• Nem Talált Eredményt

Plik et Plok

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2022

Ossza meg "Plik et Plok"

Copied!
40
0
0

Teljes szövegt

(1)

PRÉFACE.

15 janvier 1831.

A 1a Faveur de la con- centration profonde qui captive tons les intérêts dans un o r d r e d'idées liantes et «raves, l'auteur de ces récits e s p è r e se

!

¡lisser inaperçu parmi e monde littéraire. I'nis, ayant pris date et place, c o m m e tant d ' h o n n ê t e s gens que l'on a trouvés, après nos longues t o u r - mentes s o c i a l e s , assis très-haut dans l'opinion d ' u n bon n o m b r e , il a s - pire à pouvoir se c a r r e r , c o m m e e u x , dans une décente réputation néga- tive . due au silence de la critique et à l'oppor- tunité des g r a n d s événe- ments, si favorables aux petits esprits.

Or, la c a r r i è r e des vé- térans dont nous parlons a été pleine, entière, ho- norée, grâce à leur a n - c i e n n e t e , qui d a n s les

lettres prouve le mérite, L«, g ,l a n a

à peu près c o m m e un chevron prouve la v a -

leur. L'avenir calme, 1?. d o u c e et paresseuse quiétude de ces gras cita- le genre nu il a trouvé? Ce la littérature, ont tellement affriandé l'auteur de ce livre, | besoins, de la puissance de noines de

Fui·. — loip. simun ll^on rtC-, ruo d't.lnnk, l.

qu'il se liiile de s'inscrire comme profit dans leur o r d r e , estimant que les mêmes circonstances amèneront sans doute un jour les m ê m e s résul- t a t s .

Un certificat de vie lit- téraire est donc toute l'ambition de l'auteur.

Cela dit, passons.

Avant Cooper, il y au- rait peut-être eu de l'au- dace à tenter d'intéres- ser le public français à des habitudes, à des ca- ractères qui n'éveillent en lui aucune sympathie.

Inexpert des m œ u r s ma- ritimes, il lui est v r a i - ment impossible d a p - précier la vérité des t a - bleaux qu'on déroulerait à ses yeux.

Par la topographie de leur pays, et grâce à leur politique, les Américains étaient appelés, mieux

a

u'aucuu peuple du mon- e . à c o m p r e u d r e l a liante portée du génie de Coo- p e r . N'y a-t-il pas dans ses créations plus a u ' u n e œ u v r e d'artiste? N'cxis- tc-t il pas une profonde pensée patriotique d a n s genre est une expression des vœux, des sa nation i c'est l'histoire des Etats-Unis

59

D e s s i n s p a r J . A . D c t r c t . G r a v u r e s p a r A . L A V I E I L H .

(2)

P L I K E T P L O K . 10

dramatisée. Aussi, voyez si de la Nouvelle-Orléans à Boston il est uu c œ u r qui ue Batte pas, uu front qui ne se colore, quand on y lit ces belles pages où se peignent les luttes de celle sauvage et rigoureuse Amérique, d o u l la religion fut de rester libre e t seule maîtresse sous son beau ciel, au milieu de ses riches forêts, s u r sou sol vierge, et de refouler dans son ile brumeuse celte aristocratique Angleterre, chargée de taxes, accablée par ses vieux systèmes d e colouisalion.

Insouciants que nous summes de la mer, nos gloires navales sont presque ignorées à Paris. De son c o u p d'œil impérial, Bonaparte avait vu qu'il lui était impossible de lutter directement avec l'Angleterre. Il lui fallait r é u n i r à chaque m o m e n t ses forces pour écraser de tout son poids ses ennemis sur le continent. Si la marine eut une place s e c o n - daire dans ses combinaisons, c'est que doux fois ses amiraux lui p e r - dirent les vaisseaux de la F r a n c e , et que, pour uous servir d ' u n e de ses expressions, une Botte ue s'improvise pas c o m m e une a r m é e . Aussi, malgré quelques admirables combats partiels soutenus par nos marins, la renommée n'a eu de voix que pour célébrer 1a gloire de nos armées de t e r r e .

Et ceci fut une grave injustice comme a r t et connue politique.

Comme politique, (tarée que la plupart des hommes croient à c e qu'ils lisent, parce que les récils de nos victoires sur mer, colorés eu litté- r a t u r e , poétises, exagérés peut-être, eussent fini par uous d o n n e r à nous-mêmes une idée de n o t r e importance en marine. Ce sentiment eût à la longue tiliré parmi les masses en France, dans l'étranger: cette foi nationale eût produit de grands résultais sans d o u t e : car l'on se t r o m - perait, je crois, en pensant q u e les histoires, les romans, les mémoires faits sur les conquêtes de Bonaparte n'ont pas augmenté nos forces morales au dedans, notre puissance au dehors.

Et puis, si vous saviez c o m m e les m œ u r s mariâmes sont neuves et piquantes! c o m m e c ' e s t chose singulière, curieuse e t digne d'étude, que l'intérieur d ' u n navire! N'est-ce pas un résumé de toutes les c o n - naissances, d e tous les a r t s , de toutes les industries humaines? N'est-ce pas une o'tivre qui prouve à quelle hauteur peut s'élever notre intelli- gence?

Un champ digue d'étude surtout, ce sont c l ces habitudes, ees a l f e c - tions, ces haines llorissaul sur de frêles planches ; et tous ees caractères âpreincul mis en relief par l'isolement, par la concentration ; c relie phvsionomie morale d'un peuple, accusée fa plus vigoureusement que partout ailleurs, p a r c e que, d a n s celte vie incessamment périlleuse, l ' h o m m e , moins usé par les coutumes d'une civilisation décrépite, r e - produit plus vivement le type imprime à chaque race par 1a nature.

Et les m a t e l o t s ! . . . Quelle nation pour celui «gui comprend, qui sait creuser ces âmes profondes 1 C'est un peuple puissant c l faillie : lauloi furieux c o m m e un soldat par un jour de pillage, tantôt timide et naïf comme un enfant, quand son navire est mollement bercé dans le calme ; en mer. complet et éprouvé, supportant les privations a v e c un dédain, avec une fermeté sloïqiics; a l e r r e . s e plongeant dans tons les excès, s'adonnnnl à tous les plaisirs a v e c une ardeur qui ne peut se comparer qu'à la vigueur d'organisation déployée en d e délirantes orgies, à b o r d , couchant sur le pont, mangeant dans le f - r ; à terre, poussant les r e - c h e r c h e s de l'ameublement et du luxe de la table à un degré ino ï, dis- sipant en huit j o u r s le fruit de deux a n s d'épargnes involontaires.

Et au fait, le matelot, ce pauvre homme, ne doit-il pas oublier dans un joyeux festin, qui linit avec son o r , et ses longs quarts de nuit p e n - dant lesquels il frissonnait sous le g i v r e : cl ces heures de tempête, q u a n d , balancé sur une vergue, il voyait r u souriant le goulTre qui m e - naçait de l'engloutir ; et ees j o u r s nécessiteux où, prisonnier d a n s un faux-pont étroit et malsain, il a m a n q u é d'air, d ' e a u , de pain, d'espoir cl de lumière?...

Pauvre homme, demain il n'aura plus d ' o r ! demain, plus de vin fu- mant et généreux, plus de lit moelleux, de b o n n e fille rieuse et folle ; demain, plus de gais spectacles qui épanouissaient su franche et joviale ligure, toujours bourgeouuéc, e m p o u r p r é e , r a y o n n a n t e ! . . .

Plus de tout cela!

Demain, pauvre matelot, tu embrasseras ta vieille m è r e en lui r e m e t - tant scrupuleusement u n e part sacrée de les épargne»; car une belle m a r c h a n d e aux yeux brillants, aux cheveux noirs, aura beau le vanter encore, la qualité supérieure de son grog, le parfum do son tabac et ses mets appétissants...

— Que j'avale dix brasses de càhle si j e louche à cette somme ,

« c'est la part de fa m è r e ! . . . » diras-tu en fermant vile la longue bourse de cuir.

Maintenaut lu vas l'embarquer de nouveau ! maintenant une vaillante frégate, une discipline s é v è r e ! . . . — Largue les voiles! serre les voiles!

En haut, eu bas ! Du biscuit d u r , de l'eau corrompue, et des coups si tu bouges!...

Eh bien ! il regagne son bord en c h a n t a n t , sans un r e g r e t . saus uu soupir. Pendant les huit j o u r s si brillamment colorés par des plaisirs sans n o m b r e , il s'est lait des souvenirs pour les deux aiitiees qui vont s'écou- l e r . Pendant de longues nuits sans sommeil, il se rappellera ses jouis- sances une à u n e ; il s'isolera du présent en se plongeant d a n s ses p e n - sées ; il retrouvera au fond de sou â m e je ne sais quel parfum de v i n , quels sourires de femme, quels vagues reflets du temps passé qui le d é - dommageront de ses affligeantes réalités.

Tel est ce p e u p l e , essentiellement b o n , mais joignant la fierté d'un

— — t Ecossais à la naïve bonhomie d ' u n Breton ; c o u r b a n t patiemment le dos

sous uu coup de p o i n g , mais poiguardant p o u r lin s o u f f l e t : — passant de l ' e x t r ê m e j»ie à l'extrême chagrin sans rien p e r d r e de la vivacité d e ces deux sentiments. A b o r d , d ' u n e gaieté d o u c e et m é l a n c o l i q u e , d ' u u e imagination a r d e n t e sans cesse e n t r e t e n u e par u n e vie sédentaire et p a r des récits dont la grossière poésie n e m a n q u e ni d'élraiigeté ui d e gran- d i o s e ; être c o m p l e x e , multiple e n f i n ! vivant d'anomalies et d ' o p p o s i - tions mais par-dessus tout, imprégnant sa vie entière d ' u n e insoiieianlc et railleuse intrépidité, qui lui reste toujours malgré tant de d a n g e r s c o u r u s , a p r è s faut d ' a n n é e s d ' u n e exisleuce qui n'est elle-même q u ' u n long péril.

Nous l'avons d i t , Coopor, d a n s s e s admirables r o m a n s , a peint cet h o m m e d ' u u e manière aussi large que pittoresque. Il a vivement excité fa curiosité, l'intérêt pour des m œ u r s d o n t h * détails contrastent r u d e - ment avec ceux de n o t r e vie citadine. Mais malheur·iisemenl l'énergie , la finesse de l'original, s'effacent presque t o u j o u r s d a n s la traduction.

En français, ce style est dépouillé do sa nerveuse c o n c i s i o n . Nou- admi- rons bien encore les g r a n d s traits qui distinguent ce u l e n t v r a i m e n t n e u f ; mais les n u a n r e t , les couleurs l o c a l e s , la précieuse naïveté des idiomes. échappent à ceux qui ne peuvent pas lire en anglais c e s pages merveilleuses.

Cependant nous pensons que , si quelques-uns de nos talents du p r e - mier o r d r e , que si Yirtor Hugo , de Vigny, J . Janin , Mérimée , Nodier, Balzac, P . - L . Jacob, hrlnloiichc, e t c . , e t c . , voulaient éclianger une a n - née de leur vie studieuse contre une année d ' e x i s t e n c e m a r i t i m e , et tentaient alors d'appliquer leur puissance, leur richesse d ' e x é c u t i o n à la peinture de la m e r , nous aurions certes encore une gloire littéraire d • plus. Et pourquoi Lamartine n'es-ayerait-il pas de m e n e r sa m u s c là où lord Byron a j e t é la sienne d a n s le deuxième c h a n t de don Juan et d a n s son Corsaire? Ui crainte de l'imitation ne serait p a s rationnelle : Cou- per a peint des Américains ; vous pourriez d é c r i r e les m œ u r s des F r a n - ç a i s , d'autres s i t e s , d ' a u t r e s l i e u x , d ' a u t r e s c o s t u m e s , d ' a u t r e s c o m - b a t s . . .

Tout talent dont la base gii dans une observation e x a c t e de la n a t u i o ne serait-il d o n c plus t o u j o u r s mi gmeris, lils de l u i - m ê m e , sans égal, influent?... Ne dit-on pas Corneille et Shafrspcare, GdBllie c l C h a t e a u - briand?

Mais j e me trompe. Nous avons déjà n o t r e Cooper : u u poêle qui vous émeut c l vous attache p a r la vérité de ses descriptions, p a r l ' é n e r g i e d e sa composition. En prescnce de s e s œ u v r e s . v o t r e c œ u r s e s e r r e ! . . . . · Voyez-vous ces lames é n o r m e s qui déferlent cl se hri.-eut sur ce n a - vire d é m â t é ? . . . ce ciel sombre cl b r u m e u x , ces ligures de femmes éplo- lées, palpitantes, et qui contrastent d ' u n e manière si sublime a v e c l ' a t - titude c a l m e , froide d'un marin c o m m a n d a n t toujours à la t e m p ê t e , même au m o m e n t où il p é r i l .

Ailleurs, au c o n t r a i r e , votre â m e se dilate et s ' é p a n o u i t . Tenez l'atmosphère e s t p u r e ; pas un n u a g e pour voiler ce brûlant soleil qui disparaît à l'horizon au milieu d ' u n e vapeur r o u g e â t r e ! El p u i s , quel calme ! quelle j o i e d o u c e anime c e s p ê c h e u r s r e n t r a n t leurs filets et leurs barques sur celle plage étineelautc aux derniers feux du soleil.'

Erileodez-vous les c r i s des e n f a n t s . . . le c h a n t des matelots? Voyez- v o u s la belle tête de l ' a ï e u l , ce vieux marin qui se f.iit p o r t e r à la p o r t e de sa chaumière pour j o u i r e n c o r e de l'imposant spectacle doul il est toujours é m u , m ê m e a p r è s d e s a n n é e s ?

Le p o è t e , vous le c o n n a i s s e z . j ' e n suis s û r . N'avez-voos pas a d m i r é le Kent, le Colombus, le Coucher du soleil .ur le bord de la mer'.',.. Ce p o ê l e d o n c , n o t r e C o o p e r , n ' e s t - c e pas Gudin? Sur ses toiles, n ' e s t - c e pas le même c o l o r i s , la m ê m e naïveté, la m ê m e h a u t e u r de c o n c e p t i o n que dans les pages du Pilote, du Corsaire rouge?

Ah ! si quelqu'un des écrivains que nous avons n o m m é s entendait noire impuissante voix, nous a u r i o n s une double gloire eu ce g e n r e : possédant déjà In poésie peinte, nous jouirions e n c o r e de quelques déli- cieuses poésies écrites.

Quant à l'auteur de ce livre, son r ô l e est à peu près celui d ' u n nain du moyen âge, dont je veux v o u s r a c o n t e r l'histoire :

Un jour, quelques bandes de routiers et d ' a r c h e r s gallois avaient c e r n é l'abbaye tle Saiul-Culberib, e n Bretagne. L e u r chef, Tortcsinains, c h e - vauchait insolemment eu vue des r e m p a r t s , hors p o u r t a n t de la portée des traits lancés par les h o m m e s d'armes de l'abhe.

Ce que voyant les moines du haut des murailles, ils invoquaient p i - teusement l'intercession de saint C u t b r r t h , lorsqu'ils a p e i ç u r e n t , n o n sans é t o n u e i n c n t , le nain du prieur qui p o r t a i t , «u plutôt traînait a p r è s lui une arbalète prodigieusement lourde et massive.

— Dieu me baille merci! cria ic prieur, le gars a osé p o r t e r la main sur l'arbalète inféodée à monseigneur saint Cutborih, d a n s 1a nef de n o t r e é g l i s e l . . . sur l'arbalète, grand Dieu! que ce grand saint fil t o m - ber des mains d'un géant qui en usait p o u r atteindre les m a r c h a n d s lombards et les pèlerius qui passaient sur les t e r r e s d e l ' a b b a y e . — Mais, dit le n a i n . oubliez-vous, s i r e , que celte a r m e trauspcrec le plus solide haubert de Grenade à mille p a s de disLince?

Et ce disant, il avait appuyé e n t r e les créneaux l'arc puissant qui avait a r m é le g é a n t , mais le p a u v r e nain ne put seulement pas faire mouvoir le rude cranequin de l ' a r m e . . .

Et le chef des r o u t i e r s , le damné T o r l e a m a i n s , injuriait t o u j o u r s par ses gestes le prieur, l'abbaye et les moines.

(3)

P L I K E T P L O K . 3

Tandis que l ' a b b é gourmand;«» le nain de ee qu'il osait p o r t e r des m a i n s débiles s u r une a r m e si p e s a n t e , un chevalier, vassal du p r i e u r é , d ' u u b r a s merveilleusement ferme, saisit l'arbalète que le nain avait dis—

Ç

o s é c s u r le c r é n e a u : la c o r d e de fer s e t e n d » , la flèche siffla, atteignit o r l e s m a i n s a u défaut d e son h e a u m e .

Le s o i r , les a r c h e r s gallois, effrayés d e sa m o r t , a v a i e n t laissé libres t o u t e s les issues de l ' a b b a y e d e Saint-Culbcrlh.

El en v o y a n t les d e r n i è r e s l a n c e s des routiers briller a u soleil c o u - c h a n t , p u i s bientôt d i s p a r a î t r e à l ' h o r i z o n , le p a u v r e nain s'applaudit de sa folle e t impuissante t e n t a t i v e , c a r un plus f o r t q u e lui avait vaillam- m e n t e t h e u r e u s e m e n t réalisé son idée.

(Extrait d e D K F O R G E - L E - R O I T I E R ,

Uni. du temps de Louis XI.)

E L G I T A N O .

Cara de anget g согагоп de demonio.

Figure d'ange et cœur de démon.

L O P E Z D E V E C A .

CHA1TTIIE PREMIER,

L E BARBI E B D E S A K T A - K A R I A ,

Un barbere di cualidad.

- Par l'œil d e saint P r o c o , je vous jure, m o n c o m p è r e , que le Gitano va d é b a r q u e r à Matagorda. Ma d i g n e tante Isabella, en r e v e n a n t d e l'ile d e l . é o n , a vu t o u s les gardes-côtes s u r pied, et m'a dit q u ' o n avait posté d e u x vedettes d a n s le p h a r e p o u r surveiller les évolutions du n a v i r e d e c e d a m n é . q u e l'on aperçoit a u l a r g e . — Par la c h â s s e d e saint l a g o , c o m p è r e , le p ê c h e u r l'ahlo a r r i v e de Conil, et il vient d e me r é p é t e r en- c o r e q u e la t a r t a n e a u x voiles r o u g e s e s t mouillée à u n e deini-porléc de c a n o n de la c ô t e , e t q u e tous les habits de cuir (1) s o n t en a l e r t e . . . — On a a b u s é d e v o t r e c r é d u l i t é , seigneur don J o s e . — On s'est j o u é de v o u s , m o n s i e u r du R a s o i r , r é p o n d i t José en sortant d ' u n air narquois.

Cette qualification de m o n s i e u r du llasoir f » tressaillir violemment Florès ; c a r , s'il rajeunissait le p u b l i c , c'était pour ne p a s démentir a b - s o l u m e n t la s i g n i f i c a t i o n , h é l a s ! t r o p p o s i t i v e , du plat d ' é t a i n luisant qui s e balançait d a n s un c o i n o b s c u r de la p o r t e ; mais a u s s i , au grand j o u r , a p p a r a i s s a i t un i m m e n s e tableau r e p r é s e n t a n t u n e m a i n a r m é e d ' u n e lancette, e t o u v r a n t avec délicatesse les v e i n e s d ' u n b r a s colossal Ainsi l ' o b s e r v a t e u r c o m p r e n a i t facilement q u e le b a r b i e r mettait son a i n o u r - p r o p r c e t sa gloire à e x e r c e r certaines p r a t i q u e s c h i r u r g i c a l e s , e t q u e c ' e s t p r e s q u e m a l g r é lui qu'il descendait j u s q u ' à l'iguoblu r a s o i r , d o n t les profits paraissaient p o u r t a n t assez h o n n ê t e s .

Maitre Florès jouissait d'ailleurs d ' u n e c o n s i d é r a t i o n m é r i t é e ; sa bou- t i q u e , c o m m e le s o n t g é n é r a l e m e n t en Espagne les boutiques de b a r - b i e r s , était le r e n d e z - v o u s de tous les nouvellistes, et particulièrement d e s m a r i n s r e t r a i t é s q u i h a b i t a i e n t Santa-Maria : e t si les n o t i c e s q u e l'on puisait à c e l t e s o u r c e n ' é t a i e n t pas r e v ê t u e s d ' u n c a r a c t è r e bien a u t h e n t i q u e , on ne pouvait n i e r qu'elles n e fussent au m o i n s fabriquées e n c o n s c i e n c e : détails, m o t s historiques, p o r t r a i t s , c i r c o n s t a n c e s , rien n ' y m a n q u a i t . D é v o t , d ' u n esprit souple et conciliant, le b a r b i e r exhalait la béatitude p a r t o u s les p o r e s ; il était t o u j o u r s soigneusement habillé de noir ; s e s c h e v e u x gris et lisses s'arrondissaient d e r r i è r e s e s oreilles, et deux larges places r o u g e s , remplaçant les s o u r c i l s , se dessinaient a u - d e s s u s d e deux petits yeux fauves d'une mobilité e x t r a o r d i n a i r e : mais c e qui, s u r t o u t , m é r i t a i t l ' a t t e n t i o n , c'était sa main, d o n t la teinte blan- c h e et f r a î c h e , les ongles roses eusseut fait h o n n e u r à u n clianoiiie de Tolède.

On l'a dit, F l o r è s tressaillit violemment à l'impertinente a p o s t r o p h e d e J o s é , e t c e m o m e n t subit et colérique fit m a l h e u r e u s e m e n t dévier c e t t e main t o u j o u r s si ferme et si assurée : o r , l'acier entama légèrement le cou d ' u n e d e s e s p r a t i q u e s , qui se c a r r a i t avec complaisance dans le gi and fauteuil de n o y e r noir et poli où venaient successivement s'asseoir t o u s les m a r i n s de l'ile de Léon et de Santa-Maria.

— Que le d i a b l e vous b e r c e , m o n m a i t r e I dit le p a t i e n t en b o n d i s - s a n t sur son s i è g e ; . l a p l a c e d e b o u r r e a u est v a c a n t e à C o r d o u e . i'ar le Christ 1 vous pouvez l ' o b t e n i r , c a r vous avez d ' e x c e l l e n t e s dispositions p o u r o u v r i r le g o s i e r d e s c h r é t i e n s .

(1) Les douaniers.

Et il essuya a v e c le bout d e son é c h a r p e le s a n g qui coulait d e sa bles- s u r e .

— Calmez-vous, r é p o n d i t Florès avec i m p o r t a n c e , c o n s o l é , ru\ i m ê m e d e sa maladresse, p a r l'idée seule qu'il p o u r r a i t mettre e n pratique s e s glorieuses c o n n a i s s a n c e s c h i r u r g i c a l e s ; calmez-vous, m o u c h e r lils, I é -

1

«¡derme seul a été a t t a q u é : il n'y a eu n u e les vaisseaux capillaires d e ésés, et un e m p l â t r e de d i a c h y l u m , ou d ' o n g u e u t de la m e r , ou d e s a l - s a r i n a , remédiera à m o n inadvertance ; e t m ê m e , à bien dire, c e l l e p e - tite évacuation s a n g u i n e v o u s sera fort salutaire, c a r vous m e paraissez un c o m p è r e très-sujet à la pléthore : d o n c , mon fils, a u lieu d e hlaspli - m e r , vous d e v r i e z . . . — Vous r e m e r c i e r , n'est-ce pas, m o n m a î t r e ' . ' j e m ' e n souviendrai, et a u premier coup de couteau que j ' a u r a i d o n n e , j e r é p o n d r a i à l'alcade : Seigneur, m o n ennemi est un c o m p è r e sujet à la pléthore, et t o i » ceci n'est q u ' u n e évacuation s a n g u i n e . Par le ciel ! c ' e s t pour s o n bien, m o n s e i g n e u r .

Ici les n o m b r e u s e s pratiques qui e n c o m b r a i e n t la b o u t i q u e d e F l o r è s se p r i r e n t à r i r e si b r u y a m m e n t , que le b a r b i e r e n d e v i n t p o u r p r e de colère. — Fils d e Satan ! m u r m u r a - t - i l en appliquant sou bienfaisant dic- l a m c sur la blessure saignante.

— Vous m e maudissez ! m o n p è r e , reprit le mai in ; faites, ne vous gê- nez p a s ; j e v o u s p a r d o n n e loi», m ê m e la saignée, g r â c e à la b o n n e nouvelle q u e v o u s v e n e z de n o u s d o n n e r . . . Ah ! la t a r t a n e du maudit e s t mouillée p r è s d e Conil ! par le sein de ma m è r e , j e d o n n e r a i s bien les h u i t a n n é e s d e solde q u e Ferdinand m e doit pour voir ce d a m n é Bohémien les fers aux pieds et aux m a i n s , agenouille d a n s la chapelle a r d e n t e ! Que de fois, en lui d o n n a n t la c h a s s e sur le lougre g a r d e - c ô t e , j'ai renié m o n p a t r o n jvendant les b o r d é e s que n o u s faisait c o u r i r ce favori d e l ' e n f e r ; c a r c ' e s t t o u j o u r s par le plus mauvais temps qu'il p r e n a i t la m e r : e t tandis nue n o t r e n a v i r e r o u l a i t c o u v e r t p a r les lames, le sien avait l'air de bondir et de glisser sur les vagues ! . . . Santa Carmen ! j e gagerais c e t t e

C

aire d'espardilles n e u v e s que, si le Bohémien mettait son doigt d a n s un énilier, l'eau s a i n t e frémirait et bouillonnera» c o m m e si I o n y avait p l o n g é un fer r o u g e . — Ça s'est vu, dit Florès ; m a i s ce qu'il y a de c e r - tain, c ' e s t q u e ma nouvelle est positive. — Que le ciel v o u s e n t e n d e , dit l'un, et je p r o m e t s à san Francisco de faire c o u c h e r m e s domestiques s u r la pierre, et de ne leur d o n n e r q u e «les g a r b a n ç o s cuits à l'eau p e n d a n t neuf j o u r s . — Qu'on le saisisse, et je fais offrande à la Vierge d ' u n e belle mantille e t d ' u n a n n e a u , dit un autre.—Moi, reprit u n troisième, j'ai d é j à fait v œ u à Notre-Dame del Pilai- d'aller d'ici à Xércs p i e d s n u s avec un c i e r g e d e t r o i s livres e n t r e les d e n t s , et les mains a t t a c h é e s d e r r i è r e le dos, quand j'aurai vu c e renégat j e t é dans un c a c h o t e n a t t e n d a n t son supplice. — Et moi, s'écria u n m a r c h a n d de bestiaux, j e c o n s e n s à d o n n e r deux de m e s meilleurs c a b r i s aux saints p è r e s d e San-Juan, si o n veut me p r o m e t t r e d ' é c a r l e l e r le m é c r é a n t , et de lui c o u l e r du p l o m b dans les yeux ; c a r , par san P e d r o , je ne veux p a s la m o r t d u p é c h e u r , mais il faut u n e j u s t i c e . Si c e cousin de S a t a n s e c o n t e n t a i t d e f a i r e la c o n - t r e b a n d e . quoiqu'il soit d a m n é , on p o u r r a i t e n c o r e a c h e t e r d e ses m a r - chandises, en les faisant e x o r c i s e r ; mais le m a u d i t pHIc les f e r m e s qui s o n t sur la c ô t e , e n l è v e nos filles, et commet des p r o f a n a t i o n s d a n s n o s chapelles. Encore d e r n i è r e m e n t on a trouvé la s t a t u e d e saint Ildefonse a v e c u n e t o q u e de matelot s u r la t è t e e t une longue p i p e d a n s la b o u c h e . Par les sept douleurs d e N o t r e - D a m e ! d e telles a b o m i n a t i o n s a n n o n c e n t quelque grand fléau. — Et dire, r e p r i t le m a r i n , q u e m o n s e i g n e u r le g o u v e r n e u r d e Cadix n e peut pas disposer d ' u n e b o n n e f r é g a t e pou«· met- tre un t e r m e à c e s h o r r e u r s , et que nous n ' a v o n s p o u r n o u s d é f e n d r a q u e quelques d o u a n i e r s g a r d e s - c ô t e s qui fuient d è s qu'ils a p e r ç o i v e n t le b e a u p r é d e la t a r t a n e m a u d i t e ! A r m o n s quelques felouques e u c o m m u n , m e s c o m p è r e s , et par saint J a c q u e s ! nous verrons bien si Satan le pro- tège, et si le r e n é g a t est à l'abri du fer et du p l o m b . — Une c h o s e s i n - gulière, r e p r i t à voix b a s s e le m a r c h a n d d e bestiaux, c ' e s t q u e Pédrillo, m o n c h e v r i e r , m'a a s s u r é a v o i r vu un canot d u navire b o h é m i e n venir a b o r d e r le long des r o c h e r s o ù est bâti le couvent d e S a n - J u a n , e t q u e . . .

— Et q u e ? . . . dénianda-t-on t o u t d ' u n e voix. — El que le d a m n é lui- m ê m e était e n t r é d a n s le saint lieu ! — Jésus! sainte Vierge ! santa Car- men ! quelle h o r r e u r ! d i t la foule e n se signant. — Ce n'est r i e n e n c o r e : le d a m n é s'est avisé d e m o n t e r sur la lotir de l'horloge, e t m o n c h e v r i e r l'a parfaitement vu f u m a n t son cigare maudit ; cl p u i s a p r è s , l'a e n t e n d u c h a n t e r un air m a u d i t s u r sa g u i t a r e m a u d i t e !!! — Mais les digues p e r e s , c o m m e n t o n t - i l s s o u f f e r t c e t t e a b o m i n a t i o n ? d e m a n d a Florès d ' u n air c o n t r i t . — Ah ! voilà ! El l'interlocuteur ferma à demi les yeux e n s o u - riant malicieusement.

Malgré tout le danger qu'il y avait à s'entretenir d e s affaires du c l e r g é , on allait peut-être discuter g r a v e m e n t s u r ce sujet, l o r s q u ' u n e voix gi êlc et stridente dit d ' u n t o n m o q u e u r : — A moins que le d a m n é Bohémien n e soit Satan l u i - m ê m e .

Tous les yeux se t o u r n è r e n t aussitôt v e r s un coin o b s c u r de la bouti- que d". b a r b i e r ; c a r c'était là q u e se trouvait l'inconnu qui venait de p r o n o n c e r c e s singulières p a r o l e s . Quand il vit tous les r e g a r d s de. l'as- semblée fixés s u r lui, il se leva, laissa t o m b e r son m a n t e a u b r u n , t r a - versa lentement la longue salle d e maître Florès, e t fi» g r a v e m e n t s ' a s - seoir d a n s le grand fauteuil, qui alors attendait un p a t i e n t .

Sa taille était bien prise, quoique a u - d e s s o u s de la m o y e n n e , et sou riche c o s t u m e andalou e u laissait voir toute l'élégance. Il délit le m o u - choir rouge qui e n t o u r a i t sa tête, e t il s'en é c h a p p a u n e f o r ê t d e c h e -

50

(4)

10 P L I K ET P L O K .

veux qui voilèrent p r e s q u e sa figure ; ses g r a n d s y e u x noirs brillaient d'uu doux é c l a t .

— Allons, m o n m a î t r e , dit-il à F l o r è s ; et il allongea l'index ie long d e son m e n t o n e n imitant le m o u v e m e n t du r a s o i r : et pour mes p é c h é s , a j o u t a - t - i l , n e m ' a r r a n g e z p a s c o m m e le c a m a r a d e aux boutons à l ' a n - c r e . Surtout pas d ' é v a c u a t i o n s a n g u i n e .

Le c a m a r a d e aux b o u l o n s à l a n c r e allait r é p o n d r e , lorsqu'une r u - m e u r d ' a b o r d éloignée, mais bientôt plus rapprocliée, l'en e m p ê c h a ; on distinguait une voix d ' h o m m e timide et suppliante, et u n e voix d e femme aigre e t c r i a r d e .

— Insigne m e n t e u r , j e vais te c o n f o n d r e ! dit-elle en e n t r a n t , la m a n t e en d é s o r d r e et t r a î n a n t a p r è s elle un j e u n e g a r ç o n d ' u n e quinzaii e d ' a n - n é e s . — Ma tante Isabella ! dit F l o r è s le rasoir l e v é . — Et le p ê c h e u r Pablo ! s ' é c r i è r e n t les assistants. — Senora, disait l'enfant, j e v o u s jure sur l'âme d e m o n p è r e q u e j'ai vu, il y a d e u x h e u r e s , la l a r l a n e aux voiles rouges mouillée p r è s d e Conil.

La senora Isabella lit un geste qui aurait eu toute sa signification et t o u t e sa p o r t é e s a n s le m a r i n , qui s'interposa p r u d e m m e n t entre les d e u x c h a m p i o n s .

— Encore c e Bohémien maudit ! repartit le j e u n e homme au c o s t u m e andalou. Aies m a î t r e s , voici u n e belle occasion de p r o u v e r ce q u e j ' a v a n - çais tout a 1 h e u r e , s a v o i r q u e ce d a m n é est Satan l u i - m ê m e . El il se leva g r a v e m e n t sur son fauteuil. — Allons, s e n o r a , j e suis à m ê m e d e - c l a i r c i r la q u e s t i o n , c a r j'ai vu le n a v i r e aux voiles rouges il n'y a p a s deux h e u r e s . — C'est c o m m e m o i , r é p o n d i r e n t en m ê m e temps Isabella et Pablo. — Un m o m e n t , dit l ' i n c o n n u , j u r e z - v o u s par le saint n o m do Dieu et p a r le m a r t y r e d e îa c r o i x de dire la v é r i t é ? — Nous le j u r o n s .

— Parlez d o n c , s e n o r a . — Eh bien d u n e , aussi vrai q u e sauta Isabella, ma p a t r o n n e , a sa c h â s s e à Cordouc (elle se signa), j'ai vu, il n'y a pas d e u x heures, le navire du Bohémien croiser à la h a u t e u r de Matagorda, et q u e Dieu m e r e l i r e d e celte vie si j e m e n s . — Parle, loi, dit-il a u p ê - c h e u r . — Que san Pablo m e fasse p é r i r à nia p r e m i è r e pêche, moi et ma felouque, si j e n'ai pas vu, il y a d e u x heures, la t a r t a n e du damné mouil- lée a u n e portée de c a r a b i n e d e Conil ; et c'est si vrai, m e s seigneurs, q u e j'ai r e n c o n t r é p r è s tic Vcjer un d é t a c h e m e n t de douaniers qui se r e n d a i e n t s u r la côte e n toute h â t e , guidés p a r le (ils d e Barso, le petit Carsillo, qui les avait été p r é v e n i r ; j e lie veux p a s c o n t r e d i r e la d a m e Isabella, mais q u e Dieu m ' é c r a s e si je ne dis p a s vrai !

il y avait d a n s d e u x v e r s i o n s si différentes ( l ) u n tel accent de v é r i t é et d e conviction, q u e les s p e c t a t e u r s se r e g a r d a i e n t a v e c é t o n n e m e n t . L ' é t r a n g e r lui-même souriait d ' u n air d'incrédulité. Quant à Florès, il n e s'apercevait pas que, depuis q u e sa nouvelle p r a t i q u e s'était placée s u r le grand fauteuil, il passait m a c h i n a l e m e n t le dos d e son rasoir s u r le m c u l o n d e ce Salomon i m p r o v i s é .

— Holà, m o n m a î t r e , dit le j e u n e h o m m e , e n c o n t i n u a n t de celte m a - nière, je n ' a u r a i p a s à c r a i n d r e l'évacuation s a n g u i n e du c a m a r a d e ; et il faut q u e vous s o y e z f u r i e u s e m e n t p r é o c c u p é pour n ' a v o i r pas vu au p r e m i e r coup d'œil qu'au lieu de me raser il s'agissait de m e t t r e mes che- veux en o r d r e . — En effet, dit le b a r b i e r c o n f o n d u , e n effet, vous avez le m e n t o n aussi lisse q u ' u n e ligue d e Barbarie : 011 dirait d'une f e m m e .

— D'une f e m m e ! r é p é t è r e n t Pablo et la s e n o r a Isabella.

Au m ê m e instant un tout petit e n f a n t s ' a p p r o c h a de la p o r t e , y a v a n ç a sa jolie t é t e blonde, puis la r e t i r a , s'avança e n c o r e , c o m m e s'il eut c h e r - c h é q u e l q u ' u n , a p e r ç u t l ' i n c o n n u , e t en d e u x b o n d s fut entre ses g e - n o u x .

A peine lui eut-il p a r l é à l'oreille, que c e l u i - c i se leva b r u s q u e m e n t , saisit son m a n t e a u , jeta u n e p i a s t r e à Florès en disant d ' u n air singulier :

— Il faut bien, m e s maîtres, q u e c e Bohémien soit Satan lui-même, puis- qu'il est dans trois e n d r o i t s à la fois; car je v o u s j u r e , moi, par le Christ, dit-il en se signant, qu'il louvoie depuis d e u x h e u r e s en vue d e S a n - L n c a r .

Ces mots a c h e v é s , il sauta lestement sur son c h e v a l , qui hennissait à la p o r t e , prit l'enfant en c r o u p e , et d i s p a r u t bientôt d a n s u n épais tour- billon de poussière q u e le galop de sa m o n t u r e lit élever au milieu d e la r u e Majaderita-Angosta.

l es pratiques d e l lorès, q u i s'étaient précipitées à la p o r t e pour s u i - v r e des yeux ce p e r s o n n a g e , firent, en r e n t r a n t d a n s la boutique du b a r b i e r , des c o n j e c t u r e s fort bizarres sur la Iriplicilé vraiment p h é n o - m é n a l e du c o n t r e b a n d i e r b o h é m i e n , c o n j e c t u r e s q u ' o n abandonna s a n s les avoir épuisées, p o u r s'entretenir de la c o u r s e d e t a u r e a u x qui devait avoir lieu le l e n d e m a i n .

(t) Il y n plui da vingt-cinq lieues île distance entre ces deux endroits.

CHAPITRE II.

L A C O t r . S E DK T A I T . E A B X .

Madrid, q u a n d t e s t a u r e a u x b o n d i s s e n t , Bien des blanches mains applaudissent, Bien des c c h a r p e s s o n t e n j e u .

A . D E M U S S E T .

E s p a g n e ! Espagne ! q u e ton soleil s e l è v e p u r e t b r i l l a n t ! Déjà S a n t a - Maria est b a i g n é e d e flots d e l u m i è r e ; les mille f e n ê t r e s d e s e s m a i s o n s b l a n c h e s scintillent et flamboient, et les o r a n g e r s p a r f u m é s d e l ' A l a m e d a s e m b l e n t c o u v e r t s d e feuilles d ' o r . Au l o i n , c ' e s t Cadix e n v e l o p p é d ' u n e v a p e u r c h a u d e et r o u g c à t r c , et là, sur le sable é b l o u i s s a n t de la p l a g e , d e g r a n d e s l a m e s b l e u e s et t r a n s p a r e n t e s v i e n n e n t d é r o u l e r c o m m e u n long feston d e d i a m a n t s leur é c u m e é t i u c e l a n l e d e s f e u x du soleil ; e t puis d a n s le p o r t ce s o n t des m y r i a d e s d e f e l o u q u e s , d e b a l a n c c i l c s , d o n t les flammes se déploient, soulevées p a r u n e légère b r i s e q u i c i r c u l e e n sifflant d a n s les c o r d a g e s . C'est la f r a î c h e s e n t e u r d e s algues m a r i n e s , le c h a n t des m a t e l o t s q u i déploient les l a r g e s voiles grises, e n c o r e h u m i d e s d e la r o s é e d e la nuit, le t i n t e m e n t d e s c l o c h e s d e l'église, le h e n n i s s e - m e n t d e s c h e v a u x qui b o n d i s s e n t en s ' é i a n ç a u t d a n s les p r a i r i e s v e r - d o y a n t e s qui s ' é t e n d e n t d e r r i è r e la v i l l e . . . T o u t e n f i n est b r u i t , p a r f u m et l u m i è r e .

Et l ' e m p r e s s e m e n t c a u s é p a r l ' a n n o n c e d ' u n e c o u r s e d e t a u r e a u x q u i devait avoir lieu le j o u r m ê m e à Santa-Maria a u g m e n t a i t e n c o r e c e t u - m u l t e . Presque t o u t e la p o p u l a t i o n d e s villes e t d e s villages e n v i r o n n a n t s e n c o m b r e les c h e m i n s . Là d e s c a l è c h e s r o u g e s , c o u v e r t e s d e riclics d o - r u r e s , volent e n t r a î n é e s p a r un cheval r a p i d e d o n t la t ê t e est c h a r g é e d e p l u m e s b i g a r r é e s et d e c l o c h e t t e s q u i r é s o n n e n t a u loin ; ici le p a v é t r e m b l e et gémit sous les p a s d e huit m u l e t s d o n t les h a r n a i s r e s p l e n - dissent d e c h i f f r e s et d ' a r m o i r i e s d ' a r g e n t , et q u i c o n d u i s e n t à g r a n d ' - peine u n c o c h e lourd et massif e n t o u r é p a r la m a g n i f i q u e livrée d ' u u g r a n d d ' E s p a g n e , et p r é c é d é p a r des c o u r e u r s c o u v e r t s d e m o i r e et d e tresses é c l a t a n t e s .

Plus loin, c ' e s t l'allure p r e s t e et f r i n g a n t e du p a y s a n a n d a l o u . De p a r t o u s les saints d ' A r a g o n , qu'il e s t bien a v e c s o n a m o u r e u s e en c r o u p e e t son b e a u c o s t u m e b r u n t o u t b r o d é d e soie n o i r e e t d o u b l é d ' i n c a r n a t ! Et c e s milliers d e p e t i t s b o u l o n s d ' o r taillés à j o u r q u i s e r p e n t e n t le long d e la cuisse et v i e n n e n t s ' a r r ê t e r a u - d e s s u s d e s e s g u ê t r e s d e c h a - m o i s ! C o m m e s o n pied s ' a p p u i e ferme d a n s s o n large é l r i e r m a u r e s q u e ? Mais on ne. petit voir sa f i g u r e , c a r elle e s t p r e s q u e voilée p a r la mantille d e s o n Andalouse.

P a r saint J a c q u e s , le joli c o u p l e ! Comme elle l ' é t r e i n t d e ses d e u x b r a s , et q u e les m a n c h e s v e r t e s d e monillo se d e s s i n e n t a v e c g r â c e s u r la c o u l e u r s o m b r e d e la veste d e s o n a m a n t ! Quel feu d a n s ces p r u n e l l e s qui scintillent s o u s ces épais sourcils n o i r s ! Vrai Dieu ! quels r e g a r d s ! quelle taille souple ! et q u e la Vierge bénisse c e t t e c o m p l a i s a n t e b a s q u i n e a u x l o n g u e s f r a n g e s d e salin, qui laisse voir u n e j a m b e fine et r o n d e e t u n pied d ' e n f a n t ! . . . Trois fois b é n i e s o i t - e l f · , c a r o n a v u un m o m e n t la j a r r e t i è r e bleue qui a t t a c h e , et son b a s d e soie, et le petit p o i g u a r d de T o s c a n e q u ' u n e véritable Andalouse n e q u i l l e j a m a i s !

En a v a n t ! l e u r bon c h e v a l bai s'est é l a n c é : sa c r i n i è r e noire (rcsscc de r u b a n s i n c a r n a t s flotte s u r s o n c o u n e r v e u x , e t l ' é c u m e b l a n c h i t déjà son m o r s et s e s brillantes b o s s e l l e s . E n a v a n t , j e u n e g a r ç o n ! q u e ton é p e r o n p r e s s e le flanc d e ta m o u l u r e , c a r ta b r u n e aux longs s o u r c i l s , t o u t e t r e m b l a n t e d e c e s b o n d s p r é c i p i t e s , te s e r r e r a v i o l e m m e n t c o n t r e son c œ u r , et lu en sentiras les b a t t e m e n t s ; et s e s c h e v e u x c a r e s s e r o n t ton f r o n t , et son souffle b r û l e r a (a j o u e !

P a r saint J a c q u e s , en a v a n t , j e u n e c o u p l e , e t disparaissez a u x y e u x j a - loux d a n s c e n u a g e d e p o u s s i è r e d o r é e ! . . .

Mais voilà la p o r t e de Santa-Maria. T o u t se p r e s s e e t se h e u r t e : e e sont des cris c o n f u s de d o u l e u r et d e joie ; h o m m e s , f e m m e s , vieillards, e n f a n t s , s o n t là immobiles a t t e n d a n t a v e c angoisse le m o m e n t d e la c o u r s e . Enfin les b a r r i è r e s s ' o u v r e n t , le p e u p l e se p r é c i p i t e , et e n tin i n s t a n t les i m m e n s e s galeries qui e n t o u r e n t l ' a r è n e s o n t remplies d e s p e c t a t e u r s h a l e t a n t s de désir et d ' i m p a t i e n c e .

— Place ! place à l'alcade, à la J u n t e e t à m o n s e i g n e u r le g o u v e r - n e u r ! Devant eux m a r c h e n t les miliciens d e la ville a v e c l e u r s l o n g u e s c a r a b i n e s ; puis les s e r g e n t s , qui s o n n e n t d e l e u r s c l a i r o n s , e t p o r t e n t des b a n n i è r e s j a u n e s et r o u g e s o ù sont b r o d é s les lions d e s Castilles et la c o u r o n n e r o y a l e .

— Place, p l a c e à la Monja ! c a r c e c i est la p r e m i è r e et la d e r n i è r e fête à laquelle la p a u v r e j e u n e lille assistera. A u j o u r d ' h u i , elle a p p a r t i e n t a u m o n d é ; d e m a i n , elle a p p a r t i e n d r a à D i e u ; aussi, a u j o u r d ' h u i elle est éblouissante de pierreries, sa r o b e est t o u t e luisante d e paillettes d ' a r - gent, et c i n q r a n g s de perles e n t o u r e n t son cou d ' a l b â t r e ; e n c o r e d e s p e r l e s et des d i a m a n t s sur ses b r a s b l a n c s et p o t e l é s , e n c o r e d e s p e r t e s

(5)

P L I K E T E L O k . 3 cl (les fleurs dans ses beaux ebevoux noirs qui ombragent son front

pâle. Voyez, qu'elle est louchante ! comme elle regarde la supérieure du couvent Sanla-Magdalena avec a m o u r et respect ! 11 n'y a pas un coup d'œil pour ce spectacle bruyant et animé ; pas tin sourire pour ce mur- m u r e d'admiration qui la suit, pour les hommages empressés de la plus h a u t e noblesse de Sévillc et de Cordoue. Rien ne la peut distraire de : es saintes pensées. Orpheline, riche, on la donne à Dieu et puis à la s u p é - rieure de Santa-Magdalcna. Ce c œ u r pur et naïf craint !c monde sans le connaître, car on a voulu lui faire gagner le ciel sans c o m b a t t r e . De- main, suivant l'usage, cette épaisse chevelure tombera sous le ciseau;

demain la toile et la b u r e remplaceront ces éclatants tissus ; demain elle sera liée à jamais par 1111 serment redoutable ; mais aujourd'hui l'usage veut qu'elle assiste aux vanités cl aux joies trompeuses de ce monde qu'elle ignore, c o m m e pour lui faire un éternel et dernier adieu.

— i'iace d o n c ! place à la Monja, qui entre dans sa loge toute pavoi- sée et toute tendue d'étoffe blanche semée de fleurs.

— Bravo ! les clairons sonnent, le signal est donne, les barrières s'ouvrent : un taureau s'élance et bondit dans l'arche! C'est Un brave taureau sauvage, né dans les forêts de San-Lucar ; il est fauve, seule- ment une étroite ligne blanche serpente sur son dos. Ses cornes sont courtes, niais fortes et acérées, et il n'y a pas d'acier plus luisant et plus poli. Son cou musculeux supporte sans peine un tète é n o r m e , et ses jambes sèches et nerveuses ne faiblissent pas sous le poids de son poitrail et de sa c r o u p e , qui sont d'une largeur extraordinaire.

Quant à ses lianes, ils sont osseux, arrondis et retentissent sous les coups réitérés de sa longue queue, qui, en les battant, bruit comme un fouet.

Quand il e n t r a , ce fut une explosion d'admiration à ébranler les m o n - tagnes de la Sierra, et les cris de bravo, loro! retentirent de toutes p a r t s . Lui s ' a r r ê t a c o u r t , suspendit un moment les battements de sa queue, et regarda avec élonnement autour de lui... Puis il lit à pas lents le tour de l'enceinte qui séparait l'arène des spectateurs, y chercha une issue, et, n ' e n trouvant pas, revint au milieu du cirque, et là commença d'aiguiser ses cornes, y lit tourbillonner le sable au-dessus de sa tète.

A ce moment, un Chulillo se présenta.

— Que la Vierge te protège, mon fils! et fasse le ciel que ton bel habit de satin bleu brodé d'argent n'ait pas tout à l lieure une doublure rouge c o m m e la banderole que lu fais voltiger devant les yeux de ce compère qui mugit et s'irrite !

— Bravo, Chulillo, ta patronne veille sur toi ! c a r c'est à peine si tu a s eu le temps de te jeter derrière l'enceinte pour échapper au taureau, dont les yeux commencent à briller comme des charbons ardents.

— Mais, patience, voici venir le picador avec sa longue lance, et m o n t é sur un vaillant cheval pie ; son large chapeau gris est tout chargé de rubans, et il porte des espèces de bottes et de cuissards rembourrés p o u r se préserver des premières atteintes.

— Bravo, taureau ! tu prends ton élan la tête baissée, tu te précipites sur le p i c a d o r . . . Mais il t'arrête court en l'enfonçant sa b o n n e lance au- dessus de l'épaule gauche. Ton sang ruisselle, lu mugis, et ta f u r e u r re- double. Vrai Dieu ! la course sera belle !

— Par saint J a c q u e s ! quel bond! quel m u g i s s e m e n t ! bravo, t a u - reau ! le picador roule renversé ; son vaillant cheval pie a le flanc cn- t r ' o u v e r t ; ses entrailles sortent au milieu des flots de sang. Il fait quelques p a s . . . t o m b e . . . et meurt... Bien, mon compère aux cornes ai- guës, bien ! Aussi tu entends résonner les trépignements et les cris d'une joie frénétique. J e le dis encore : Vrai Dieu! la course sera belle !

— Mais silence ! voici les Benderillas du Fuego.Oh !... oh !... lu l'ac- cules le long de l'enceinte en foulant la terre et en poussant des h u r l e - ments horribles. Que sera-ce donc, mon (ils, quand ce brave Clmiillo, que Notre-Dame protège ! t'enfoncera dans le poitrail ces longues flè- ches garnies de fleurs et entourées de fusées et de pétards qui s'allu- m e n t comme p a r enchantement? Tiens, nedisais-je pas vrai... Par l a m e de mon p è r e , le Chulillo est éveulré ! Jésus ! le beau coup de corne ! C'est sa iaute, il ne s'est pas jeté de côté assez à temps. Bravo, taureau ! que tu es noble et fier, bondissant au milieu de ces flammes qui é c l a - tent et se croisent ! Ton sang se mêle au feu ; ta peau frémit et craque sous les l'usées qui serpentent, s'arrondissent en gerbes, et retombent en pluie d ' o r ; ta rage est à son comble, et les spectateurs ont fui de la première enceinte, craignant que tu ne la franchisses, et pourtant elle a six barres de haut !

— Enfer ! le Matador n'arrive p a s ! voici pourtant le m o m e n t . En trouvera-t-il un plus désirable? jamais ; car jamais la furie de ce coin- père n'atteindra un plus haut degré, et je parierais ma bonne escopette c o n t r e u n fusil anglais que le Matador y p é r i r a . Sainte Vierge! comme il tarde ! fais donc qu'il arrive bientôt.

— Mais c'est lui... le voici : c'est Pepé Orlis !

— Viva Pepé ! viva Tcpé Ortis !

— Ah ! . . . il salue monseigneur le gouverneur et la J u n t e , et puis la Monja... 11 a ôlé son chapeau, et l'on voit pendre sa résille r o u g e . Bon!

il fait ployer sa large épée à deux t r a n c h a n t s . . . J é s u s ! que d ' o r sur sa veste orange ! j'en suis ébloui ! De l'or partout !... de l'or jusque sur les coins de ses bas et sur les bouffettes de ses souliers de daim gris.

Enfin le voilà dans l'arène!

— Tue le taureau pour moi, mon amour, lui crie une /iidalouse au teint bruni et aux dents d'émail, Par le Christ, ne souris donc pas ainsi

à ta maîtresse! Fuis, José, fuis ! le taureau fond sur toi. Mai non, José l'attend de pied ferme, son épée entre les dents, saisit une de ses cornes, et saute légèrement par-dessus lui. Bravo, mon digne Matador, bravo ! aussi ramasse la fleur d'amandier que ton amoureuse t'a jetée en battant des mains.

Mais voici que le taureau se r e t o u r n e ! Sauta Carmen! mauvais signe!

Il s ' a r r ê t e , ne mugit plus; ses jambes sont tendues, ses yeux en feu, et sa queue roulée en anneaux. Recommande Ion âme à Dieu, José, c a r la barrière est loin et le taureau est p r o c h e . En avant ! Demonio ! en avant ta bonne lame ! Jésus ! il est trop tard ! l'épée se brise en éclats, et José, traversé par une c o r n e du taureau, est cloué sur la balustrade ! J e le di- sais bien, vrai Dieu ! (tue la course serait belle !

Ce furent alors des hurlements de joie , et des cris d ' u n e admiration convulsive, des cris à éveiller des morts.

— Bravo, taureau ! bravo ! s'écrièrent toutes les voix de la foule.

Toutes ?... non, une seule manqua, c e fut celle de la jeune fille à la fleur d'amandier.

Depuis longtemps pareille fêle ne s'était vue : le taureau, encore excité par sa victoire, parcourait le cirque en faisant des bonds effroya- bles, se ruait sur les restes sanglants du Matador et du Chulillo, et des lambeaux de ces deux maladroits plcuvaient sur les spectateurs ! On était donc dans une cruelle incertitude sur l'issue de la course, car la fin de Pepé Ortis avait singulièrement refroidi le zèle de ses confrères, lorsqu'un incident bizarre, i n o u ï , rendit la foule silencieuse et sluoéfaite d ' é t o u - nement.

CHAPITRE III.

E L GITANO.

Que ses r e g a r d s b r û l a n t s font f r é m i r ! . . . qu'il est b e a u !

D E L P H I N E G A V . — iladclène, ch. v.

Vous savez que le cirque de Santa-Maria est bâti sur le bord de la mer, et que deux portes seulement y donnent accès. Eli bien! tout à coup la barrière qui faisait face à la loge du gouverneur s'ouvrit avec

force, et un cavalier se p r é s e n t a .

Ce n'était point un Chulillo , car il n'agitait pas en l'air un léger voile de soie rouge, et sa main ne brandissait ni la longue lance du Picador, ni l'épée à deux tranchants du Matador; il n'avait non plus de chapeau chamarré de rubans, de résille, ni de veste brodée d'argent. Vêtu tout de noir, à la mode des Croates, il portait des bottines de daim qui r e - tombaient en plis nombreux sur sa jambe, et une toque de matelot où flottait une plume blanche; puis il montait, avec une adresse et une élé- gance peu communes, un petit cheval noir h a r n a c h é à la mauresque, plein de vigueur et de feu ; enfin de longs pistolets richement damasqui- nés pendaient aux arçons de sa sel!o, et lui ne portait qu'un de ces sa · bres courts et étroits qui sont d'usage dans la marine militaire.

A peine avait-il paru que le taureau s'était retiré à l'autre extrémité de l'arène pour se préparer à combattre ce nouvel adversaire. Aussi l'homme noir eut-il le temps de faire exécuter à sa monture quelques passes brillantes, et de venir se poster au pied de la loge de la Monja.

Là, il se mit à regarder fixement cette fiancée du Seigneur !

La figure de la pauvre fille devint p o u r p r e comme la fleur du g r e n a - dier, et elle cacha sa tête dans le sein de la supérieure, indignée de la témérité de cet inconnu.

— Ave, Maria... quelle hardiesse! dirent les femmes.-—l'aria Vierge!

d'où sort ce démon, se demandaient les hommes, stupéfaits d'une pareille audace.

Tout à coup un cri général retentit : c a r le taureau prenait son élan pour fondre sur le cavalier à la plume blanche, qui se retourna, salua la Monja, et lui dit en souriant : — Pour vous, señora, et eu l'honneur de vos beaux yeux bleus comme l'azur du ciel.

A peine achevait-il ces mots que le taureau s c l a n ç a . Lui, avec une promptitude merveilleuse servie par la souplesse de sou cheval, fil une pointe, et se trouva à dix pas de son ennemi, qui le poursuivit avec acharnement. Mais, grâce à sa vitesse, le petit cheval le dépassait pres- que en se jouant, et il prit sur lui assez d'avance p o u r que sou maître put s'arrêter un moment devant la loge de la Monja, en lui disant : — En- core pour vous, s e ñ o r a ; mais celle fois en l'honneur d e cette bouche vermeille, purpurine comme le corail du Pervan.

Le taureau arrivait avec furie : l'homme à la plume blanche l ' a t t e n - dit froidement, lira un pistolet de ses a r ç o n s , l'ajusta et l'abattit avec tant d'adresse qu'il vint tomber en mugissant aux pieds de son cheval.

En voyant le danger imminent que courait cet homme singulier, la Monja avait jeté un cri p e r ç a n t , et s'était précipitée sur la balustrade de sa loge, les deux mains en avant : il en saisit une, y imprima un brûlant baiser, et continua de jeter sur elle un regard fixe et arrêté.

Il y avait dans cette scène étrange tant de sujets d'éloonement p o u r les Espagnols qu'il« restaient comme pétrifiés. Ce costume b i l a n g, ce

(6)

10 P L I K E T P L O K .

t a u r e a u t u é , c o n t r e t o u s les usages, d ' u n c o u p d e pistolet; cet h o m m e qui baisait la main d ' u n e d e m i - s a i n t e , d ' u n e fiancée du Christ, t o u t cela c o n t r a s t a i t tellement a v e c les habitudes r e ç u e s q u e la j u n t e , l'alcade e t m o n s e i g n e u r le g o u v e r n e u r restaient b é a n t s , tandis q u e celui qui e x c i - tait si vivement la c u r i o s i l é attachait d e s yeux enflammés sur la Monja, t r e m b l a n t e et confuse, qui n'avait pas la f o r c e d e s o r t i r de sa l o g e . En vain la supérieure a c c a b l a i t l ' h o m m e noir des épithètes les plus a c c a - b l a n t e s , telles que : impie, d a m n é , misérable r e n é g a t ! en vain elle lui c r i a i t , a v e c l'accent d e la plus sainte indignation : — Redoutez la c o l e r e du ciel et des h o m m e s , v o u s qui avez osé faire e n t e n d r e d e s p a r o l e s m o n d a i n e s à ces oreilles c h a s t e s ; v o u s qui V a v e z pas tremblé e n t o u - c h a n t la main d ' u n e é p o u s e d e Dieu !

Le misérable regardait t o u j o u r s la Monja en r é p é t a n t a v e c admiration :

— Qu'elle est belle! qu'elle est belle !

Enfin la voix glapissante de l'alcade le tira d e son extase, d ' a u t a n t plus facilement que la Monja avait q u i t t é sa loge, a p p u y é e sur le b r a s d e la supérieure, et q u e d e u x sergents v i n r e n t saisir la b r i d e de son c h e - val ; il s'y p r ê t a d e b o n n e g r â c e .

— Pour la cinquième fois, qui q u e v o u s s o y e z , r é p o n d e z , disait l ' a l - c a d e . De quel droit avez-vous tué d ' u n c o u p d e pistolet u n taureau d e s - t i n é aux plaisirs du public? De quel d r o i t avez-vous a d r e s s é la p a r o l e à u n e j e u n e fille qui doit demain p r o n o n c e r des v œ u x saints et e t e r n e l s ? En un m o t , qui ê t e s - v o u s ?

Et le municipal reprit sa place en s'essuyant le f r o n t , regarda le g o u - v e r n e u r d ' u n air satisfait, et dit aux d e u x s e r g e n t s : — Tenez bien s o n cheval, m e s s i e u r s .

— Qui je s u i s ? dit l ' é t r a n g e cavalier e n r e d r e s s a n t fièrement sa t ê t e , q u e jusque-là o n n ' a v a i t pu bien distinguer.

Et l'on vit des traits d ' u n e régularité parfaite ; ses y e u x étaient h a r d i s et p e r ç a n t s , u n e m o u s t a c h e noire et luisante ombrageait ses lèvres v e r - meilles, et sa b a r b e touffue, qui se dessinait e n d e u x a r c s le long d e ses j o u e s , venait s ' a r r ê t e r s u r un m e n t o n à fossette : seulement son teint était pâle et m a t .

— Qui j e suis ? répéta-t-il d ' u n e voix p l e i n e et s o n o r e , vous allez le savoir, digne a l c a d e .

Et il a p p u y a vigoureusement ses é p e r o n s d a n s les flancs de son cheval e n lui d o n n a n t u n e violente s a c c a d e . Alors l'animal se d r e s s a si b r u s q u e - m e n t , et fit un bond si prodigieux q u e les d e u x sergents r o u l è r e n t d a n s le c i r q u e , r e n v e r s é s d ' u n c o u p d e poitrail.

— Qui j e suis? J e ' s u i s le Gilano, le Bohémien, ie m a u d i t , le d a m n é ; si vous aimez mieux, digne a l c a d e !

Et en d e u x sauts il f r a n c h i t l'enceinte et la b a r r i è r e , gagna la g r è v e qui était p r o c h e , et on put le voir se j e t e r à la n a g e avec son cheval.

Alors il se passa un é v é n e m e n t assez b i z a r r e . Le n o m du Bohémien fit u n effet tel que t o u t e la population voulut s o r t i r à la fois e t se précipita v e r s les issues trop étroites pour d o n n e r passage à cette masse d ' h o m - m e s qui se ruaient du m ê m e c ô t é . Aussi, les p o u t r e s des galeries du cir- q u e se fendirent et c r a q u è r e n t , ne p o u v a n t s u p p o r t e r une secousse aussi violente, et toute u n e p a r t i e d e l ' a m p h i t h é â t r e s'abîma s o u s les pieds d e s spectateurs ! Le tumulte et l'effroi f u r e n t bientôt à leur comble, u n e foule d e p e r s o n n e s é t a i e n t entassées les u n e s sur les a u t r e s , et celles sur- t o u t qui supportaient ce poids é n o r m e p o u s s a i e n t des cris lamentables en se r e c o m m a n d a n t à leurs p a t r o n s .

— C'est c e maudit, ce d a m n é , d i s a i t - o n , qui a attiré la colère du ciel e n osant p r o f a n e r la fiancée du Christ ! sa p r é s e n c e est un fléau. A n a - t h è m e , a n a t h è m e sur lui ! Et c'étaient d e s malédictions à faire frémir no- t r e s a i n t - p è r e !

En vain l'alcade et le g o u v e r n e u r , qui avaient é c h a p p é à c e d é s a s t r e , faisaient leur possible p o u r rétablir l ' o r d r e : ils n e pouvaient parvenir à faire e n t e n d r e la voix de la raison à quelques milliers d'Espagnols froissés et é c r a s é s qui hurlaient à la fois. Aussi les a u t o r i t é s en étaient à i n v o - q u e r les d e r n i e r s saints du calendrier lorsque c e t immense a m a s d ' h o m - m e s se dissipa c o m m e p a r e n c h a n t e m e n t . Chacun se t r o u v a tout à c o u p s u r pied, mais chez plusieurs les a c c e n t s d ' u n e véritable douleur a v a i e n t r e m p l a c é les cris d e la c r a i n t e et du saisissement.

Voici :

Le m a l h e u r e u x b a r b i e r Florès, placé au plus b a s étage d u cirque, se t r o u v a au n o m b r e d e ceux qui supportaient tout le poids de la foule. Or, a p r è s avoir fait a v e c ses c o m p a g n o n s d ' i n f o r t u n e d'incroyables e f - forts p o u r é c h a p p e r à la pression, e t voyant que de saines et b o n n e s rai- s o n s n e pouvaient rien sur l'indolence des c o m p e r e s des couches s u p é - r i e u r e s , qui en p r e n a i e n t à leur aise pour se d é b a r r a s s e r , sans p e n s e r qu'ils pesaient indirectement d e t o u t e leur l o u r d e u r s u r les couches i n - f é r i e u r e s , le barbier Florès d o n c , h a r a s s é , é c r a s é , articula a v e c peine à quelques m a l h e u r e u x qui gémissaient c o m m e lui :

— Mes c o m p è r e s , m'est avis qu'en j o u a n t du c o u t e a u au-dessus d e n o u s , à tort et à t r a v e r s , n o u s éveillerions la sensibilité et la pitié de n o s o p p r e s s e u r s , g r â c e à quelques b o u t o n n i è r e s q u e je m e chargerai d e f e r m e r , soit a v e c le d i a c h y l u m , l'onguent d e m e r , ou l a . . .

Et il s ' a r r ê t a p o u r r e p r e n d r e h a l e i n e , c a r son malheureux destin l ' a - vait fait t o m b e r immédiatement s o u s les c o r p s d e d e u x m o i n e s et d ' u n b o u c h e r .

— Ou la salsarina, reprit-il en r e s p i r a n t à p e i n e . Ainsi d o n c , mes p è - r e s , absolvez-moi d ' a v a n c e , c a r c ' e s t p o u r le salut de tous, surtout de ceux qui sont en d e s s o u s ; e t vous allez v o i r , m e s r é v é r e n d s , que la

p o i n t e d ' u n c o u t e a u p e r s u a d e m i e u x q u e les p l u s belles p a r o l e s . — Ave, Maria, q u e Dieu n o u s g a r d e , r é p o n d i r e n t les d e u x m o i n e s qui p r e s s a i e n t le b a r b i e r d e t o u t e l e u r r o t o n d i t é m o n a c a l e , et qui s e n t i r e n t à ses m o u - v e m e n t s s a c c a d é s et e m p ê c h é s qu'il c h e r c h a i t s o n c o u t e a u . Au n o m d u ciel ! n e faites pas u n e telle c h o s e , m o n fils : h o m i c i d e point n e s e r a s .

— Mais, m e s p e r e s , c ' e s t v o u s qui êtes homicides, c a r v o u s m e t . . . . v o u s m ' é l o u f f e z . — Par le Christ! o n n o u s étouffe n o u s - m ê m e s . — C'est d o n c p o u r v o u s q u e j e v a i s t r a v a i l l e r . T o u r n e z - v o u s d e c ô t é , m e s p è r e s , les b l e s s u r e s s o n t ainsi m o i n s d a n g e r e u s e s , c a r o n n e r e n c o n t r e q u e les fausses c ô t e s . Enfin, j e le tiens, dit-il e n o u v r a n t difficilement s o n c o u - t e a u . — Y s o m m e s - n o u s , m e s c o m p è r e s ? — Mais d u t o u t , J é s u s , n o u s n'y s o m m e s p a s . — C'est égal, q u e Dieu n o u s aide !

Et il s e mit à f r a p p e r à c o u p s r e d o u b l é s et c o m m e il p u t a u - d e s s u s d e sa t ê t e . Ceux qui r e ç u r e n t c e charitable a v e r t i s s e m e n t n e t r o u v è r e n t rien d e plus efficace p o u r le faire cesser q u e d e l ' i m i t e r : et c e m o y e u incisif, se p r o p a g e a n t a v e c rapidité de b a s en h a u t , e u t b i e n t ô t le r é s u l - tat ie plus satisfaisant, sauf les b o u t o n n i è r e s q u e F l o r è s se c h a r g e a d e c i c a t r i s e r et cicatrisa p r o b a b l e m e n t a v e c s o n habileté a c c o u t u m é e .

Quand o n fut r e m i s d e c e l t e violente é m o t i o n , le p r e m i e r c r i fut d e d e m a n d e r où était le m a u d i t , et d e c o u r i r au r i v a g e . Une t a r t a n e a u x voiles r o u g e s , t o u t e p a v o i s é e c o m m e e n un j o u r d e f ê t e , s e b a l a n ç a i t a u l a r g e . C'était lui, on n ' e n p o u v a i t d o u t e r . — A u p o r t ! au p o r t ! c r i a - t - o n , et o n se précipita v e r s l ' e m b a r c a d è r e p o u r voler à sa p o u r s u i t e .

Mais là, g r a n d Dieu, quel s p e c t a c l e ! Le p e u p l e e s p a g n o l est t e l l e m e n t avide d e c o u r s e s de t a u r e a u x q u e pas un h o m m e , p a s u n e f e m m e , p a s u n e n f a n t , n ' é t a i e n t r e s t é s d a n s la ville, tous é t a i e n t a u c i r q u e , les m a - r i n s m ê m e s a v a i e n t a b a n d o n n é leurs n a v i r e s , e t , q u a n d ils a r r i v è r e n t à la j e t é e , ils t r o u v è r e n t t o u t e s les a m a r r e s c o u p é e s , et v i r e n t au loin f e - l o u q u e s et balancelles q u e la m e r avait e m p o r t é e s e n se r e t i r a n t .

Alors c e fut u n e nouvelle r u m e u r de malédictions s u r le B o h é m i e n , e t t o u t e la p o p u l a t i o n s e j e t a à g e n o u x d ' u n m o u v e m e n t s p o n t a n é p o u r de- m a n d e r à Dieu d e faire a b î m e r la tartane, qui s e m b l a i t b r a v e r c e l t e foule é p l o r é e en é t a l a n t ses b r i l l a n t s pavois d e mille c o u l e u r s .

T o u t à c o u p le ciel sembla e x a u c e r ces v œ u x , c e r t a i n e m e n t b i e n j u s - tes, c a r d e u x voiles a p p a r u r e n t au loin : elles s e r r a i e n t le v e n t a u p l u s p r è s en c o u r a n t à c o n t r e b o r d l ' u n e de l ' a u t r e , d e telle f a ç o n q u e le n a - v i r e du Bohémien devait se t r o u v e r pris e n t r e elles d e u x o u se j e t e r à la côte ; et quelle n e fut p a s la joie publique q u a n d o n e u t r e c o n n u les d e u x lougres d o u a n i e r s qui hissèrent le pavillon e s p a g n o l e n l ' a s s u r a n t d ' u n c o u p de c a n o n !

Alors la t a r t a n e c h a n g e a r a p i d e m e n t s e s a m u r e s , v i r a d e b o r d a v e c u n e p r e s t e s s e qui tenait du p r o d i g e , p a s s a e n t r e les d e u x l o u g r e s e n leur l â c h a n t sa volée, et laissa p o r t e r e n plein sur la p o i n t e d e la T o r r e . Quoique la m a n œ u v r e s a v a n t e et prestigieuse d e la t a r t a n e e û t d é r o u t é les p l a n s de c a m p a g n e et la t a c t i q u e d e s s p e c t a t e u r s d e Santa-Maria, ils c o m p t a i e n t t o u j o u r s sur la vitesse et le n o m b r e des a t t a q u a n t s p o u r v o i r leur e n n e m i p r i s et t r a î n é à la r e m o r q u e . Mais la t a r t a n e , a y a n t s u r l e s d e u x l o u g r e s un a v a n t a g e d e m a r c h e positif, d i s p a r u t bien a v a n t e u x d e r r i è r e la p o i n t e d e la T o r r e , q u i s ' a v a n ç a i t de b e a u c o u p d a n s la m e r ; et ce n ' e s t q u ' a p r è s un q u a r t d ' h e u r e de navigation q u e les g a r d e s - c ô t e s , qui voguaient d a n s les m ê m e s e a u x , d i s p a r u r e n t aussi a u x y e u x d e la foule, c a c h é s p a r le p r o m o n t o i r e .

Et t o u t Santa-Maria f r é m i s s a i t d ' i m p a t i e n c e et d e désir d e c o n n a î t r e l'issue du c o m b a t qui allait se livrer d e r r i è r e c e t t e m o n t a g n e .

CHAPITRE IV.

L E S DEUX T A R T A B E S .

Adieu la balancelle Qui sur l'onde chancelle, Et comme une étincelle

Luit sur l'azur des mers.

VI C T O R HC G O . — Navarin.

— En a v a n t , m o n fidèle I s k a r , vois, la m e r est a z u r é e , et la v a g u e vient d o u c e m e n t c a r e s s e r t o n l a r g e poitrail, tout b l a n c h i d ' é c u m e ! E n a v a n t ! tu p l o n g e s d a n s l ' e a u limpide tes n a s e a u x qui s ' o u v r e n t et f r é - missent ! et ta l o n g u e c r i n i è r e r o u l e des p e r l e s b r i l l a n t e s c o m m e d e s g o u t t e s d e r o s é e . En a v a n t ! déploie e n c o r e c e s j a r r e t s v i g o u r e u x q u i fendent la lame en sifflant. Courage, m o n fidèle Iskar, c o u r a g e ; c a r , h é - las ! les t e m p s s o n t c h a n g é s ! — Que de fois, s o u s la f r a î c h e v e r d u r e d u P r a d o de Séville et de Cordoue, tu atteignis et d é p a s s a s les b r i l l a n t s boggies qui e n t r a î n a i e n t d e belles filles d e G r e n a d e b r u n e s et r i e u s e s , a v e c leur r é s e a u d e p o u r p r e qui volait au v e n t , e t l e u r r i c h e monillo at- t a c h é p a r des a g r a f e s c h a t o y a n t e s ! — Que d e fois tu as b o n d i d ' i m p a - tience a u p r è s d e l'étroite f e n ê t r e f e r m é e p a r u n s t o r e s o y e u x , d e r r i è r e lequel s o u p i r a i t ma c h è r e Zetta ! — Que d e fois tu as h e n n i p e n d a n t q u e n o s l è v r e s se c h e r c h a i e n t e t s e p r e s s a i e n t b r û l a n t e s , q u o i q u e s é p a r e e s p a r le tir,·* j a l o u x ! — Mais a l o r s j'étais r i c h e ; a l o r s le pavillon d e g u e r r e

Hivatkozások

KAPCSOLÓDÓ DOKUMENTUMOK

Il recense ces substituts dans le discours sur l’art : le goût (synonyme de la manière à partir du xvi e siècle, mais dont l’acception s’élargit au xvii e siècle et

Le lendemain de son arrivée, il reprit Hayes à part et lui déclara qu'un coup allait se faire; — que s'il était, lui Hubert, arrivé quelques jours plus tôt à Paris, le coup

de Chateaubriand, dans l'angle que faisait le lit avec le mur de la chambre, il y avait deux caisses de bois blanc posées l'une sur l'autre.. La plus grande contenait, me dit-on,

Le fondateur de la bibliothèque nationale de Hongrie (1802), Ferenc Széchényi, a ainsi invité son ancien professeur à composer la préface du catalogue imprimé de sa collection, dont

Dans le discours artistique du siècle classique et celui des Lumières, la réflexion sur le charme va de pair avec celle à propos d’autres notions – telles que le

Si la rupture et la réticence sont des figures voisines du silence, le rythme et le vide établissent une relation plus directe à la notion du silence en peinture que les figures

André de Tott connaissait depuis longtemps Ibrahim Müteferrika qui était son ami, à tel point qu’il lui confiait la traduction de lettres, comme le relate sa lettre du

Le Conseil européen, statuant à la majorité qualifiée, avec l’accord du président de la Commission, nomme le haut représentant de l’Union pour les Affaires étrangères et