nemis lui serviront de marchepied.
CHAPITRE III.
De la liberté de l'homme.
N
E craignons pas de dire, des choses contraires d’abord en apparence, mais cependant vraies,& conformes , & disons qu’il n’y a point de légitime puissance sans li
b
erté & que la vraie liberté ne peut subsister sans puissance quelle ne dé
genere en licence. Nous avons vûe dans les articles précédens , que le Créateur a ordonné à la créature for
mée à son image & ressemblance la puissance de la droite raison pour ré
gir sa volonté & la puissance de la
nu Prince RAxocz. 13 même volonté, mais quoique favo lonté ait été filibre qu’elle ait pû ou tre-paſſer les bornes de la loi,ce n’eſt qu’en excédant la meſure de la vraie liberté qu’elle fe feroit chan gée en licence, puiſqu’en fuivant es impreſſions de fa raifon, elle au
roit touiours dû reconnoître la Sou
veraine puiſſance du Créateur, & par conſéquent de fa Loi, mais après qu'en s'éloignant de Dieu par une licentieuſe rebellion il eût perdu fa.
véritable liberté; au lieu de la jouiſ.
fance de la droite raiſon à qui il au roit dû être foumis, il tomba lui
même fous le joug de fa cupidité.
La vérité de cette propofition avan cée au commencement de ce Chapis tre paroît en Dieu même; car cet
être fouverainement libre dans fon
incompréhenfible & immenfe liber té eſt tellement limité, & pour ainfi
dire reſtreint dans les bornes de la
juſtice, que s’il pouvoit agir injuſte ment il ne feroit pas Dieu; mais par ee qu'en Dieu, la juſtice de Dieu n'eſt pas distinguée de Dieu même,
Y 4 TESTAMENT PoliTIQUE, Dieu eſt un Etre libre, parce qu'il n'eſt affujéti qu’à la juſtice, qui n’eſt autre que lui-même, & cepen dant il ne lui eſt pas foumis parce qu'il eſt celui qui eſt, mais il n’en eft pas de même de la créature, qui ne tenant d’elle-même, ni fon être,
ni fa juſtice propre & particuliere, mais la recevant de Dieu, eft fou miſe à fa juſtice originale & incréée;
car s’il vient à s’en éloigner fa juf
rice fe convertit en
:
, & enun péché énorme qui oppofe la
créature au Créateur; maís dans cet
te fauſſe liberté même, elle ne peut fe fouftraire à la juſtice de Dieu, &
-c’eſt-là la fuprême & inévitable
uiffance fur toute créature, dont les voies feront manifeſtées dans ce
grand jour, où toute créature fera citée au jugement de Dieu; quoi ue la nature humaine fe foit oppo
?:
à la juſtice de Dieu, comme on a dit , elle n’a pû s’exempter de fa puiſſance; mais parce qu’elle s’eſtcartée de la droite raifon, & de la
fuprême volonté incréée,Pour re-
?
DU , PRINCE RAxoczi. , 1 ;
venir à fa volonté, à elle-même,
& que pour ainfi dire l’homme fe
détournant vers l’homme s’eſt li
brement foumis à lui-même, l’hom me par le péché a obtenu la
:
fance fur l’homme, & c’eſt-là l’ori gine de la puiflance qui repréfente Dieu fur la terre, qui pour être lé itime doit être reconnue par la li
:
volonté de l'homme , comme nous verrons dans les exemples rapportés ci-après , car l’homme a reçu une fi grande liberté par la quelle il eſt véritablement fembla ble à Dieu, que cet Etre fouverain ne la contraint point, mais il la tour ne à fon gré par le pouvoir de fa grace, de forte qu'il eſt toujours vrai đe dire que Dieu dirige où il veut le coeur de l'homme, & qu’il fait tout ce qui lui plaît; mais ce pendant l’homme n’eſt jamais con traint de telle façon qu'il ne puiffe réfifter , & combien de fois hélas !ne réfifte-t-il pas au Saint Eſprit,
fuivant le témoignage de l’Ecriture
même. Il y a de la folie à dire que
#
TESTAMENT, PoLITIQUE ; l’homme a perdu fa liberté. Car la juſtice de Dieu ne feroit pas juſtice,& par conſéquent il ne feroit pas Dieu s'il punifloit l’homme pour un péché auquel il s’efforceroit lui-mê me, ou s'il récompenſoit de bon nes oeuvres, qu’il auroit faites mal gré lui , & contraint par la grace plûtôt qu'attiré par fa douceur : car fon attrait n’eſt pas un joug
:
rieux ; mais une douce impreſſion du coeur; reconnoiffons donc avec l'Eglife la liberté de l'homme qui, dans l'état de la nature corrompue par une funefte & naturelle pente
tend toujours vers le mal. . . . . Cettepartiedema propofition fuffira pourleſujetque nous avonsentrepris de traiter, plůtôt d’une maniere tem porelle, que ſpirituelle: c'eſt pour quoi nous rapporterons tout ce qui fera dit dans cette premiere Partie du traité à la liberté requife pour les aćtions purement morales, d’où eut-être nous étendrons le mot de
į:
celles qui font bonnes pourla vie temporelle , autant qu'elles
DU PRINCE RAkoczi. 17
font faites par la raiſon naturelle;
mais qui ne font jamais bonnes, &
n’ont aucun prix ni efficace en ce qui concerne le falut, & la vie ſpi
rituelle.
Les malheureux effets de la li
berté humaine corrompue par le éché paroiffent dans les paroles
:
l'Ecriture : il y eſt dit que Dieu fe repentit d’avoir créé l’homme,& qu'il n’y eut que Noë, qui fut
trouvé
:
fur la terre ; il nous fuffit de favoir que Dieu fut irrité parce que la chair avoit corrompu fa voie, c’eſt-à-dire que perſonne ne fuivoit les impreſſions de la droite raifon, mais les ſuggeſtionsde la chair, Voilà un abregé bien court de l'hiſtoire du
:::::::
juſqu’au déluge ; après lequel un nouveau monde fortit pour ainfi di
re des eaux ; les forces de la chair commencérent à diminuer, & par
confequent la vie de l’homme à été
abregée ; le feul Noë reſta Monar
ue & Vicaire de Dieu fur la terre.
:::::
commandé dans l'Arche18 TesTAMENT PottTIQUE, aux animaux qu'il avoit confer vés ; & fes fucceſſeurs guidés par
la droite raiſon reſtés fidéles à
Dieu, dans la ligne direćte de Sem, ne furent affujettis à aucune puiſ fance humaine , tandis que la cupi dité regnoit dans les autres. -
Peut-être ne feroit-il pas con
venable à un Chrétien de tirer
des principes fur les faits de ceux qui en font venus à cet excès de fo
lie d’adorer des idoles formées de la
main des hommes, au mépris du Culte de Dieu. L'Ecriture nous ap prend qu’Abraham , & fa poſtérité ont vécus libres, riches & puiſſans dans leur pelérinage, & perſonne ne peut douter que ce ne foit la loi de nature , ou de la droite raifon qùi a formée leur légitime gouver
Ilemellt.
6:3
DU PRINcE RARocz1. 19
C H A P I T R E IV.
De la puiſſance de la droite
raiſon en l'homme, dans l'état de la nature corrompue.
S
I l'on prend dans un fens rigou=reux la puiſſance de la droiterai fon, qui doit diriger l'homme dans cette vie,ence qu’elle doit fe confor mer à la Loi fuprême de la juſtice de Dieu, pour parvenir à lui com me à fa véritable fin, c’eſt un effet de la grace furnaturelle, & ce n’eſt pas la nature corrompue, mais la miféricorde de Dieu, qui donne cette puiſſance aux hommes, c’eſt pour cela qu'il faut ici confidérer la puiſſance de la droite raifon natu relle, qui demeure à l’homme dans l'état de la nature corrompue pour agir moralement bien, & c’eſt ce qu'on appelle confcience, que la
2e TesrAMENT PoLITIỚge ; cupidité a coutume de corrompre dans l’homme en diverfes manieres, non-feulement par rapport au falur,
& à la vie ſpirituelle, mais enco re par rapport aux oeuvres morales, en lui repréſentant le faux fous l'ap parence du vrai. -
C'eſt la puiſſance de la droite rai fon, qui a dićtée , comme nous avons remarqué les loix de la natu re, & de celles-ci, font dérivées les
loix pofitives felon lefquelles la juf tice qui repréſente Dieu fur la terre eft exercée ; cette droite raifon ou tre les noms de confcience, de juf tice , a encore celui de vertu, &
celles-ci, font diviſées en différens ruiſſeaux, qui émanent de la même fource, & autant que fes effets s’é tendent ſur tous les hommes ; on l’appelle bien public, car la tran quillité, la paix,la juſtice, l’abon dance, les richeffes & l’ordre du gouvernement, procédent de l’em pire, ou puiſſance de la droite rai fon; mais ce qui doit paroître admi
|
DU PRINCE - RAKoczi. 2. I
rable , & ce qui manifeſte bien évidemment le pouvoir de la droite raifon dans l'homme, c'eſt que quoi que ceux , qui dans la conduite de leur vie fuivent les fuggeſtions de la cupidité, foient en beaucoup plus rand nombre que ceux qui vivent ſuivant la droite raifon; cependant la voix du peuple eſt appellée la voix de Dieu, & rend témoignage à la vérité ; & les loix établies, ou acceptées par les peuples, qui ont agi librement , & non par con trainte, ont toujours été trouvées conformes à la juſtice & à l'équi té; nous difons des peuples qui n’ont as été forcés, qui ne fe font pas
İ:
emportés à la fureur, ou divi fés en partis & en fciſſions: car où les mouvemens violens dominent, la raiſon eſt rarement confultée.Yeut-il jamais d’entendement obf.
curci,de plus épaiſfesténébres d'aveu glement & d’ignorance, que celui des Gentils qui fe forgeoient des Įdoles, & adoroient des Dieux cous
22 TESTAMENT PoLITIQUE,
ables des mêmes crimes, que leurs
į:
puniſſoient dans les hommes ? Cependant malgré une telle diſpofition de leur entendement, la droi
te raifon regnoit dans le coeur des Légiſlateurs, qui ont fondé ces fa meufes Républiques, Royaumes &
Monarchies de l'Antiquité : Si nous recherchons comment ce peuple qui eſt appellé un monſtre à cent tê tes, peut cependant rendre témoi
:
à la véritć , ou établir desoix équitables; nous en trouve rons la raifon, en ce que la cupidi té agit plus violemment en l'homme dans les aćtions particulieres, &
que la droite raifon, la vertu, la robité font toujours préférées dans es aćtes publics, où la cupidité même & l’amour propre recher
chent l’amour &
i:
du peuple, craignent fon jugement, &::::
fe montrer à découvert , & pren nent le manteau de la probité & de la vertu ; & c'eſt ainfi que fouvent malgre foi , & contre fon propre
DU PRI Nce Rokoczi. - 2;
penchant on rend en partie témoi gnage à la vérité, & on fait des loix que la cupidité ne craint pas de violer dans le particulier.
On trouve pluſieurs perſonnes,qui font eſclaves de leurs paffions & fen
fualités ; mais ileft rare d’en trouver
qui fecoüant tout joug de la pudeur
& de la droite raifon, commettent en public les crimes, qui font ou qu’on croit contraires à la probité;
à moins que l'autorité publique &
unanime de ceux avec qui ils font en commerce, ne les regarde plus comme contraires à la probité. De tout cela concluons donc en pre mier lieu que la puiſſance de la droite raifon , a reſté à l’homme même dans l’état de la nature cor
rompue, & que cette puiſſance eft de Dieu, à qui il n’eſt pas permis
de réfifter. Concluons en fecond
lieu que les loix publiques font des
émanations de la droite raifon, &
qu’en leur rćfiſtant , on réfifte à Dieu, & à la puiſlance donnée de
24 TesTAMENT PoLITIQUE ; Dieu, concluons troifiémement , &
en dernier lieu , que les loix éta blies par la voix & confentement unanime, ou preſque unanime du peuple , portent avec elles un ca raćtere plus ſenfible de la droite rai fon, que celles qui font formées par l’autorité d’un feul homme : ce que la droite raifon doit
:
àl'homme pour lui faite vouloir ce ui eſt bon ; nous l'appellons puif
:
mais dans la corruption de la nature, c’est-à-dire dans ſon étataprès le péché.
Cette feule puiſſance n’eût pas ſuffi pouraffermirla Société des hommes:
car par un déreglément ordinaire à l'homme qui abufe dans fes aćtions
particulieres de la liberté de fa vo
İ:
, il préfére fouvent ce qui flate fa cupidité à ce qui concerne le bien public de la Société. Il a donc fallu produire au dehors les effets de la droite raiſon, & ce font les loix, & celles-ci mêmes n’auroientpů contenir l'homme dans le devoir;
ſi les hommes n’euffent accordé aux hommes
:
»U PRINce Rakoczi. 2;:
hommes le pouvoir coaćtif de ren dre viſible dans la perſonne de ceux qui devoient commander, la puif fance inviſible de la raiſon, & afin
que par leur miniſtere, l'équité &
la fécurité de la juſtice fût exercée par des peines afflićtives, contre ceux qui défòbéiroient à la puiſſance de la droite raifon, exprimée par les loix. On dit que ce fut Ném
brod, qui exerça le premier la puif
fance coaćtive, non de la faine rai
fon; mais de lá
cupidité, en s’arro geant l'empire fur les autres.Il paroît clairement quela force ou
puiſſance coaćtive a été donnée par un libre confentementļdu peuple, ou à un comme Rois & Princes, ou à pluſieurs comme les Magiſtrats,d'où il eſt évident que tous ceux, à qui ce fuprême pouvoir eſt donné légitime ment, c’eſt-à-dire par les libres fuf frages du peuple, font les images,
& les Vicaires de la puiſſance de Dieu, & que comme tels ce feroit une impiété de leur réfifter dans les fonćtions de leur Miniſtere; mais
B
26 - TESTAMENT , PoLITIQUE, il ne paroît pas moins clairement , f que quand ces puiſſances viſibles agiffent contre les loix, elles réfif tent les premieres à la puiſſance , des loix de Dieu, & de la droite raifon. Quant à ce que nous avons rapportébriévement, que cette fu prême coảćtive puiſſance, & en ce Íens celle de regner n’a pû être con férée légitimement, que par le libre
confentement des peuples; afin que : cette vérité foirmiſe dans un plus :
beau jour, parcourons la Théocra- tie, ou Gouvernement de Dieu furº,
fon peuple choifi. . . . . . .
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DU PRINCE RAkoczi. 27
C H A P I T R E V.
De la liberté d'origine, du peuple
de Dieu.
I EU renouvella le monde
après qu'il eut détruit par le
déluge toute ame vivante, & il éta
blit
:
Jufte Noé en Monarque detout l’Univers , & après fa fortie de l’Arche avec fes
:
il les bénit,& leur dit : Croiſfez & multipliez vous , & rempliſſez la terre.* Il
leur rendit le domaine fur toutes
les créatures , en difant que tous
les animaux de la terre & tous
les oiſeaux du Ciel foient frappés de terreur , & tremblent devant vous, avec tort ce qui fe meut fur la terre : J’ai mis entre vos mains tous les poiffons de la mer.
Nourriffez-vous de tout ce qui a vie & mouvement ; je vous ai
* Gen. Chap. 9. y. 2. •,
Bij
28 TesTAMENT PoLITIQUE;
abandonné toutes ces choſes com
me les légumes & les herbes de la campagne ; mais afin que les enfans de Noé , & fa poſtérité n’étendiſ fent pas
::::::::
ce pouvoir furtout ce qui vit & fe meut , il ajoute : Je vengerai votre fang de toutes les bêtes qui l'auront répan du , & je vengerai la vie de l’hom me de la main de l'homme , & de la main de fon frere qui l’aura tué.*Quiconque aura répandu le fang de l'homme fera puni par l’effufion de fon propre fang; car l'homme a été créé à l’image de Dieu ; telle a été la liberté de l'origine du peuple de Dieu, & en cela il n’y a pas eu de différence par rapport aux autres - defcendans de Noé, & par confé quent à tout le genre humain, &
de là il paroît que la liberté a tou jours été l'appanage de la créature . . . formée à l'image &refſemblance de
Dieu, qui lui a donné non une por tion limitée de la terre, mais tout l'Univers, non certains animaux
* v. 4. Ở 5.
:
DU PRINCE RAkoczI. · 29 pour fa nourriture, mais tout ce qui a vie ; le genre humain eſt adonné au luxe au milieu d’une fi ample do mination fe répandit comme une innondation ; l’Ecriture rapporte, comme nous avons déja dit , que Nembrod commença le premier à être puiffant fur la terre, mais ce
n’eſt ni en lui ni en fes defcendans
qu'il faut chercher l'origine d’un peuple, dont les peres n’ont jamais été aflujettis à aucune puiſſance qu’à
celle de la droite raifon, ou à la loi de nature, & afin qu’ils confervaſ
fent fans tache leur liberté origi
nelle. Dieu appella Abraham de la maiſon de fon pere, & de fa pa renté, pour le faire vivre en pelé rin fans être indépendant , il le rendit riche & opulent,fans lui don ner aucune terre en propre, mais en lui permettant de fe fervir de toutes celles qu'il habitoit ; telle auroit dû être la poſſeſſion de la terre fi la cupidité n’eût introduit la propriété. Čar la terre eft au Sei gneur, & il en a feulement laifféBiij
3 o TESTAMENT PoLITIQUE, l’uſufruit aux hommes, & c’eſt en ce ſens que Dieu avoit promis la poffeſſion de la terre à Abraham,
& à fa poſtérité; ce n’eſt pas du ref fort de cet ouvrage d’examiner
:
Dieu a laiffé fi long-tems Abraham pélerin, & qu’il a fou mis Iſaac & Jacob à ce même fort;ces réfléxions font ſpirituelles, & on en a traité en d'autres Ecrits : qu'il fuffife de dire ici que la raifon mê me de la propagation demandoit qu’ils vécuffent
long-tems
dans lerepos, fans fouiller cependant la li berté de leur origine.
Ce n’eſt pas fans un deffein admira ble de Dieu,que Joſeph a commandé à toute l’Egypte & que Pharaon re çut le pere & les enfans comme fes
hôtes, & comme tels, leur donna la terre de Geffen à habiter.* Sui vant l’Ecriture le peuple d'Ifraël ha bita pendant quatre cens trente ans la terre d'Egypte, & sy multiplia grandement , cependant il s’éleva dans l'Egypte un nouveau Roi, à
* Exod. Chap. 1 o. v. 4o.
DU PRINCE RAkoczi. .. #1 qui Joſeph étoit inconnu, & il dit à fon peuple : * Vous voyez que le
:
d'Iſraël eſt devenu très-nom reủx, & qu'il eſt plus fort que hous;opprimons-les donc avec fageffe de peur qu’ils ne fe
:
eńcore davantage : & que fi nous hous trouvions furpris de quelque guerre ils ne fe joigniffent à nos ennemis,& qu’après nous avoir vaincu ; ils ne fortistent d'Egypte. Il établir
donc des Intendans des
ouvragés
3afin qu’ils accablaffent les Hebreux de fardeaux inſupportables; & ils bâtirent à Pharaon des Villes pour fervir de magafins, à
favoir Phi
ton & Rameffées. . . ::-: :- Queleſt le politique mondain qui
ne trouvera pas ce confeil prudent?
Mais quel eſt celui qui pourra le trouver conforme à la loi de nature, ou qui nous dit: Ne faires pas aux autres ce que vous ne voudriez pas, qu'ils vous fiffent. Qu’on confulte les politiques fi Pharaon a eu le droit de commander fur le peupled'Ifraël,s'il
* Exod. Chap. 1, v. 8.
B iiij
32 TESTAMENE - PoLITIQUE, a půle contraindre aux travaux pu blics; qui eſt celui qui ne dira pas qu’un peuple né dans les terres de la domination de Pharaon , eft de venu ſon fujet par la prefcription de pluſieurs
:,
& par fon li bre confentement, & a pû être contraint aux travaux qui concernent
l'utilité publique ? Perfonne à la vérité né pourra démontrer par l'E criture que tout le peuple d'Iſraël
fe foit volontairement foumis à
Pharaon, mais ceux qui croient que le filence vaut un confentement, diront donc que la force coaćtive du Roy d'Egypte dans l’établiſſement des Intendans, commis pour avoir foin des ouvrages publics, a été en tierement légitime ; ce feroit là l'opinion commune fi les politiques du fiécle ofoient s’oppofer à l'auto rité de l’Ecriture, peut-être même qu’il s’en trouvera qui diront que ce cas, & ce peuple doivent être ex ceptés de la loi commune; & ne peuvent tirer à conſéquence , &
qu’enfin il a plû à Dieu d'en agir
---
:
:
DU PRINCE RAkoczi. 33 ainfi, & que fes jugemens font une abîme impénétrable, mais laifſons là ces diſcuſſions, & contentons nous de ce que dit l’Ecriture *.
Long-tems après le Rei d'Egypte mourut, & les enfans d'Iſraël gé miffant fous le poids des ouvrages, qui les accabloient, criérent vers le Ciel, & les cris que tiroit deux l’excés de leurs travaux , s’élevé rent juſqu'à Dieu. Il entendit leurs emiſſemens, & fe fouvint de l’al iance , qu'il avoit fait avec Abra ham, Iſaac, & Jacob, & le Sei
neur regarda favorablement les en
:
d’Iſraël , & il les reconnut pour fon peuple. Qui ne dira que ce texte démontre manifeſtement que Dieu en conféquence de fa promef ſe a agi en faveur de fon peuple ; mais ofera-t-on conclure de-là qu’il a fait tort à Pharaon comme légi time Roi d'Egypte, en enlevant un fi grand peuple à fon empire ? cer tainement un Chrétien fe gardera bien de ceblaſphême, mais tous les* Exod, Chap, z. v. 23 B V.
34 TESTAMENT PoLITIQUE , fages ne conviendront pas, que tout ce qu’on dit des prefcriptions des peuples du tacite confentement,
ou de l’irrevocabilité du confente
ment font la plupart du tems des prétextes
:
la cupidité , &non les impreſſions de la juſtice de Dieu, & de la droite raifon ; car on dit pour l’ordinaire qu’un Roi our raiſon d'Etat, & du bien pu
į:
peut expliquer, changer, & fe lon le fentiment même de quelques uns, déroger aux loix ; mais on ne dira pas réciproquement , que le - peuple en puiſſe faire de même pour fon intérêt & confervation ; mais que ce qui lui a plů une fois ne peut plus lui déplaire : de vou loir cependant accommoder à ce fentiment la loi de la nature, ou de Ia droite raifon , ce ne peut être que la cupidité ; la force & l’auto rité agiffent par ſa fuggeſtion , qui feront des æuvres d'une puiſſance re belle, à la puiſſance des loix de la faine raiſon , & par conféquent à Dieu. Tandis que le peuple HeDU PRINce RAkoczi, 35
breu fut traité ſuivant la loi de
l'hoſpitalité , il ne regretta pas fa liberté, mais d'abord que
pl:
raon violant la loi de nature, &
fuivant les fuggeſtions de la cupi dité & d’une fauffe prudence, com mença à perfécuter le peuple , il cria vers Dieu , & il fut exaucé quoique long-tems après. --
:
ceux qui ne diftinguant pas la - puiſſance de la cupidité,de celle de ladroite raifon, enſeignent qu’il n’eſt
permis de réfifter à aucune puiſſance, recherchent de quel droit & auto rité Moïſe s'eſt érigé en Juge, *& s'eſt arrogé le pouvoir dė tuerun
Egyptiem, qui avoit querelle aveſun Hebreu
:
frere ; Mais lorfque nous confidererons le peuple Hebreu libre dans fon origine,
nous trouverons que Moïſe a fait our fon frere ce qu’il auroit vou:
qu'on eût fait pour fa défenfe,arce que la légitime puistance de
a droite raiſon réfifta pour la défenfe d'un frere à un Egyptien, qui
* Exod. 2. v. 12.
B vj
36 TESTAMENT PoLITIQUE, ufurpoit un pouvoir illégitime; car pour ce qui regarde l'homicide, c’eſt une autre queſtíon, que nous ne pourrions évoquer au texte de la Loi Evangélique, ni même de la Loi écrite , mais non encore pu bliée , ni en juger felon ces deux régles: Qu'il fuffife donc pour ap puier notre fentiment que l’Ecri ture ne condamne point l'aćtion de Moïſe, & qu'il eſt évident par ce que nous avons rapporté, qu’un fé jour de plus de quatre cens ans du peuple d'Iſraël, n'a pú faire une prefcription contre la liberté origi nelle, & que ni les travaux auf quels il a été contraint, ni un pré tendu tacite confentement à la puiſ fance des Egyptiens n’ont pů pré judicier à fa liberté, & par confé quent que Moïſe a tué l'Egyptien
:
le même droit, c’eſt-à-dire de a nature & de la droite raifon, &enfin qu’un peuple libre peut réfif ter à ſes aggreffeurs. Par les en
droits ſuivans de l'Ecriture, il fau dra obſerver quelle conduite Dieu
/ s
DU PRINCE RAkoczr. 37 a tenue pour délivrer fon peuple, que la nature & fon origine avoient rendu libre, mais qu’une puiſſance injufte retenoit dans la fervitude.
C H A P I T R E VI.
De la Miſſion de Molfe au peuple.
r
L:
C R ITU RE a rapporté au verfet déja cité , * que le Seigneur regarda les enfans d'Iſraël& les reconnut pour fon peuple, * Dieu dit donc à Moïfe , lorfqu'il étoit encore pelérin . & qu'il fuyoit l'injufte puiſſance de Pharaon: J’ai vů l'afflićtion de mon peuple qui eft en Egypte : J’ai entendu le cri qu’iljetteà caufe dela dureté de ceux
:
ont l’intendance des travaux , &achant quelle eſt fa douleur, jefuis defcendu pour le délivrer des mains
des Egyptiens , & pour
le faire* Exod 2. v. 25. * Exod. 3. v. 7.
-->****
38 TESTAMENT , PoLITIQUE, paffer de cette terre, dans un Pays
d'abondance. * Le cri des enfans
d'Iſraël eſt donc venu juſqu’à moi:
J'ai vů leur afflićtion & de quelle maniere ils font opprimés par les Egyptiens; mais venez, & įë vous envoyerai vers Pharaon , afin que vous faffiez fortir de l'Egypte les enfans d'Iſraël qui font mon peuple.
· Confidérons en tout cela pre mierement que Dieu a choiſi non un Prince ou un homme étranger, mais un d'entre fon peuple , péle rin comme lui, pour exécuter une
fi haute entrepriſe, dans laquelle il vouloit faire éclater aux yeux de fon peuple la force de fon bras : *
Dieu commande d'abord à Moïſe
d'aller trouver Pharaon , mais il ré pondit: Qui fuis-je moi,
:
aller vers Pharaon, & pour faire fortir d'Egypte les enfans d'Iſrael ? Dieu lui répondit : Je ferai avec vous; &ce fera là le figne qui vous fera con noître que c'eſt moi, qui vous ai
* v. 9. * v. 11.
DU PRINCE RAkoczi. 39 envoyé. Lorſque vous aurez tiré mon peuple d’Egypte, vous offrirez à Dieu un Sacrifice fur cette mon tagne, Moiſe dit à Dieu : J’irai donc vers les enfans d’Iſraël, & je leur dirai : Le Dieu de vos Peres m’a envoyé vers vous ; mais s'ils me difent quel eſt fon nom : que leur réponderai-je ? ... * Dieu dit en core à Moïfe : Vous direz ceci aux enfans d’Iſrael : * Allez , affem blez les Anciens d'Iſraël , & dites leur... & ils écouteront votre voix,
& vous irez vous, & les Anciens d'Iſraël, vers le Roi d'Egypte ; &
Moïſe répondit à Dieu :
:
ne mecroiront pas, & ils n'écouteront pas ma voix, mais ils diront: Le Sei gneur ne vous a point
:
: Que fi ces chofes font admirables à ceuxqui les regardent ſpirituellement, elles ne font pas moins merveilleu fes pour les politiques mondains,
& confidérées felon la lettre ; Mof fe diſpute avec Dieu, & Dieu s'ac
* v. 15. v. 16. v. 18. * Exod. Ch. 4. v. 1 •
4o TesTAMENT PoLITIQUE : commode par une condefcendance admirable à fa maniere de parler, il ne le contraint pas, mais il diſpo fe avec douceur fa volonté, & dans tous les traits déja cités, ni dans ceux qui fuivent, on ne fauroit re marquer aucune force qu’on appel le coaćtive, que Dieu eût pû don
ner dès-lors à Moïſe, comme il fit
enfuite après la publication, & l’ac ceptation de la Loi, & qu’il lui donna contre Pharaon en l'envoyant en Egypte ; mais il exige premie
rement le libre confentement de
Moïſe, enfuite celui du peuple; il veut qu'il affemble les Anciens d’If raël, en qui réfidoit d'autant plus excellemment la puiſſance non coac tive, maisperfuaſive de la raiſon ; il veủt qu’il expoſe au peuple fon in tention,&enfuite à Pharaon conjoin tement avec les Anciens du peuple.
La raifon naturelle fuggeroit à Moife, qu'il pourroit arriver que le peuple lui demanderoit qui l’avoit envoyé, & douteroit de fa Miffion,
& voilà que Dieu lui donne le pou
DU PRINCE RAkoczi. 4 I
voir de faire des miracles pour lui faire trouver créance, & gagner le confentement du peuple à feš pa roles : * S’ils ne vous croient pas dit le Seigneur, & s'ils n’écoutent pas la voix du premier miracle, ils écou teront celle du fecond ; que fi à ces deux miracles ils ne croient pas encore , & qu'ils n’écoutent point votre voix,* prenez de l'eau du fleu ve &c.Mais tout cela ne fléchit point
encore la volonté de Moïſe, mais il cherche à s’excufer en dilant , je vous prie Seigneur , envoyez ce lui, que vous devez envoyer, &
l'Ecriture ajoûte : Le Seigneur fe
fâcha contre Moïfe & lui dit: Mais
quel eſt l’effet de cette colere?
Eſt-ce qu'il le frappe, eft-ce qu’il
contraint la volonté d’une créature
libre ? Non certainement ; mais il perſuade Moïſe par un argument plus touchant , & lui dit : Je fai qu'Aaron votre frere de la race de Levi , s'exprime aifément : il ya
* Exod. 4. v. 8 * v. 13. v. 14.
42 TESTAMENT PoLITIQUE,
venir au-devant de vous ; &quand il vous verra fon coeur fera plein de joie, parlez lui, & mettez mes pa roles dans fa bouche : * Je ferai dans votre bouche, & dans la fien ne, & je vous montrerai ce que vous aurez à faire. Il parlera pour vous au peuple , & il fera votre bouche , & vous le conduirez dans
tout ce qui regarde Dieu ; & ce fut là le dernier argument, qui perfua
da fans contrainte Moiſe d’exécuter
les ordres de Dieu. C’eſt ainſi que Dieu agit par la puiſſance de la droi
te
:
fur la volonté de l’homme, à qui il la fait connoître, & ai mer, & donne des forces pour la fuivre, & dit ainfi ce qu'il difoit à
Moife : * Allez, & retournez en
Egypte, &c. Et la volonté ne réfif te plus, parce que la raiſon éclairée de Dieu prend le deffus. Moïſe ra conta à Aaron tout ce que le Sei gneur lui avoit dit en l'envoyant :
& il fit des miracles devant le peu
* v. . 15. , v. 19.
DU PRINce Rakoczi. , 43 ple,& le peuple crut, & ils comprí rent que le Seigneur avoit vifité les enfans d'Iſraël, & qu'il avoit regar dé leur afflićtion, & fe proſternant
en terre ils l’adorérent. Voilà le com mencement des oeuvres de Dieu
pour la délivrance de fon peuple; &
avant que d’y faire agir Moïſe par les prodiges, il demanda le confente ment libre & volontaire du peu
ple. - - -
Peut-être y a-t-il des Ecrivains,qui accommodent à leurs fentimens,* ce qui eſt rapporté du fecond comman dement de Pharaon pour prefſer les ouvrages, & des plaintes
:
peuple,& qui diſent, que Dieu n’a pas com mandé de réfifter & de déſobéir aux
ordres de Pharaon, quelques illégi times & tyraniques qu’ils puiſſent être, mais d’attendre la permiſſion
& le commandement de Pharaon
pour fortir de la captivité ; mais ceux qui difent de telles chofes ne confidérent pas affez attentivement
* - * Chap 5.
44 1 EsTAMENT PoLILIQUE, ce que l'Ecriture rapporte.* Le Sei gneur dit à Moïſe : Vous vertez
maintenant ce que je vais faire à Pharaon, car je le contraindrai par
la force de mon bras à laiffer aller
les Iſraëlites, & ma main puiſſante l'obligera de les faire fortir lui-mê me de fon Pays; Dieu a voulu ici tout faire; * c’eſt pourquoi dites de ma part aux enfans
:
(or donne-t-il à Moïſe) Je ſuis le Sei gneur : C'eſt moi qui vous tirerai de la prifon des Egyptiens, qui vous délivrerai de la fervitude, & qui vous racheterai en déployant la force de mon bras, & en faifant éclater la fé vérité de mes jugemens, je vous prendrai pour mon peuple , & je ferai votre Dieu , & vous faurezque c’eſt moi qui fuis le Seigneur votre Dieu; lorſque je vous aurai
délivrez de la
:
des Egyptiens.Voilà la véritable raifon pourquoi le peuple ne dût pas , quoiqu’il eût pû réfifter aux Egyptiens qui les
* Exod. 6. v. 1. * v. 6.
: -
: :
DU PRINCE RAkcozi. 45 accabloient; & Dieu dit à Moïſe : * Je vous ai établi le Dieu de Pha raon, & Aaron votre frere fera vo tre Prophéte, vous direz à Aaron, tout ce que je vous ordonne de di re , & Aaron parlera à Pharaon afin qu'il permette aux enfans d'If rael de fortir de fon Pays ; mais j'endurcirai fon coeur, & je fignale rai ma puiſſance dans l'Egypte par un nombre de prodiges & de mer- veilles; & Pharaon ne vous écoute
ra point ; j’étendrai ma main fur l'Egypte, & après y avoir fait écla ter la vérité de mes jugemens, j’en ferai fortir mon armée & mon peu ple, qui font les enfans d'Iſraël.
Ne craignons pas de nous faire nous mêmes des objećtions ſcrupuleufes pour mieux démêler la vérité : re cherchons les Princes dont parle l’Ecriture ; nous n’en trouverons
point d'autres que ceux que la droi te raiſon a établis; * puiſque l'Ecri ture les appelle Princes des maiſons
* Chap. 7. v. 1. * Chap. 6. ve 14
46 TESTAMENT Politroge,
felon l’ordre des familles ; c’est la nature & la raifon même ,qui en feignent aux enfans d'obéir a leurs pạrens, & aux jeunes gens d’écou ter les Anciens ; je dis la nature non feulement de l’homme, mais de l’a
nimal; & parmi tous les peuples, on a toujours eu de la
:::::
tion pour les vieillards en qui la rai fon ſuppoſe l'expérience, & une prudence plus mûre, comme nous verrons ci-après en fon lieu; mais concluons maintenant de tout ce que nous avons dit qui a du rapport à notre ſujet, & ne nous ennuyons pas de répéter, que Dieului-même a commencé la délivrance de fon
peuple, par voie de perfuafion à l'é gard de Moïſe, & non de contrain te, pour l'engager à entreprendre l'ouvrage de cette délivrance, qu'il a voulu qu'il convoquât les Anciens du peuple , & que par les prodi ges qu'il fit en préfence du peuple, il gagna leur libre confentement ; après quoi il alla trouver Pharaon,
& exécuta les ordres de Dieu ;
*