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Les portraits de Jean et Mathias Hunyadi dans un château en Blésois

La gloire de la famille Hunyadi a été consacrée par la victoire de la forteresse de Belgrade sur les Turcs en 1456. Jean Hunyadi, gouverneur de Hongrie pendant la minorité du roi Ladislas V et héros de ce siège mourut peu après la défaite turque. En 1458, le fils cadet de Hunyadi, Mathias fut élu roi de Hongrie. Ce compte-rendu se propose de mettre l’accent sur la réputation dont les deux Hunyadi ont joui en France au XVIIe siècle.

Le château de Beauregard situé dans le département du Loire et Cher, à six kilomètres de Blois, possède une galerie de portraits d’hommes illustres exécutée dans la première moitié du XVIIe siècle.1 L’idée de constituer une telle collection revient à Paul Ardier l’aîné, propriétaire du château et du domaine dès 1617. Ayant vécu à la cour de trois monarques français successifs, Paul Ardier occupa le poste de trésorier de l’épargne et fut membre du conseil d’État ainsi que du conseil intime. Il accompagna Henri III en Pologne, lorsque ce dernier fut élu roi de ce pays et de retour en France se vit confier le trésor royal après qu’Henri ait appris la mort de son frère.2

II ne fait aucun doute que Paul Ardier devait être un homme d’une grande culture : le livre des éloges conservé au château et dans lequel ont été retranscrits, à partir d’œuvres historiques des XVIe et XVIIe siècles, les hauts faits des héros représentés dans la galerie en porte d’ailleurs témoignage.

Le séjour en Pologne est, sans aucun doute, à l’origine du profond intérêt de Paul Ardier pour tout ce qui touche à l’Europe centrale et

1 Dino T a lle y r a n d , Notice historique su r le château de Beauregard, Paris, 1841 ; Fernand B o u r n o n , Blois, Chambord et les châteaux du Blésois..., Paris, 1930, p.

130.

2 Edmond B o n n a f fé , Dictionnaire des amateurs français au XVIIF siècle, Paris, 1884, pp. 7 -8 ; Ambroise T ard ieu , Dictionnaire iconographique de l’a ncienn e A uvergne..., Clermont-Ferrand, 1904. p. 1 8 ; Dictionnaire de biographie fr a n ­ çaise, III, Paris, 1939, p. 449.

orientale. Hormis Jean et Mathias Hunyadi, on peut également admirer dans cette galerie le cardinal Martinusius, Nicolas Zrínyi, héros de Szigetvár, Étienne Báthory, prince de Transylvanie et roi de Pologne, enfin Gabriel Bethlen, prince de Transylvanie. La Pologne entretenait des rapports réguliers aussi bien sur le plan politique qu’amical avec la Transylvanie ; par ailleurs elle se trouvait menacée par les Turcs et les Tartares dans sa partie orientale. Ces deux faits expliquent la présence de personnalités hongroises dans les portraits de la galerie.

Cette galerie est divisée en sections correspondant au règne de chaque roi de France.3 Jean et Mathias Hunyadi apparaissent sous le règne de Charles VII (1422-1461).

Le roi Mathias Corvin est peint d’après une gravure de l’œuvre « Centi capitani illustri... », parue à Rome en 1596. On y voit le roi de profil, portant une couronne de fleurs dans les cheveux. Le portrait modèle d’Andrea Mantegna, portrait d’ailleurs disparu, a été copié par Rubens.4 Le texte des éloges du roi est également tiré de ce même livre.

En ce qui concerne le second portrait, Ardier a choisi un modèle iconographique plus intéressant et plus rare. Jean Hunyadi est représenté en robe de brocart et sans moustache. Les deux gravures en bois, illustrations dans la C hron ica H ungarorum de Jean Thuróczi étaient sûrement inconnues de Paul Ardier.5 Son modèle était le portrait datant du XVIe siècle, conservé dans les collections de la famille impériale, à Vienne, et faisant partie d’une série de portraits historiques éparpillée au cours des siècles.6 La différence entre le tableau de Vienne et celui de Beauregard est évidente. A Beauregard il s’agit d’un buste, et le visage est plus rude. A Vienne une plus grande partie du corps est représentée et l’on voit les mains. Autre différence : à Vienne, l’inscription mentionne

3 Henri Bu c h o t, Les portraits a u x crayons des XVF et XVIF siècles conservés à la Bibliothèque Nationale, Paris, 1884, pp. 350-361.

4 Jolán Ba l o g h, Mátyás király arcképei (Les portraits du roi Mathias), in Mátyás király-Emlékkönyv (Recueil de mélanges du roi Mathias), Budapest, 1940, I, pp.

514, 516.

5 Ilona Hu b a y, Die illustrierte Ungarnchronik des Johannes Thurócz, in Gutenberg- Jahrbuch, Mainz, 1962. pp. 390-399. Hunyadi est représenté dans les deux chroniques en cuirasse, dans l’édition de Bmo à cheveux flottants et avec un grand moustache.

’ Heinz Gü n t h e r, Das Portràtbuch des Hieronymus Beck von Leopoldsdorf in

■ Jahrbuch der kunsthistorischen Sammlungen in Wien -, 71(1975), Sonderheft Nr.

244, pp. 232-233, 250, 262.

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le père de Mathias, à Beauregard elle fait référence au gouverneur de Hongrie, preuve que Paul Ardier le considérait comme un homme d’État.

La peinture de Vienne fut copiée dans le Portràtbuch de Hieronymus Beck et est conservée de nos jours au Kunsthistorisches Museum. Comme le chemin de retour de Henri III passait par Vienne,7 il est vraisemblable qu’Ardier ait conservé certaines esquisses de la peinture ou que quelque personnage de la suite du roi ait emporté avec lui une ébauche du tableau, ébauche ensuite prêtée à Paul Ardier.

Nous pouvons noter, en conclusion, que Paul Ardier a très tôt reconnu l’importance de la politique des pays de l’Europe centrale et orientale et cette importance se manifeste dans la galerie relatant les événements et présentant les personnages importants de cette période mouvementée.

7 Nouvelle bibliographie générale.,., XXIV, Paris, 1858, p.

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(S z eg e d )

Les Hunyadi, vus par les historiens français