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L’édition plurilingue

In document Cathedra Magistrorum 2013/2014 (Pldal 156-159)

Plurilinguisme et littérature jeunesse

3. L’édition plurilingue

Outre les livres bilingues traditionnels qui présentent les deux versions d’un même texte en face à face (et qui ne jouent, dans le cadre de notre analyse, qu’un rôle marginal), nombreux sont ceux qui exploitent les possibilités de ce jeu avec les langues de manière beaucoup plus astucieuse et vont ainsi bien au-delà de réaliser un simple dictionnaire « alternatif » (v. les albums bilingues).

Dans cette partie de notre étude, nous nous appuyons d’abord sur la très riche bibliographie constituée par Françoise Armand, Sarah-Ann Brisson et Benoit Desgreniers (Armand / Brisson / Desgreniers 2012), qui ont recensé les ouvrages consacrés à la diversité, au processus migratoire et aux phénomènes connexes. Nous serons par la suite amenés à compléter cette bibliographie

par d’autres documents, qui, pour certains, tirent déjà profit de nouvelles technologies.

M. Desgreniers et Mmes Armand et Brisson ont fourni aux enseignants et aux parents un outil précieux, car loin de recueillir simplement des titres d’ouvrages, ils les ont accompagnés d’un résumé, de la première de couverture, ainsi que de liens vers des pistes d’exploitation pédagogique. À part les livres consacrés aux grands thèmes (diversité linguistique vs. processus migratoire, contact, différence et racisme), ils ont classé les différents ouvrages en fonction de leur genre (albums / romans / documentaires / poésie, comptines et chansons / bandes dessinées / vidéos documentaires / ressources documentaires pour les enseignants) et de la tranche d’âge du public cible. Les livres qui traitent de questions particulièrement délicates comportent en plus dans la bibliographie l’étiquette « coup de poing ». La publication de cette bibliographie est suivie en 2013 de la réalisation d’un guide pratique qui propose d’autres pistes possibles d’exploitation pédagogique dans le même domaine, avec des activités diversi-fiées et des supports disponibles sur Internet (exercices d’écoute ou de vidéo mis en ligne, fiches d’élève à télécharger, propositions d’activités orales et écrites, enrichissement des activités proposées avec l’aide d’un tableau numérique interactif, propositions de lecture) avec une attention particulière portée aux ressources et aux activités plurilingues. Loin de présenter une simple base de données, ce projet a pour avantage de fournir des informations supplémentaires (des « astuces ») tant factuelles, pour faciliter la contextualisation des exercices, que pédagogiques et de donner, dans un premier chapitre très détaillé, un encadrement théorique de cette réflexion : cette introduction a le mérite de permettre un aperçu qui, tout en présentant l’arrière-fond théorique de cette orientation éducative, est rédigé dans un langage transparent et se fonde sur des données concrètes, rassemblées au cours de recherches menées sur ce sujet au Québec. Cette introduction fonde la nécessité de la prise en compte « de la dimension “langue” […] au sein de l’éducation interculturelle » puisque « la langue est un marqueur déterminant de la construction identitaire et une com-posante clé des rapports entre soi et autrui » (Armand / Maraillet 2013, 2). Si en tant qu’enseignants ou / et parents, nous voulons contribuer à « encourager la compréhension entre différentes populations et d’assurer le respect des droits fondamentaux » comme l’Organisation des Nations Unies le préconise (v. le document intitulé L’éducation dans un monde multilingue cité par Armand / Maraillet 2013, 3), nous pouvons considérer l’éducation plurilingue comme une des voies qui mènent par le biais du langage à la reconnaissance et à la valorisation d’une diversité qui va au-delà de la simple diversité linguistique.

Ainsi les livres plurilingues favorisent également

la connaissance de différentes cultures, la sensibilisation aux richesses du plurilin-guisme, la recherche d’indices multiples (congénères, schéma de récit, règles syn-taxiques) pour donner un sens à des langues inconnues des élèves. Ils permettent également l’acquisition d’habiletés de réflexion, de décentration et d’observation réfléchie du fonctionnement des langues. (Armand / Maraillet 2013, 7) À travers la sensibilisation peut également avoir lieu au sein de la classe une légitimation de la / des langue(s) d’origine des élèves issus de l’immigration.

Le travail avec des textes plurilingues peut se révéler fructueux même avec des groupes linguistiquement plus homogènes (c’est-à-dire sans élèves issus de l’immigration), car ces textes peuvent susciter la curiosité et favorisent ainsi l’ouverture vers d’autres cultures à travers une langue qui leur est plus familière. Ils font de plus appel aux différentes connaissances linguistiques et contribuent de la sorte à l’enrichissement d’une réflexion métalinguistique.

Enfin, un échantillon de témoignages recueillis auprès d’enseignants qué-bécois rend compte de leurs expériences faites au cours des activités « éveil aux langues » : chacun de ces témoignages porte sur des peurs et des doutes, formulés sous forme de questions type qui précèdent les propos recueillis – autant de réserves qui ont du mal à trouver leur place dans des programmes officiels sur le plurilinguisme, mais que les personnes concernées ont pour-tant bien présentes à l’esprit. Certains disent par exemple que « les activités d’éveil permettent d’intégrer les enfants dans la classe, comme ils sont, sans les transformer » (Armand / Maraillet 2013, 11, c’est nous qui soulignons), d’autres insistent sur les répercussions positives qu’exercent ces activités sur le niveau de motivation et la profondeur ainsi que l’intensité des réflexions, le problème étant justement que « les enfants d’aujourd’hui, on ne les pousse pas suffisamment à réfléchir » (Armand / Maraillet 2013, 12).

Pourquoi introduire alors, d’après les professeurs interrogés, ce type d’ac-tivités en classe ? « C’est ce qu’on veut quand on enseigne le français, des enfants motivés et qui réfléchissent. » (Armand / Maraillet 2013, 15, c’est nous qui soulignons).

Une autre enseignante y fait part de sa propre pratique de l’écriture qui a également fait ses preuves lors du travail en classe, avec ses élèves : elle propose aux élèves qui ne trouvent pas un mot en français de l’écrire dans leur langue maternelle et de chercher après l’équivalent français. Voici son explication : « … moi, ma langue maternelle, c’est l’arabe. Parfois, il y a un mot qui ne me revient pas ; pour ne pas couper mon élan, je l’écris en arabe et après je le cherche en français » (Armand / Maraillet 2013, 10, c’est nous qui soulignons). Une pra-tique qui, d’ailleurs, pourrait tout aussi bien porter ses fruits en cours de FLE : nous devons citer à ce sujet les travaux de Antonie Hornung et l’exemple qu’elle

donne dans un de ses articles (Hornung 2009, 138)7 d’un exercice d’écriture automatique. Le principe est le même, il ne faut pas « couper l’élan » : l’élève qui doit rédiger un court texte sur son propre apprentissage de l’allemand, écrit une série de lettres l, au lieu de s’arrêter à la recherche des mots qui lui manquent ou de l’inspiration nécessaire pour poursuivre son travail. Résultat : un texte beaucoup plus lisse, spontané et cohérent malgré des hésitations bien visibles !

À la fin de l’introduction, une bibliographie recensant les travaux les plus récents en matière d’éducation et de plurilinguisme (pour nombre d’entre eux, disponibles également en ligne) permet d’explorer davantage de pistes intéressantes.

In document Cathedra Magistrorum 2013/2014 (Pldal 156-159)