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Ségrégations scolaires involontaires et volontaires - ceux qui sont pour et ceux qui sont contre la ségrégation

CONSTRUCTION SOCIALE, ADMINISTRATIVE, SAVANTE ET SCOLAIRE DE LA POPULATION ROM-TSIGANE

I. Au-delà de l'approche objectiviste

4. Ségrégations scolaires involontaires et volontaires - ceux qui sont pour et ceux qui sont contre la ségrégation

Passons enfin au dernier volet de cette conférence où il sera question de la scolarisation des enfants issus des populations classées Roms ou Tsiganes.

Signalons en premier lieu qu'une grande majorité de ces enfants vivent dans de très mauvaises conditions. Dans la plupart des cas leurs parents sont pauvres et occupent une maison ou un logement de faible qualité et souvent ségrégué. Dans

' „Ne cigányozz! N e zsidózz! N e magyarkodj! N e uszíts!" - mondjuk, s cinkos hallgatással védjük a bűnözőket " http://telekihaz erdely.org/uploaded/documents/marcl5 rtf

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bien des cas les familles sont touchées par le chômage de longue durée, ainsi les enfants sont souvent peu motivés pour les études.

Si durant les dernières décennies le niveau de scolarisation a augmenté au sein de la population en question par rapport à un niveau qui était encore particulièrement faible durant les années 1970, en raison d'une forte expansion scolaire observable au sein de l'ensemble de la société hongroise, l'écart entre le niveau de scolarisation moyen des enfants tsiganes et le niveau des « non-tsiganes » reste toujours important.. Ainsi très peu de jeunes Roms sont titulaires d'un diplôme professionnel ou d'un baccalauréat, et les étudiants de cette origine sont toujours rares, même si leur nombre va de croissant.

Les causes du faible niveau de scolarisation sont multiples et se manifestent dès la petite enfance. Si le nombre des enfants âgés entre 3 et 6 ans a considérablement baissé en Hongrie durant les dernières décennies, tous les petits enfants n'ont pas la possibilité de fréquenter l'école maternelle, cette institution qui est fort importante du point de vue du développement des différentes compétences culturelles ou sociales. En effet, maintes petites localités ne sont pas en mesure d'accueillir dans leurs écoles maternelles les enfants qui auraient particulièrement besoin de bénéficier de ce type de service, et ceci en raison du fait que les subventions budgétaires allouées pour la scolarisation en maternelle ne couvrent que les 40 ou 50 % les coûts de fonctionnement. Faute de subsides, dans maintes communes les enfants dont la mère ne travaille pas ne sont pas admis dans les écoles maternelles. Cela est d'autant plus néfaste que fort souvent il s'agit d'enfants Roms qui devraient bénéficier d'une aide spéciale puisqu'ils vivent en générale dans une très grande pauvreté et aussi parce qu'un pourcentage non négligeable d'eux sont allophones : comme je l'ai déjà signalé, la langue maternelle d'environ 20 % des Tziganes de Hongrie est soit le lovari, soit le beás.

Notons à ce sujet que même de nos jours la plupart des écoles ne peuvent pas tenir compte de ces spécificités linguistiques, et ceci notamment pour des raisons historiques. Pendant fort longtemps les tsiganes n'étaient nullement reconnus en tant qu'une « vraie» minorité. Sous le régime communiste prévalaient en effet des conceptions assimilatrices qui avaient favorisé dans une mesure l'amélioration des conditions de vie quotidienne des Tsiganes mais entravaient en même temps la valorisation des identités tsiganes.

Avec l'avènement du régime politique multipartite maintes organisations indépendantes censées représenter la minorité tsiganes ou Roms ont pu être fondées.

Dans le domaine de l'éducation le nouvelle donne politique a notamment favorisé l'introduction dans les programmes locaux des écoles fondamentales des cours visant à transmettre aux élèves certains éléments de la culture « tsigane », et ceci sous divers appellations : « folklore tsigane », « connaissances relatives au peuple tsigane », etc.

Toutefois, ces cours censés initier les enfants à la culture de leur groupe d'origine pouvaient avoir des effets paradoxaux. En effet, certains chercheurs

insistent sur le fait que ces cours ont pu contribuer au renforcement de la ségrégation scolaire puisqu'ils favorisaient le regroupement des enfants d'origine tsigane dans les mêmes classes.

A cause de cette pratique, mais aussi pour maintes autres raisons durant les dernières décennies on a pu constater en Hongrie le renforcement des phénomènes de ségrégation. Une enquête effectuée par Ilona Liskó, István Kemény, Gábor Havas au début des années 20001 a démontré que depuis le changement de régime dans le cas des écoles fondamentales de Hongrie la proportion des enfants issus de la minorité rom ou tsigane enseignés dans des classes ou des écoles ségréguées a considérablement augmenté. (Parmi les multiples facteurs qui peuvent être à l'origine de la ségrégation mentionnons notamment le fait que depuis 1985 les parents ne sont pas tenu inscrire leur enfant dans l'école correspondante à leur lieu de résidence. Dans bien des cas la ségrégation scolaire résulte surtout de la ségrégation résidentielle de la population tsigane. Cependant le manque d'attention autorités municipales ayant la charge de gérer les écoles fondamentales, voire les attitudes favorables des élites locales au maintien de la ségrégation peuvent aussi contribuer à une éducation séparée des enfants, etc. Par ailleurs la ségrégation peut aussi résulter du fait que récemment on a introduit des subventions forfaitaires allouées aux écoles accueillantes en grand nombre des enfants défavorisés. En raison de cette incitation financière certaines écoles non attractives aux yeux des élites locales ont tenté de se reconvertir dans l'accueil d'enfants en difficulté scolaire.

Dans ces établissements la plupart des classes peuvent fonctionner avec des effectifs réduits puisqu'elles accueillent uniquement des élèves chez qui les spécialistes /p.

ex. les collaborateurs du service d'orientation pédagogique ou éducative de l'arrondissement/ avaient détecté divers problèmes /dyslexie, dysgraphie, problèmes de comportement, etc./ et qui valent double compte tenu des problèmes diagnostiqués chez eux.. Sur la base d'une recherche menée il y a déjà plusieurs décennies^ on peut aussi savoir que maints enfants issus des minorités défavorisées du pays n'ont pas la chance d'accéder aux écoles fondamentales ordinaires puisque des dispositifs d'orientation mal conçus les orientent vers les classes ou des écoles de l'éducation spécialisée.

Comme il ressort de l'ouvrage des trois auteurs ci-dessus cités, la ségrégation scolaire est souvent visible à l'œil nu :

« - les bâtiments destinés aux enfants tsiganes sont en plus mauvais état que les autres immeubles scolaires;

- dans ces bâtiments on ne trouve ni des classes spécialement équipées pour l'enseignement de telle ou telle matière ni des salles à fonctions sociales;

- les équipements scolaires sont désuets, (p. ex. il n'y a pas d'ordinateurs);

- le mobilier est également vétusté et moins bien entretenu,

Havas. Gábor - Kemény. István - Liskó, Ilona Cigány gyerekek az általános iskolában (Enfants tsiganes à l'école fondamentale). Oktatáskutató Intézet, Ú j Mandátum Könyvkiadó, Budapest, 2002.

2 Csanádi, Gábor - Ladányi, János : Szelekció az általános iskolában /Sélection à l'école fondamentale/, Budapest, Magvető. 1983

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- les classes sont plus mornes, il y a moins de matériaux pédagogiques ou de décorations. »'

Outre les phénomènes de ségrégation ci-dessus esquissés, la trajectoire scolaire des enfants tsiganes peut aussi être définitivement brisée en raison du fait que leur établissement obtient une modification de leur statut d'élève. En effet, les écoles voulant se séparer d'un élève à problèmes peuvent obtenir que celui-ci devienne un « élève privé », c'est-à-dire un enfant non obligé à fréquenter quotidiennement l'école. Si ce statut a été originalement conçu en fonction des préoccupations des élites sociales, et aussi pour répondre aux cas où une maladie grave ou une situation spéciale peut empêcher la scolarisation « normale » de l'enfants, dans la Hongrie contemporaine le statut d'élève privé permet de priver l'enfant «perturbateur» d'une vraie scolarisation, et ceci sans qu'un projet pédagogique personnel efficace garantisse la réussite scolaire de celui-ci.

Après un changement de gouvernement survenu en 2002. sous l'égide d'un ministre de l'éducation d'obédience libérale toute une série de mesures visant à faire reculer la ségrégation scolaire ont été lancées. Cette politique a notamment été justifiée par les mauvais résultats obtenus par la Hongrie lors de la première enquête

PISA. Celle-ci a en effet démontré qu'en Hongrie les origines sociales et géographiques des élèves conditionnaient très fortement leurs performances testées à l'âge de quinze ans. La mise en œuvre de toute une panoplie de mesures sensées faire reculer la ségrégation scolaire a été favorisé par le fait qu'avec l'adhésion à l'Union Européenne une partie des fonds structurels mis à la disposition de la Hongrie a pu être consacré à ces fins. Ainsi les pouvoirs locaux qui sont propriétaires des écoles publiques ont pu obtenir d'importantes subventions au cas où elles s'engageaient à élaborer et à mettre en œuvre un projet municipal visant à supprimer la ségrégation observable au niveau des écoles fondamentales placées sous leur autorité. Outre cela on a entrepris la révision des procédures d'orientation qui peuvent faire augmenter artificiellement au sein des institutions de l'éducation spécialisée la proportion des enfants défavorisés. Parallèlement à cela on aussi pris des mesure afin de replacer dans des écoles ou classes ordinaires les enfants mal orientés.

Citons enfin le cas des établissements alternatifs nommés tanoda, ces institutions désignées par l'anicienne appellation hongroise des écoles qui a acquis avec le temps une consonance ludique. En effet il s'agit d'institutions de petite taille censées accueillir des jeunes en échec scolaire ou complètement déscolarisés. Au milieu de la première décennie du nouveau millénaire le nombre de ces institutions gravitantes autour du système scolaire a pu se multiplier grâce au fonds structurels européens, mais peu de temps après leur « éclosion » beaucoup d'entre elles avaient du fermer leur porte en raison de problème financiers.

Si les mesures citées constituaient un vrai tournant dans le domaine de la politique éducative, elles n'ont pas pu mettre tin processus de ségrégation. En effet.

'Op. eu p 111-112

les réformes les mieux intentionnées peuvent échouer en Hongrie au niveau des communes, notamment en raison du fait que dans bien des cas les élites locales ne veulent pas mettre fin à la ségrégation. Notons à ce sujet qu'en Hongrie les pouvoirs locaux ayant à leur charge les écoles publiques jouissent d'une large marge de manœuvre, ce qui leur permet de ne pas suivre les orientations ministérielles

Un conflit éclaté il y a quelques années à Jászladány, dans cette localité situé au cœur de la pleine hongroise peut parfaitement illustrer à quel point les pouvoirs locaux peuvent agir à l'encontre des priorités exprimées au niveau national.

En effet, les représentants de l'organe d'autogouvernement de la minorité tsigane de la commune avaient essayé de s'opposer à la mise en œuvre d'un projet qui bénéficiait du plein soutien moral et matériel des élus locaux et qui visait à créer au sien même de l'unique bâtiment scolaire de la commune une école privée payante.

D'après les représentants des Tsiganes ce projet avait comme objectif d'assurer une scolarisation séparée aux enfants issus des milieux non-tsiganes. Si à l'époque le ministère de l'éducation a donné raison aux représentants de la minorité tsigane de Jászladány, elle n'a pas pu empêcher la mise en œuvre du projet, et il a même perdu un projet intenté contre les autorités locales.

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Marie VAN EFFENTERRE

École des Hautes Études en Sciences Sociales

C O M M E N T NOMMER ? LE RAPPORT À LA « LANGUE D'ORIGINE »