pidité;
telle fut la domination ufurpée & fi ancienne parmi les Nations que Nembord s’arrogea comme nous avons fouvent répété, ce fut donc à bon droit que Dieu fut irrité, &
:
fe plaint d’être en quelque açon rejetté par fon peuple quidemande d’avoir un Roi comme les autres Nations , mais comme il avoit prévu ce qui devoitarriver, afin que par le droit du Roi qu'il
fit déclarer par Samüel, il ne fem
DU PRINce · Rakoczi. 129 blât donner aux Rois un pouvoir arbitraire, il fit d'abord écrire par
Moïſe dans le Deuteronome les loix
qui regardoient les Rois , qui de voient regner en Iſraël, fort oppo fées au droit des Rois Gentils, que Samüel repréſenta: Quand vous fe rez entré, * dit le Deuteronome, dans le Pays, que vous en ferez en poſſeſſion & que vous y demeure rez, fi vous venez à dire: Je choi firai un Roi pour me commander
comme en ont toutes les Nations , qui nous environment ; vous éta blirez celui que le Seigneur votre
Dieu aura choifi du nombre de vos
freres , vous ne pourrez prendre pour Roi un homme d’une autre Na tion, & qui ne foit point votre fre re, & lorſqu'il fera établi Roi, il n'amaffera point un grand nombre de chevaux, & il ne ramenera point le peuple en Egypte, s’appuyant fur le grand nombre de fa cavalerie, principalement après queleSeigneur
* Chap. 17. Ý. II. F
v
ir 3 o TesTAMENT PoLITIQUE ; vous a commandé de ne retourner
plus à la venir par la même voie;
il n’aura point une multitude de femmes qui fe rendent maîtreffes de fon eſprit , ni une quantité immen fe d'or & d’argent; après qu’il fera affis fur le Trône, il fera tranſcrire pour foi dans un Livre ce Deutero nome & cette Loi du Seigneur, dont il recevera une Copie des mains des
Prêtres de la tribu de Lévi: il l’aura
avec foi , & il la lira tous les jours
de fa vie, pour apprendre à crain dre fon Dieu, & garder fes paroles
& fes cérémonies, qui font prefcri tes dans laLoi;que fon coeur ne s’em fle point d’orgueil au-deſſus de fes freres , & qu’il ne fe détourne ni à droite ni à gauche afin qu’il regne long-tems lui & fes fils fur le peuple d’Ifaël. Cette inſtrućtion eſt courte, mais énergique: & fi le peuple eût dit à Samüel, que Dieu nous donne un Roi, comme Moyſe dans le Deu teronome prédit qu'il fera , fans doute, Diêu ne fe fût pas fâché, parce que non-feulement il avoit
DU PRINCE RAkoczi. 13 1 prévû que cela feroit ainfi , mais encore comme on peut conjećturer en conféquence de fes oeuvres, il étoit dans l’ordre de fes décrets, que ce peuple eût des Rois, mais non tels qu'ils les demandoient voulant à l'exemple des Nations, un Roi qui le dominât, & rejettant ainfi la do
mination de Dieu.
Ayant donc poſé ces préliminai res, que l'on combine le droit du Roi que Samüel déclara, & que nous avons déja rapporté, & la loi que le Deuteronome donne aux Rois, & il paroîtra plus clair que le jour, combien eft différente la puiſ fance paternelle & fraternelle don née aux Rois , qui eſt le véritable gouvernement de Prince de ce droit uſurpé par la cupidité, que Samüel annonce au peuple afin qu'il re connoiffe la folie de fa demande;
certainement il fera manifeſte que la premiere de fes puiſſances con cerne une République de freres, &
que la feconde fe rapporte à l’inté rêt particulier ; la premiere eſt une
Fvj
x 32 TesTAMENT PoLITIQUE ;
:
exécutrice des loix, qu'el e ordonne d'avoir toujours devant les yeux, de lire , & d’exécuter; la feconde eſt une puiſſance uſurpée, qui fait des loix, où elle ne fuit queles mouvemens de fa cupidité, qui exerce une autorité tyranique fur les fujets, & pleine d’injuſtice;c’eſt pour cela que Jeſus Chrift dit
dans
:::::
à fes Diſciples - dans le nombre defquels font compris lesRois Chrétiens : * Les Rois des Na
tions les traitent avec empire, &
ceux, qui en font les maîtres en font appellés les bienfaiếteurs : qu'il
n’en
:
pas de même parmi vous, mais que celui qui eſt le plus grand.devienne comme le moindre, & ce lui qui gouverne comme celui qui fert; car lequel eſt le plus grand de celui qui eſt à table ou de celui qui fert : N’eſt-ce pas celui qui eſt à table? & néanmoins je fuis parmi vous comme celui qui fert; mais ce n’eſt pas encore ici la place de
*_S, Luc Chap. 22. y. 25,
Đv Prince RAkoczi. I 33 parler du caraćtere des Rois Chré tiens ; retournons donc à confidé
rer cet admirable égard pour ainfi dire,que Dieu a pour la libre volon té de fon peuple, quoiqu'il deman
dât un Roi
:::::
& contre lavolonté de Dieu. * Ecoutez donc ce qu'ils vous difent , dit-il à Sa müel, mais auparavant faites-leur bien comprendre & déclarez-leur quel fera le droit du Roi qui doit re gner fureux; Samüel ayant enten du la réponſe du peuple, la rap orta au Seigneur , & le Seigneur
:
dit :*Faites ce qu’ils vous difent& donnez leur un Roi qui les gou verne , mais nonobſtant ce com mandement : voyons quelles for malités y obſervela bonté divine:*
ce fut Dieu qui indiqua à Samüel de facrer Saül, & felon ce com mandement Samüel prit une petite fiole d’huile qu'il répandit fur la tê
te de Saül, & il le baifa & lui dit :
* Moiſe Chap. 8. y 9. *ỳ. 21, ġ, 22;
* I. Rois Chap. I 1.
-134. , Tes rAMENT Polrrroge;
C’eſt le Seigneur qui par cet onc
tion vous facre Prince fur fon héri
tage, & vous délivrerez fon peuple de la main de fes ennemis qui l'environment. Voici la marque que vous aurez, que c'eſt Dieu qui vous a facré pour Prince: * En même tems l'Eſprit du Seigneur fe faifira de vous, vous prophétiferez avec eux, c’eſt-à-dire avec les Prophétes, dont Samtiel lui avoit prédit aupa ravant qu'il rencontreroit une trou pe ( & vous ferez changé en un au tre homme) il auroit donc fuffi à Samüel de déclarer au peuple ce qu’il avoit déja dit à Saül à l’oc cafion de fon facre, & certainement le peuple entendant Saül prophéti
fer, auroit cru à Samüel, & recon nu Saül pour Roi.
Après cela Samüel fit affembler tout le peuple à Mafpha devant le Seigneur, & il dit aux enfans d'If raël : Voici ce que dit le Seigneur le Dieu d'Iſraël : C'eſt moi qui vous
* ž., 6,
pU PRINce RAkoczi. 13 r.
ai tiré de l'Egypte, & qui vous ai délivrez de la maifon des Egyptiens,
& de toutes les miſéres qui vous ac
cabloient: Nous ne vous écoutions
oint, m’avez-vous répondu; mais
établiſſez un Roi fur nous mainte
nant, donc préſentez-vous devant le Seigneur, chacun, dans le rang de fa tribu & de fes familles, & Sa müel ayant jetté le fort fur toutes les tribus d’Iſraël, il tomba fur la tribu de Benjamin, il le jetta en
fuite ſur les familles de la tribu de
Benjamin , & il tomba fur la famil le de Metri, & enfin jufques fur la perſonne de Saül fils de Cis; on le chercha auffi-tôt, mais il ne fe trou
va point, & ayant confulté le Sei gneur pour favoir s'il viendroit en ce lieu la. Le Seigneur lui répondit:
A l'heure qu’il eſt, il eft
:
dansfa maifon, ils y coururent donc, le prirent & l’emmenérent , & lorf qu'il fut au milieu du peuple, il pa rut plus grand que tous les autres
de toute la tête.
. Samüel dità tout le peuple: Vous
i 36 Tes rAMENT Potrrratre;
:
quel eſt celui que le Seigneur a choifi, & qu'il n'y en a:
danstout le peuple qui lui foit femblable,
alors tout
:
peuple s’écria : Vive le Roi , nous trouvons là beaucoupd’excellentes inſtrućtions , & fur toutes les autres , nous obſerverons premierement comme nous l'avons déja infinué plus haut, que ce fut Dieu même qui choifit Saül, & qui le fit facrer pour Prince dans fon héritage, & entre les autres mar ques que lui donna le Prophéte qu'il avoit été facré Prince: fut que l'Eſprit du Seigneur, fe faifiroit de lui, & qu’il feroit changé en un au tre homme ; mais tout n’étoit pas encore achevé juſqu’à ce que Sa müel affembla tout le peuple à Maf pha; & après avoir derechef re
proché au peuple qu'en demandant
un Roi il avoit rejetté le Seigneur,
‘il fit jetter le fort fur les tribus &
familles, mais il ne dit pas, Dieu l’a ordonné, & il a facré Saül pour être votre Roi, car quoique cela ait été fait ainfi, Dieu confeva toute la
:
DU PRINCE RAkoczi. 137 liberté au peuple pour l'Elećtion afin que la bouche du
:
prononçât ce que Dieu réſolut,& qu’ain fi la voix du peuple devint la voix de Dieu. Après donc que le fort fut tombé fur Saül, voilà qu’on ne le trouve point dans la multitude, &
il fallut encore confulter Dieu pour favoir s’il viendroit , & Dieu indi qua qu'il étoit caché:& certainement
en cette occaſion il montra encore
mieux qu’en prophétifant que l'Ef
:
du Seigneur s’étoit emparé de ui, & qu'il étoit devenu un autre homme, car il ne rechercha pas la Royauté, mais Dieu chercha Saül qui ayant été enfin trouvé parut au milieu du peuple plus grand::
cun qui fut dans cette multitude; &
le peuple voyant cela s'écria : Vive le Roi, & proclama fous le titre de Roi par de libres ſuffrages celui que Dieu avoit fait facrer Prince;
& ainfi Dieu lui donna le caraćte
re de Prince fur fon héritage par l’onćtion facrée, & lui conféra l’ef
Prir de Prince après le facre , mais
138 TESTAMENT PoLITIQUE ; le peuple à l'exemple des Nations le nomma Roi, parce qu’il le vouloit tel, mais conſidérons les fuites d’un
aćte fi folemmel; Samüel prononça enfuite devant le peuple
:
loi duRoyaume qu’il écrivit dans un Li vre, & il le mit en dépôt devant le
Seigneur.
-Ne diſputons pas quelle a été cet te loi. Suppofons que ce fut celle que nous avons ci-deffus rapportée, que Samüelprédit par ordre de Dieu, car il ne s’enfuivra pas de là qu'il l'ait écrite, & propoſée aux Rois comme la régie de leur conduite, mais plûtôt pour les avertir de pren dre garde à ne pas déroger à la loi donnée aux Rois dans le Deutero nome, mais il voulut que l’une &
l’autre fût écrite , afin qu’en les con
frontant on vit mieux la différence
du gouvernement des Rois Gentils, de celui des Rois Princes qui de voient regner, & non pas dominer dans l'héritage du Seigneur. * Après
* y. 26. 27.
:
DU PRINCE RAkoczi. 135
cela Saül s’en retourna auffi chez
lui à Gabaa avec une partie de l’ar mée , dont Dieu avoit touché le coeur & qui acquiefcérent librement à la volonté de Dieu manifeſtée par l’élećtion du fort ; mais les enfans
de Belial commencérent à dire au eontraire : Comment celui-ci nous
pourroit-il fauver : & ils le mepri férent, & ne lui firent point de pré fens ; mais voyons la conduite de Saül à leur égard, il ne veut point ufer de rigueur ; il n’ordonne pas qu’on puniffe les refraćtaires, à
:C-a
xemple des Rois des Nations, il ne
·les traite pas en efclaves felon le droit du Roi que Samüel avoit laif fé par écrit ; cette conduite eſt trop éloignée des fentimens de celui qui avoit été changé en un autre hom me , mais Saül diffimula cet outrage
& feignit de ne pas les entendre.
:
olitique mondain dira t-il, Saül fit prudemment, car il ne convenoit pas à un Roi nouvelle ment élu d’expofer fa perſonne, fon autorité & fa dignité, en comman14ô TESTAMENT PoLITIQUE, đant fi précipitamment à cette par tie de l’armée qui l’avoit fuivi, de fondre fur les rebelles; car peut être ceux de ſon parti auroient mieux aimé fe tourner de leur côté que d'aller contre leurs freres , mais ici la politique doit ſe taire, Saül n'eut point à reprimer des mouvemens de vengeance, mais conduit véri tablement par l’Eſprit de Dieu, il exerça un aćte de clémence, il agit en Prince, en pere & en frere : *
car revenant vićtorieux & triom
hant des ennemis, exalté par tout,
:
peuple l'excita à la vengeance, en difant à Samtiel: Qui font ceux quiont dit Saül fera-t-il notre Roi ?
Donnez-nous ces gens là, & nous les feront mourir préfentement ;
mais Saül leur dit : On ne fera
mourir perſonne en ce jour, parce