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4. La particularité de la formation des concepts en sciences juridiques

4.1. Le concept du droit

L ' o n sait que les escarmouches et les d é b a t s théoriques passionnés des siècles passés s o n t devenus des bases et des stimulants de n o m b r e de décla-rations pessimistes, voire e n t i è r e m e n t agnostiques, en ce qui concerne l a définition d u concept du d r o i t . Il semble, p a r exemple, que l'on puisse p a r a p h r a s e r , après 150 ans, l a c o n s t a t a t i o n bien connue e t quelque peu ironique de K a n t , selon lequel « ceux p a r m i nous qui ont a p p r i s que l'hu-milité ont d é j à renoncé à l'essai de définir le droit»1. R é c e m m e n t même dans la théorie socialiste a é t é développée u n e opinion selon laquelle il n'existe et on ne peut a t t e n d r e aucun a c c o r d concernant l a question de savoir quels sont les critères concrets a u x q u e l s devrait s ' a d a p t e r la défi-nition de l'extension et de la compréhension conceptuelles du t e r m e « droit »a. Nombre de controverses semblables t o u c h a n t des questions soulevées dans les sciences juridiques doivent être considérées en effet c o m m e illusoires, v u qu'en f o r m u l a n t la question de la m a n i è r e dont il s ' a g i t , la solution dépend a u f o n d des facteurs conventionnels, d ' u n accord linguistique».

L a définition des critères q u i trouvent l e u r expression d a n s le concept du droit soulève en théorie s u r t o u t deux questions controversées, dont la solution dépend a v a n t t o u t d u choix entre les approches positiviste ou socio-logique ou de la préférence donnée à l ' u n e de ces dernières «. Il s'agit t o u t d ' a b o r d de connaître l ' i m p o r t a n c e qu'on d o i t attribuer a u fait qu'une norme g a r a n t i e p a r la force coercitive de l ' E t a t est créée ou non par u n organe (étatique) qualifiée à cet effet par la constitution et d a n s une forme prévue aussi p a r la constitution. D e u x i è m e m e n t il s'agit de l'importance q u ' o n doit a t t r i b u e r à la circonstance de c o n n a î t r e si dans la réalité sociale une norme juridique se fait v a l o i r ou non avec ou sans une application de la force coercitive p a r l ' E t a t .

L ' o n sait que certaines approches forment le concept du d r o i t , en dehors d'autres f a c t e u r s de contenu, eu égard a u système des exigences foonelles du droit positif et qu'ainsi elles f o n t entrer d a n s le cercle notionnel du droit tous les actes régulièrement émis dans la f o r m e requise par u n organe compé-t e n compé-t , ecompé-t ceci i n d é p e n d a m m e n compé-t d u faicompé-t de savoir si, dans la réalicompé-té sociale, compé-tels actes se f o n t valoir ou non. D ' a u t r e s a p p r o c h e s par contre regardant le droit u n i q u e m e n t du côté de la réalité sociale e t font abstraction du système des exigences formelles du d r o i t potitif et ainsi ces approches font entrer 1. R A D I N Max, * A Restatement of Hohfeld *, Harvard Law Review L I (1938), p. 1145.

2. Voir G R E G O R O W I C Z Jan, Definicje w prawie i w nau.ce prawa (Définition dans le droit et dans la science du droit), Lôdz, 1962, chap. III.

3. Cf. par exemple PECZENIK Aleksander, Wartosc naukowa dogmatyki prawa (a valeur scientifique de la dogmatique juridique), Cracovie, 1966, chap. IV, paragraphe 12.

4. Quant à la position de la question et un c o m p t e rendu analytique des essais socialistes d'une solution, voir V A R G A Csaba, « Quelques problèmes de la définition du droit dans la théorie socialiste du droit», Archives de Philosophie du Droit X I I (1967), pp. 189 et s.

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F O R M A T I O N D E S CONCEPTS 2 2 5

dans le cercle notionnel d u droit tous les a c t e s qui se f o n t valoir d'une f a ç o n considérée comme caractéristique d u d r o i t , donc t o u s les actes qui d e v a n t la société se présentent c o m m e droit, n o t a m m e n t comme droit garanti d a n s une généralité donnée p a r la contrainte d e l ' E t a t , et ceci i n d é p e n d a m m e n t du fait de savoir si ces actes sont le r é s u l t a t d'une création régulière ou seulem e n t de l'application du droit. Dans la l i t t é r a t u r e juridique nous ne r e n c o n -trons q u e r a r e m e n t de positions formulées avec une précision similaire ; en même t e m p s cependant c'est un fait que certaines approches —• éventuel-lement a u m o y e n de la définition de conditions s t r i c t e m e n t délimitées — m e t t a n t en relief p l u t ô t , d ' u n e façon primaire ou exclusive, soit le critère de la r é g u l a r i t é s o i t celui de la mise en œ u v r e3 et soulignent ainsi l ' i m p o r -tance essentielle de leur définition.

Q u a n t a u problème q u i nous préoccupe dans le cadre présent, p e u im-porte la m e s u r e ou l ' é t e n d u e dans laquelle s'écartent l ' u n e de l ' a u t r e des extensions des concepts d u droit conçus e n général, ou relatifs à une so-ciété donnée, e x p r i m a n t le r é s u l t a t o b t e n u par une approche positiviste ou sociologique. C'est u n f a i t qu'en r a p p o r t avec le caractère de la for-m a t i o n sociale ou des particularités d ' u n e période donnée de l'évolution, existent d ' u n e p a r t d a n s u n e mesure p l u s ou moins g r a n d e , plus ou m o i n s f r é q u e m m e n t ou bien c o m m e des phénomènes exceptionnels des n o r m e s régulièrement créées qui n e se font p a s valoir, et d ' a u t r e p a r t des n o r m e s qui se f o n t valoir bien qu'elles aient été créées par u n organe i n c o m p é t e n t ou d ' u n e manière irrégulière. Comme n o u s avons essayé aussi de le faire figurer sur le dessin ci-inclus [1], l'extension et la compréhension des concepts du d r o i t e t des différentes définitions y afférentes s ' é c a r t e n t les unes des autres en principe.

Conformément à notre conclusion les concepts conçus dans un sens ou dogmatique ou sociologique constituent des objets de connaissance d i s t i n c t s qui ne sont identiques ni du point de v u e de la théorie ni du point de v u e de la p r a t i q u e ; nous devons donc définir e t examiner séparément la v a l e u r de vérité de chacune de ces définitions. Cette complexité nécessaire du droit qui suppose au moins une dualité, ne résulte donc p a s d ' u n problème t o u t simplement sémantique 3 ; la diversité de la signification du mot « droit »

1. Voir par exemple H A N E Y Gerhard et W A O N E R Ingo, Grund- lagen der Theorie des sozialistischen Staates und Rechts, Teil II, Leipzig, 1965, p. 26. Ces auteurs, en définissant formellement le critère de la régularité, en font un élément constitutif de leur définition.

Les conceptions socialistes y relatives sont résumées par SZABÓ, A szocialista jog, op. cit., pp. 2 1 9 e t s., pp. 2 3 0 et s. ainsi que par P O L E J A V P . T . , « K voprosou o poniatii socia-listitcheskogo prava» (Sur la question du concept du droit socialiste), dans Pravo i commounisme (Droit et c o m m u n i s m e ) , Moscou, 1965, pp. 19-26.

2 . Voir par exemple K U L C S Á R Kálmán, A jogszociológia problémái (les problèmes de la sociologie du droit), B u d a p e s t , 1 9 6 0 , pp. 1 9 5 - 1 9 6 ; 2 1 6 - 2 2 0 et 2 6 1 - 2 6 2 ; P E S C H K A Vilmos, Jogforrás ..., op. cit., pp. 126 et s., pp. 426 et s. ; MIKOLENKO J.-F., « P r a v o i formu ego proiavlenia » (Le droit et les formes de son apparition), Sovielskoie gosou-darstvo i pravo ( 1 9 6 5 ) , 7, p p . 5 2 - 5 3 .

3. Selon une approche caractéristiquement américaine « la seule manière intelligente de s'occuper d'un mot de plusieurs acceptions comme le « droit » doit comporter la

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— m é r i t a n t certainement u n e analyse à p a r t — ne constitue en effet qu'une expression particulière d ' u n problème plus profond, se t r o u v a n t en connexité avec le s t a t u t ontologique d u droit, avec ses signes spécifiques essentiels et avec les formes de son apparition.

Fig.[ l]

= droit régulièrement émîs, ne se réalisant pas

= droit se r é a l i s a n t sans ê t r e r é g u l i è r e m e n t émis

= droit régulièrement é m i s et se r é a l i s a n t

Pour q u ' u n système de normes puisse exister comme droit, non seulement comme le produit d'une objectivation particulière révélant un caractère du Sollen mais que, en s'acquittant de sa fonction constituant sa raison reconnaissance du fait que la définition elle-même doit être multiple ». W I L L I A M S G . ,

The Controversy concerning t h e Word « Law », in Philosophy, Politics and Society, éd. b y P. Laslett, 1 9 5 6 , p. 1 5 5 ; cité par S T O N E Julius, « Meaning a n d Role of Definition of Law», Archiv für Rechts- und Sozialphilosophie, 1963, Beiheft, Nr. 39, Neueu Folge Nr. 2, p. 11.

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FORMATION D E S CONCEPTS 2 2 7

d ' ê t r e , il puisse devenir un élément véritable et u n e partie v i v a n t e d u Sein et q u ' i l puisse influer sur les processus du m o u v e m e n t se déroulant dans la sphère de ce dernier, — du point de vue du problème que nous analysons il est nécessaire que le système de normes dont il s'agit obtienne la qualité de validité juridique e t qu'en cette qualité il se fasse aussi valoir dans la r é a l i t é socialel. II semble donc que la création régulière et la mise e n œuvre c o n s t i t u e n t deux conditions sine qua non du devenir droit, de l'existence en t a n t que droit, conditions qui, comme telles, s o n t parallèles, bien que la force coercitive e t déterminante des faits de la réalité sociale soit loin de respecter t o u j o u r s le spécifique de la juridicité se m a n i f e s t a n t d'une f a ç o n formelle. E n même temps cependant les choses sont caractérisées p a r u n m o u v e m e n t continu, par la p e r p é t u i t é des changements p r o d u i s a n t des transitions, des t r a n s f o r m a t i o n s d u devenir a u t r e ainsi que p a r l'entre-l a c e m e n t des processus pour m a i n t e n i r en s u p p r i m a n t ( A u f h e b u n g ) , f o r m a n t sans cesse de n o u v e a u x caractères e t relations, p a r des éléments donc qui se p r é s e n t e n t en m ê m e temps c o m m e éléments d ' u n e dialectique m a t é r i a -l i s t e3. Or, ces éléments apparaissent nécessairement aussi c o m m e des signes du phénomène juridique : certains phénomènes sociaux, a u cours de leur formulation ou en conséquence d e leur application en masse c o m m e droit, m o n t r e n t le processus du devenir d r o i t de ce qui est non-droit, t a n d i s que d ' a u t r e s phénomènes sociaux, a u cours de leur formulation comme non-droit ou e n conséquence d u manque de l e u r application comme droit p r é s e n t e n t le processus du d e v e n i r non-droit. L ' a v a n c e vers la juridicité et l'éloigne-m e n t de la juridicité constituent d o n c des caractères objectifs de certains p h é n o m è n e s sociaux exprimant la tendance du développement, puis, sur u n c e r t a i n niveau d u développement e t après un certain temps, des caractères qui p a s s e n t l'un d a n s l'autre. Cependant dans ces processus sans a r r ê t il semble possible de fixer avec p l u s ou moins d ' e x a c t i t u d e certains points ou, d ' u n e manière o u d'une autre, le non-droit est devenu déjà droit et le droit n o n - d r o i t ; la fixation de ces points est une tâche des définitions d o n t nous a v o n s déjà parlé. Comme il résulte de ce qui précède les différentes définitions p e u v e n t saisir ces p o i n t s en p r é s e n t a n t des critères divergents. E n effet le p o i n t fixé par la définition du concept dogmatique du droit n ' o f f r e socia-l e m e n t aucune base suffisante a u x fins du devenir droit, tandis que socia-le point fixé p a r la définition d u concept sociologique du droit se révèle insuffisant du p o i n t de vue de l'apparition formelle spécifique.

Ce n ' e s t pas seulement de l'intérêt de la théorie qu'il semble nécessaire de f a i r e des concepts indépendants de certains phénomènes qui ne p e u v e n t 1. L a subsistance conjointe de ces critères est reconnue même par la tendance méthodologiquement la plus homogène e t jusqu'au bout conséquemment formelle du normativisme, c'est-à-dire par la théorie pure du droit. Voir K E L S E N H a n s , Reine Rechtslehre, 2. Aufl., Wien, 1960, p. 219.

2. Cf. L E N I N W. J . , « Zur Kritik der hegelschen 'Wissenschaft der Logik' », in W. J.

L E N I N , A U S dem philosophischen Nachlass, Berlin, 1954, pp. 1 4 4 - 1 4 5 .

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être considérés comme droit que dans u n certain sens r é s u l t a n t d'une certaine qualité qu'ils possèdent. Comme nous avons dit, en la matière il s'agit de concepts d o n t l'extension comprend u n cercle d ' o b j e t s en partie différents. Les phénomènes qui sont englobés p a r le concept dogmatique du droit, r é p o n d e n t a u p o s t u l a t de la légalité e t a u x considérations offi-cielles de ceux qui appliquent le droit, p e n d a n t que les phénomènes englobés p a r le concept sociologique du d r o i t répondent à la réalité de cette légalité e t a u x considérations pratiques de ceux auxquels le droit est appliqué.

L a sphère des phénomènes qui n e peuvent être qualifiés droit que dans un certain sens ou e n conséquence d ' u n e certaine qualité qu'ils possèdent, ne p e u t a u c u n e m e n t être considérée comme invariable. Les lignes de délimi-t a délimi-t i o n ne p r é s e n délimi-t e n délimi-t en effedélimi-t p a s de rigididélimi-té mais une image r e m u a n délimi-t e , se c h a n g e a n t sans cesse dans le t e m p s et dans l'espace. Comme n o u s essayons de le faire figurer sur le dessin ci-inclus [2], les phénomènes en question sont caractérisés n o n seulement p a r leur formation perpétuelle mesuiée par r a p p o r t à la juridicité, mais aussi p a r le fait que concernant certains de leurs t r a i t s déterminés ils sont dans u n e connexité fonctionnelle l ' u n a v e c l'autre.

E n e f f e t , dans le mouvement circulatoire de la création et de l'application d u droit, le droit qui prend corps dans la création du droit, à savoir le droit d a n s u n sens dogmatique, d ' u n e p a r t , et le droit qui p r e n d corps dans l'application du droit, à savoir le droit dans u n sens sociologique, d'autre p a r t , en conséquence du fait de la création régulière, de même que du fait de la mise en oeuvre, interprétées comme des qualités spécifiques, prennent place a u x pôles opposés d'une connexité dialectique, comme des participants à u n processus de mouvement juridique p o r t e u r s également d ' u n e fonction acquise spécifique, r e n f e r m a n t en soi aussi l'élément du feed-back.

Finalement, on doit répondre aussi à la question de savoir dans quelle mesure e t de quelle façon nous considérons possible, à la lumière de notre présente conception, de former e t de définir u n concept scientifique général du droit. Le caractère scientifique « général » répond — il n o u s semble — à la saisie et à l'élaboration synthétique de l ' o b j e t de la connaissance. Le droit en t a n t q u ' u n e objectivation a y a n t le caractère du Sollen, comme nous l ' a v o n s dit, ne répond à sa fonction que dans le cas où il se fait valoir dans la réalité sociale après être régulièrement émis. Ce qui signifie d ' a u t r e p a r t que le droit — en a b a n d o n n a n t l ' é t a t transitoire d'être et en même temps ne pas être droit — parvient à u n e existence relativement ferme, complète e t p a r f a i t e , même dans son caractère essentiellement temporaire e t variable, lorsqu'il se présente comme une unité du droit prise à la fois d a n s un sens d o g m a t i q u e e t sociologique. L'exigence de la synthèse méthodologique d e m a n d e du reste également une solution semblable : la synthèse des métho-des dogmatique e t sociologique comme métho-des approches f o n d a m e n t a l e s ne p e u t être réalisée qu'en reconnaissant parallèlement les postulats qui découlent de ces méthodes et en faisant de ces postulats des éléments d'une conception unie. Ainsi, sur le p l a n du concept réfléchissant la généralité essentielle ne p e u t apparaître q u ' u n e norme ou un système de normes qui

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FORMATION D E S CONCEPTS 229

en u n i s s a n t les signes essentiels des formes fondamentales de la manifes-t a manifes-t i o n emanifes-t de la réalisamanifes-tion pormanifes-te en soi à la fois le spécifique formel emanifes-t la r é a l i t é substantielle de la réalisation de la fonction.

4.2. Le concept dogmatique du contenu du droit.

Selon une opinion généralement acceptée dans la littérature juridique, la dogmatique juridique ne prend jamais appui sur les facteurs sociaux inhé-rents à la norme, ni sur les facteurs s ' a t t a c h a n t à la fonction de la réglementa-tion juridique, mais uniquement s u r le texte de la norme1. Selon cette manière de voir le droit de lege lata obtenu comme résultat d'une analyse dogmatique reste identique avec le droit qui est exprimé dans le t e x t e de la norme. Or, à cette théorie de l'interprétation qui p e u t être considérée comme s t a t i q u e , puisque, en se centrant ou se limitant à des directives linguistiques et systématologiques, elle tend à conserver le m a x i m u m de la stabilité du système du droit, on peut opposer la théorie de l'interprétation dite dyna-mique, laquelle, en acceptant des directives téléologiques, vise a v a n t t o u t de contribuer efficacement à la réalisation des b u t s sociaux du système du droit2. La récente littérature méthodologique de l'approche dogmatique

1. V o i r par exemple KRYSTUFEK, Historické Základy ..., op. cit., pp. 131-132.

2. WRÓBLEWSKI Jerzy, Zagadnienia teorii wykładni prawa ludowego (Les lignes f o n d a m e n t a l e s d'une théorie de l'interprétation du droit populaire), Warszawa, 1959, pp. 1 5 1 - 1 9 3 ainsi que du même auteur : « T h e Relativity of Juridical Concepts», Oster-reichische Zeitschrift für öffentliches Recht (1960), 2, p. 278 e t s.

d r o i t c o m m e o b j e t

d e l ' a p p r o c h e d o g m a t i q u e A

p r a t i q u e

de l ' a p p l i c a t i o n du d r o i t

^droit c o m m e o b j e t

de l ' a p p r o c h e s o c i o l o g i q u e p r a t i q u e x

d e l a cre'ation d u droit

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a d a p t e cette dernière manière de voir en soulignant que l'étude d o g m a t i q u e

« i enferme à la fois des généralisations reposant s u r des analogies, des géné-ralisations inductives et des génégéné-ralisations r e p o s a n t sur le principe de la justice également », ce qui cependant renvoie déjà à l'élaboration des aspects de lege ferenda du droit, parce que le p r o d u i t de l'analyse dogmatique se présente ainsi nécessairement comme un « système de correctifs » du d r o i t1. Or, dans ces conditions, p e n d a n t que le r é s u l t a t des recherches de lege lata est exprimé forcément dans la forme des propositions vraies ou fausses, susceptibles d'être aussi logiquement justifiées, les recherches dogmatiques de lege ferenda ne possèdent ce caractère q u ' e n partie, puisque « les expres-sions relativisées p a r les normes peuvent être des propositions seulement si dans l'expression respective la norme en question n'est pas i n t e r p r é t é e et ne renferme pas de termes d'évaluation »2.

E n m ê m e temps cependant le droit de lege lata apparaît p a r f o i s dans le t e x t e juridique d'une façon qui est insuffisante pour la théorie ; en effet l'idée « matérielle » du législateur subit souvent, en devenant une idée < tech-nique », des modifications inévitables dans le processus de la f o r m a t i o n de l'expression formelle du droit. E t a n t donné qu'ainsi une contradiction n'est a u c u n e m e n t exclue, entre les d e u x idées, l'analyse dogmatique doit recons-truire le contenu de la norme n o n seulement sur la base des éléments compris dans le t e x t e , mais aussi sur celle des éléments se t r o u v a n t en dehors du t e x t e ; ainsi cependant la recherche aboutit nécessairement à f o r m e r distinc-t e m e n distinc-t des concepdistinc-ts forme edistinc-t madistinc-tériel l ' u n à côdistinc-té de l ' a u distinc-t r e . Ce faidistinc-t à son t o u r a p o u r r é s u l t a t un dualisme des m é t h o d e s et des concepts même à l'intérieur de l'approche dogmatique, bien que ce soit l'idée « technique », le t e x t e formellement fixé, qui en principe serve de base à l'application du droit ». E n cette connexité est digne d'une a t t e n t i o n particulière le fait que dans ce cadre aucune de ces idées n'est capable de remplacer ou d'enrichir l ' a u t r e , parce que, s'agissant de concepts entièrement séparés, « chacune de ces catégories accomplit son propre devoir e t chacune d'elles, séparée, devrait être l'instrument servant à la connaissance du contenu du droit en vigueur »4.

Quant à cette forme de m a n i f e s t a t i o n du dualisme, nous en voyons la spécificité dans le fait que les d e u x côtés ci-dessus mentionnés de ce dualisme des m é t h o d e s et de la f o r m a t i o n des concepts se présentent dans le cadre d'une seule approche, de l'approche dogmatique dans le sens s t r i c t du terme, puisqu'en principe l'idée matérielle n'est mise au jour au m o y e n des direc-tives téléologiques et la mise au jour elle-même est accomplie n o n pas en vue

1 . P E C Z E N I K , Doctrinal Study of Law ..., op. cit., p p . 1 3 8 e t 1 4 0 . 2 . W R O B L E W S K Y , Normativity..., op. cit., p . 6 5 .

3 . R I T T E R M A N Stefan, « Méthode de la formation des notions dans la systématique du droit positif, notamment du droit civil», Archívum Iuridicum Cracoviensc, I (1968) en particulier illustré par des exemples présentés et analysés, pp. 1 1 3 - 1 1 7 .

4 . R I T T E R M A N , « M é t h o d e . . . » , op. cit., p . 1 1 8 .

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FORMATION D E S CONCEPTS 2 3 1

d ' u n développement successif du droit de lege lata, m a i s dans l'intérêt d ' u n e compréhension plus profonde, plus e x a c t e et plus complète de ce droit.

Une contradiction éventuelle entre les d e u x côtés n e p e u t être aplanie q u ' a u m o y e n d u redressement de « l'erreur » commise lors de l'élaboration techni-que de l'idée matérielle, donc par la t r a n s f o r m a t i o n adéquate de l'idée technique, ce qui cependant ne signifie p a s une synthèse, parce que le r é s u l t a t en est la suppression de la distinction des deux côtés, l'anéantissement des signes divergents de l'idée matérielle du législateur e t de l'idée t e c h n i q u e se m a n i f e s t a n t dans le produit du législateur, en conséquence de quoi les signes r e s t a n t s deviennent identiques. Ces notions n ' o f f r e n t donc a u c u n e possibilité d'une synthèse conceptuelle ; leur destin e s t en effet, de rester, en c o n f o r m i t é de l'acte d u législateur, soit irréconciliables, soit indistinguibles.