raiſon en l'homme, dans l'état de la nature corrompue.
S
I l'on prend dans un fens rigou=reux la puiſſance de la droiterai fon, qui doit diriger l'homme dans cette vie,ence qu’elle doit fe confor mer à la Loi fuprême de la juſtice de Dieu, pour parvenir à lui com me à fa véritable fin, c’eſt un effet de la grace furnaturelle, & ce n’eſt pas la nature corrompue, mais la miféricorde de Dieu, qui donne cette puiſſance aux hommes, c’eſt pour cela qu'il faut ici confidérer la puiſſance de la droite raifon natu relle, qui demeure à l’homme dans l'état de la nature corrompue pour agir moralement bien, & c’eſt ce qu'on appelle confcience, que la
2e TesrAMENT PoLITIỚge ; cupidité a coutume de corrompre dans l’homme en diverfes manieres, non-feulement par rapport au falur,
& à la vie ſpirituelle, mais enco re par rapport aux oeuvres morales, en lui repréſentant le faux fous l'ap parence du vrai.
-C'eſt la puiſſance de la droite rai fon, qui a dićtée , comme nous avons remarqué les loix de la natu re, & de celles-ci, font dérivées les
loix pofitives felon lefquelles la juf tice qui repréſente Dieu fur la terre eft exercée ; cette droite raifon ou tre les noms de confcience, de juf tice , a encore celui de vertu, &
celles-ci, font diviſées en différens ruiſſeaux, qui émanent de la même fource, & autant que fes effets s’é tendent ſur tous les hommes ; on l’appelle bien public, car la tran quillité, la paix,la juſtice, l’abon dance, les richeffes & l’ordre du gouvernement, procédent de l’em pire, ou puiſſance de la droite rai fon; mais ce qui doit paroître admi
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DU PRINCE - RAKoczi. 2. I
rable , & ce qui manifeſte bien évidemment le pouvoir de la droite raifon dans l'homme, c'eſt que quoi que ceux , qui dans la conduite de leur vie fuivent les fuggeſtions de la cupidité, foient en beaucoup plus rand nombre que ceux qui vivent ſuivant la droite raifon; cependant la voix du peuple eſt appellée la voix de Dieu, & rend témoignage à la vérité ; & les loix établies, ou acceptées par les peuples, qui ont agi librement , & non par con trainte, ont toujours été trouvées conformes à la juſtice & à l'équi té; nous difons des peuples qui n’ont as été forcés, qui ne fe font pas
İ:
emportés à la fureur, ou divi fés en partis & en fciſſions: car où les mouvemens violens dominent, la raiſon eſt rarement confultée.Yeut-il jamais d’entendement obf.
curci,de plus épaiſfesténébres d'aveu glement & d’ignorance, que celui des Gentils qui fe forgeoient des Įdoles, & adoroient des Dieux cous
22 TESTAMENT PoLITIQUE,
ables des mêmes crimes, que leurs
į:
puniſſoient dans les hommes ? Cependant malgré une telle diſpofition de leur entendement, la droi
te raifon regnoit dans le coeur des Légiſlateurs, qui ont fondé ces fa meufes Républiques, Royaumes &
Monarchies de l'Antiquité : Si nous recherchons comment ce peuple qui eſt appellé un monſtre à cent tê tes, peut cependant rendre témoi
:
à la véritć , ou établir desoix équitables; nous en trouve rons la raifon, en ce que la cupidi té agit plus violemment en l'homme dans les aćtions particulieres, &
que la droite raifon, la vertu, la robité font toujours préférées dans es aćtes publics, où la cupidité même & l’amour propre recher
chent l’amour &
i:
du peuple, craignent fon jugement, &::::
fe montrer à découvert , & pren nent le manteau de la probité & de la vertu ; & c'eſt ainfi que fouvent malgre foi , & contre fon propre
DU PRI Nce Rokoczi. - 2;
penchant on rend en partie témoi gnage à la vérité, & on fait des loix que la cupidité ne craint pas de violer dans le particulier.
On trouve pluſieurs perſonnes,qui font eſclaves de leurs paffions & fen
fualités ; mais ileft rare d’en trouver
qui fecoüant tout joug de la pudeur
& de la droite raifon, commettent en public les crimes, qui font ou qu’on croit contraires à la probité;
à moins que l'autorité publique &
unanime de ceux avec qui ils font en commerce, ne les regarde plus comme contraires à la probité. De tout cela concluons donc en pre mier lieu que la puiſſance de la droite raifon , a reſté à l’homme même dans l’état de la nature cor
rompue, & que cette puiſſance eft de Dieu, à qui il n’eſt pas permis
de réfifter. Concluons en fecond
lieu que les loix publiques font des
émanations de la droite raifon, &
qu’en leur rćfiſtant , on réfifte à Dieu, & à la puiſlance donnée de
24 TesTAMENT PoLITIQUE ; Dieu, concluons troifiémement , &
en dernier lieu , que les loix éta blies par la voix & confentement unanime, ou preſque unanime du peuple , portent avec elles un ca raćtere plus ſenfible de la droite rai fon, que celles qui font formées par l’autorité d’un feul homme : ce que la droite raifon doit
:
àl'homme pour lui faite vouloir ce ui eſt bon ; nous l'appellons puif
:
mais dans la corruption de la nature, c’est-à-dire dans ſon étataprès le péché.
Cette feule puiſſance n’eût pas ſuffi pouraffermirla Société des hommes:
car par un déreglément ordinaire à l'homme qui abufe dans fes aćtions
particulieres de la liberté de fa vo
İ:
, il préfére fouvent ce qui flate fa cupidité à ce qui concerne le bien public de la Société. Il a donc fallu produire au dehors les effets de la droite raiſon, & ce font les loix, & celles-ci mêmes n’auroientpů contenir l'homme dans le devoir;
ſi les hommes n’euffent accordé aux hommes
:
»U PRINce Rakoczi. 2;:
hommes le pouvoir coaćtif de ren dre viſible dans la perſonne de ceux qui devoient commander, la puif fance inviſible de la raiſon, & afin
que par leur miniſtere, l'équité &
la fécurité de la juſtice fût exercée par des peines afflićtives, contre ceux qui défòbéiroient à la puiſſance de la droite raifon, exprimée par les loix. On dit que ce fut Ném