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Promenades poétiques

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Academic year: 2022

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Promenades poétiques

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Atelier Sauvageot

Kinga Csizmadia Jakab Daróczi Veronika Farkas

Fanni Filyó Blanka Halápi Kinga Sümegi Csillag Tarnai

Et les amis de l’Atelier Flóra Farkas Goburdhun Marine

Illés Klaudia Morten Nissen

Sous la direction de Nils Renard

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Cette édition a été réalisée avec le soutien du Collège Eötvös József ELTE, de la Fondation Franco-Hongroise pour la Jeunesse et de l'Institut français de Budapest, dans le cadre du concours « Az Oktatási Hivatal által nyilvántartott szakkollégiumok támogatása » (NTP-SZKOLL-18-0012).

Collège Eötvös József ELTE Budapest, 2019

Responsable de l'édition : Dr. László Horváth, directeur du Collège Eötvös József ELTE

Sous la direction de Nils Renard

Copyright © Collège Eötvös József ELTE 2019 © Les auteurs Tous droits de traduction et de reproduction réservés.

Imprimé par CC Printing Szolgáltató Kft.

1118 Budapest, Rétköz u. 55. A/fsz. 2.

Représentante légale : Ilona Szendy

Mise en page : Kinga Csizmadia, Szabolcs Csizmadia Iconographie : Anna Farkas

ISBN 978-615-5897-17-7

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Table des matières

Préface... 9

Les auteurs ... 17

Kinga Csizmadia ... 17

Jakab Daróczi... 18

Veronika Farkas ... 19

Fanni Filyó ... 20

Blanka Halápi... 21

Nils Renard ... 21

Kinga Sümegi ... 22

Csillag Tarnai ... 22

I. « Je suis poète, mes talents sont nombreux » ... 25

Kinga Csizmadia : Art poétique ... 25

Jakab Daróczi : Je suis poète, mes talents sont nombreux... ... 25

Veronika Farkas : Je suis « Poétesse » ... 26

Blanka Halápi : Je suis poète, mes talents sont nombreux... ... 27

Morten Nissen : Je suis poète... ... 28

Kinga Sümegi : Je suis poète, mes talents sont nombreux... ... 29

Csillag Tarnai : Je suis poète, mes talents sont nombreux... ... 30

II. La ville ... 31

Kinga Csizmadia : Budapest, Statue de la Liberté ... 31

Jakab Daróczi : Bonjour mon amour ! ... 33

Flóra Farkas : La promenade ruminative ... 34

Veronika Farkas : Envie de partir ... 34

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Kinga Sümegi : Balatonszéplak-alsó ... 39

III. Poésie en vers ... 41

Kinga Csizmadia, Klaudia Illés : Cette chronique secrète et volumineuse... ... 41

Veronika Farkas, Blanka Halápi, Csillag Tarnai : Trois demoiselles – une création ... 41

IV. L’automne répond au poète ... 43

Veronika Farkas : L’arrivée de l’automne ... 43

Blanka Halápi : L'apologie de l'automne ... 45

Csillag Tarnai : Chanson d’automne ... 45

V. Poèmes en prose ... 47

Kinga Csizmadia : Fermez ce livre... ... 47

Veronika Farkas : Le poème… ... 48

Blanka Halápi, Csillag Tarnai: Qu'est-ce que c'est, que la poésie? . 49 VI. Personnages littéraires ... 51

Kinga Sümegi : Je ne t’aime pas si tu es mon père... ... 51

Blanka Halápi: L'idiot saint ... 52

Csillag Tarnai : Estragon et Vladimir ... 53

VII. Prose poétique ... 55

Kinga Csizmadia : À Judit ... 55

Csillag Tarnai : Prose poétique sur le lac Balaton ... 56

VIII. Poèmes inspirés par des images de Paris ... 59

Veronika Farkas : L’agonie de l’hiver et le triomphe du soleil ... 59

Csillag Tarnai : J’ai visité Paris... ... 60

Csillag Tarnai : Qu’est-ce qu’une sculpture ressent... ... 61

IX. Chute de poèmes et poèmes à chute ... 63

Csillag Tarnai : Le secret de la chute ... 63

(8)

Blanka Halápi: Ode ... 65

XI. Poèmes écrits à plusieurs mains ... 67

Le moment où j’ai vu... ... 67

Quatre fois un, cela fait un poème ... 69

XII. L’invitation au voyage en Francophonie ... 71

A bord du bateau voile... ... 71

Et je suis partie... ... 72

Des nuages oranges... ... 74

Les étoiles vivent différemment au Nord... ... 76

XIII. Rimbaud et l’art de la fugue ... 79

Fanni Filyó : Papillon ... 79

Csillag Tarnai : L’exil ... 81

Veronika Farkas : Un nouveau chapitre ... 83

Halápi Blanka : « Tu as eu raison de partir, Arthur Rimbaud » ... 84

XIV. Poèmes à plusieurs : thème libre ... 87

Dix minutes... ... 87

Poème fabriqué par quatre filles ... 90

XV. Poème à base de mots donnés ... 93

Fanni Filyó : « L’invitation au voyage » ... 93

Blanka Halápi : Incendies ... 93

Csillag Tarnai : A ne pas raconter aux adultes ... 95

XVI. A propos de Hugo ... 97

Fanni Filyó : C’est une nuit d’hiver ... 97

(9)

Fanni Filyó : Le réveil du printemps ... 101

Fanni Filyó : Le silence ... 102

Csillag Tarnai : J’ai froid ... 102

Veronika Farkas : Les saisons et les Lions ... 104

Halápi Blanka: Renaissance ... 105

XVIII. Personnages historiques ... 107

Veronika Farkas : Louis XVII – Le Petit Louis ... 107

XIX. Il y a… un poème. ... 109

Kinga Csizmadia : Noir et blanc ... 109

Veronika Farkas : Il était une fois un pont magnifique… ... 109

Fanni Filyó : Il n’y a pas ... 110

Nils Renard : Vague marine ... 110

Csillag Tarnai : Oubliez ... 111

XX. Promenades solitaires ... 113

Kinga Csizmadia : 48° 51' 12 N ; 2° 20' 55 E ... 113

Veronika Farkas : Quel secret la forêt magique cache-t-elle ?... 114

Veronika Farkas : Vingt-cinq kilomètres ... 117

Blanka Halápi : Le réveil de Tatyana ... 119

Nils Renard : Poème en hongrois ... 121

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Préface

Au seuil de ce recueil, il est nécessaire de prendre toute la mesure de l’immense défi que constitue la publication d’une œuvre littéraire collective, et en particulier d’une œuvre poétique. Défi contre le sentiment d’inutilité qui menace toujours de recouvrir tout effort de nature littéraire, défi contre

« le vide papier que la blancheur défend

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», défi encore contre les obstacles du temps et de la matière, propres à toute entreprise humaine, et défi contre soi-même, contre la gêne à écrire de la poésie et à faire de la poésie au XXIème siècle, alors que tous les codes poétiques semblent avoir été abolis et que la place du poète dans la cité n’est plus celle qu’elle a pu être en d’autres temps. Dans ce défi, toutefois, la possibilité d’écrire collectivement et l’immense soutien apporté par les institutions, qui ont d’emblée souhaité parrainer cet ouvrage, ont joué un rôle essentiel pour faire de ce qui n’était qu’un exercice de langue et d’écriture, une œuvre en soi.

Cette œuvre est née dans un environnement de travail

unique, et qu’il convient ici de présenter au lecteur. On pourra

comprendre ainsi l’originalité de ce recueil poétique, qui ne

cache pas ses origines laborieuses, ni la dimension

d’apprentissage constant qui a présidé à sa naissance. L’Atelier

Sauvageot, qui est l’auteur collectif de ce texte, est constitué des

étudiants spécialisés en français du Collegium Eötvös. Cet

atelier de travail porte le nom de l’illustre prédécesseur de toutes

les lectrices et tous les lecteurs de français du Collegium

Eötvös, Aurélien Sauvageot. En tant que lecteur de français

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Préface

cette année, mandaté, comme le veut la tradition, par mon institution d’origine, l’Ecole Normale Supérieure de Paris – Université PSL, je fus donc introduit dans cet atelier de travail déjà très autonome, doté d’un esprit de corps et d’un sentiment d’amitié collective très porteur, comme un nouveau général à la tête d’une armée déjà illustre, et j’appris autant d’eux qu’ils apprirent, j’ose l’espérer, de moi. Le choix de la poésie pour thème de l’année s’imposa à nous tous comme une évidence.

Nous entreprîmes alors de relire et d’étudier toute la poésie française, en partant de ses origines médiévales, et cette exploration de la poésie constitua comme le fond sonore de la symphonie poétique à laquelle nous nous attelâmes. L’autre temps de cet atelier fut bien sûr l’écriture, hebdomadaire, des poèmes, avec un thème nouveau à chaque fois et des règles à respecter ou à dépasser, selon l’humeur du moment. Au groupe initial de l’Atelier Sauvageot, s’adjoignirent parfois, comme des visages croisés sur un long chemin, les amis de l’Atelier, de passage éphémère ou plus régulier.

Le choix de la poésie pour apprendre une langue et la

pratiquer n’est pas une évidence. C’est même tout le contraire :

la poésie est souvent considérée comme l’acmé d’une langue et

d’une littérature, la forme d’écriture qui impose une maîtrise

parfaite de la langue, de ses codes, de ses structures et de sa

mélodie, et, à cet égard, elle serait réservée aux parfaits

locuteurs de la langue. On pourrait en effet douter que des

poètes comme Stéphane Mallarmé ou Paul Valéry soient les

plus accessibles pour une personne apprenant le français. Il

semblerait encore plus difficile de demander à des étudiants

étrangers, même aussi doués que ceux de cette institution

d’excellence, et qui m’ont sans cesse surpris par leur aisance

dans cette langue française dont j’ai mesuré, en l’enseignant, la

complexité, d’écrire des poèmes. On s’étonnerait encore plus de

commencer par l’écriture d’un poème pour apprendre une

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langue aussi étrangère aux langues indo-européennes, et pourtant si étonnamment mêlée à elles, comme un morceau d’un autre univers mais habillé de l’alphabet latin, que l’est la langue hongroise. C’est ce paradoxe que l’Atelier Sauvageot a assumé et a mené sur toute une année, avec une passion croissante, sans jamais trembler de s’en prendre à la poésie pour pratiquer une langue étrangère. Tandis que les membres de l’Atelier rédigeaient les poèmes en français qui forment l’essentiel du corpus présenté ici au lecteur, je me lançai dans l’écriture du seul poème hongrois présent dans ce recueil, du haut de mes deux mois d’apprentissage solitaire du hongrois : avec l’aide précieuse des étudiants qui ont relu ce poème, l’audace a payé et un poème est né, tandis que leur propre épopée linguistique et poétique a formé ce recueil.

Nous fûmes donc tous impliqués dans une épreuve

linguistique autant que poétique, face à deux obstacles

immenses : une langue étrangère et la langue poétique. Ecrire

dans une langue étrangère peut déjà paraître difficile, tandis que

l’écriture poétique implique, également, une forme d’extranéité

à la langue quotidienne, si bien que les deux écritures imposent

une certaine distance et l’impossibilité de l’immédiateté du

discours. La poésie parut et s’affirma néanmoins comme une

langue transcendante plutôt qu’un obstacle dans cette double

entreprise, un espace commun implicite, permettant à chacun de

progresser dans les langues, française et hongroise, en recourant

à cet instrument de remise en cause du mot et du monde qu’est

la poésie. En un sens, nous poursuivîmes l’entreprise

rimbaldienne, esquissée dans la lettre du 15 mai 1871 à Paul

Demeny, dite « Lettre du voyant », résumée par cette brève

formule : « trouver une langue

2

». Rimbaud a en effet paru

(13)

Préface

chercher dans la poésie une autre langue, la recomposer, lui qui, une fois installé à Aden, avoue ne plus pouvoir supporter les mœurs ni même « la langue de l’Europe

3

», et préférer ainsi rester dans un environnement linguistique tout autre, après avoir maîtrisé à la perfection le français et les codes poétiques et les avoir recomposés entièrement. L’apprentissage des langues est finalement un exercice poétique similaire : il s’agit de franchir une frontière dans la langue et la pensée, de décomposer le rapport des mots et des choses, du signifiant et du signifié, et de parer toute chose d’un nouveau son, d’une nouvelle mélodie, à la façon d’une nouvelle genèse. Nous éprouvâmes tous ce choc, cette interrogation sur les mots, sur le monde, en employant non pas une, mais deux autres langues, la poésie acquérant ainsi le statut de langue rejoignant nos entreprises et leur donnant un terrain commun. Nous fûmes comme jetés dans Babel mais avec la poésie comme dictionnaire.

Dans cet exercice à plusieurs voix, la poésie s’est imposée comme un outil essentiel d’apprentissage en offrant également la possibilité de marier les mots en dehors des codes habituels, de mener la syntaxe aux limites du possible, d’éprouver le rapport charnel aux mots et aux sons. Ce qui, dans le cadre d’un apprentissage normal, n’est pas possible, comme de faire parler le Danube, le redevient dans une situation poétique, et abolit les contraintes en offrant de magnifiques perspectives sur les mots.

L’Atelier Sauvageot a été pour nous tous cette expérience aux frontières de langue et du monde, mais aussi une épreuve cathartique pour nous tous. Chaque semaine, les membres de l’Atelier ont dû écrire, puis réciter ces poèmes devant le groupe, ce qui, pour chacun, a constitué une sorte de confession mais aussi de partage, aidant à dépasser les douleurs et les peines, à exprimer autrement les sentiments et les voix intérieures,

3 Idem, p. 527. Lettre du 6 mai 1883, Harar.

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autrement que par l’échange habituel et quotidien d’informations évidentes, puisque le plus profond en nous- mêmes a pu s’exprimer, s’extérioriser, et être dépassé. Plutôt que de comprendre et écouter les causes extérieures qui agissent sur nous et provoquent nos sentiments, nous avons ainsi partagé cette intériorité, ces pensés inaudibles et tues dans la quotidienneté, à travers l’écriture poétique qui rend cet autre monde audible, par le choc des sens et des sons. Même les plus timides ont exécuté cet exercice sans trembler, puisque la poésie a formé cette sphère du partage où tout peut être dit. Nous avons, ainsi, habité poétiquement le monde, pour reprendre la formule de Hölderlin, et cette demeure commune aura été, pour nous tous, l’Atelier Sauvageot, cette « cave aux poèmes » selon la formule de Morten Nissen, l’un des amis de l’Atelier.

La récitation des poèmes a également joué un rôle essentiel, car, portée par les lèvres qui ont écrit ces mots, la poésie de chacun de nous a pris plus de sens, plus d’incarnation, et a renoué avec ses origines médiévales, cet art des trouvères et des troubadours qui s’exprimait si bien dans les tournois de chevalerie, par la déclamation et la récitation. En la façon de ces poètes, nous avons jouté poétiquement chaque semaine et avons appris à explorer les règles et les codes de la poésie française.

Car il a fallu passer par l’apprentissage et l’histoire de la poésie

française, explorer ses origines, ses élans, ses rêves comme ses

échecs, et ses permanentes renaissances. Comme Rimbaud,

nous pourrions dire : « Ce fut d’abord une étude

4

». La grande

quête aura sans doute été celle de l’alexandrin, ce vers que j’ai

tenté d’imposer au départ comme épreuve linguistique suprême,

avant d’y renoncer, même si de belles réussites ont permis de

tutoyer cet idéal. Nous n’avons en effet renié aucune des règles

de la poésie, avons tenté de les faire nôtres, de les comprendre,

(15)

Préface

de les mettre à l’épreuve de notre forge poétique, même si la liberté a dominé dans l’écriture et si la forme naturelle a paru être le vers libre ou la prose, qui domine dans ce recueil, n’en déplaise à Malherbe. Bon nombre des poèmes qu’on va lire ont d’ailleurs entretenu avec la longue histoire de la poésie française des parallèles, des échos, parfois volontaires, parfois involontaires, et, à la faveur de l’affermissement de styles individuels, des constantes sont apparues. Telle auteure pourra apparaître, par ses images glacées et immaculées, comme influencée par Mallarmé, telle autre, par ses questions comme forme essentielle de poésie, aura développé un style reconnaissable entre tous, telle autre encore aura su explorer la poésie en prose dans toute sa puissance métaphysique et aura fait parler les animaux même, dans la lignée de la mission rimbaldienne du poète, qui est « chargé de l’humanité, des

animaux même5

». D’autres encore ont répondu autrement à ces tendances : une auteure, par la dominante solaire de ses productions aura formé un contre-univers mallarméen, plus proche de la contemplation du sud de la France par un Paul Valéry, et une autre, en jouant davantage sur les sonorités des mots et les explorations linguistiques, aura su renouer avec une forme de surréalisme, tandis que nous eûmes aussi un Apollinaire marqué par la quête de l’amour perdu. Il y eut enfin les amis de l’Atelier, qui ont su apporter leur originalité et ont formé des amis de voyage, sur la Mer intérieure de notre poésie, même si les vents les ont ensuite portés vers d’autres rivages.

Le lecteur est donc averti de la nature de ce recueil, exercice collectif, ascèse intérieure et moment de partage, labeur linguistique couronné par le sentiment d’achèvement qu’apporte la fin de tout poème, qui pourra inspirer au moins autant par la manière dont il est né, que par son résultat final.

5 Idem. p. 346. Lettre du 15 mai 1871.

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Celui-ci, précisément, nous le devons à l’aide inestimable de nombreuses personnes, que je souhaiterais ici remercier, et à qui je dédie ce travail :

-Tous les membres de l’Atelier Sauvageot, et les amis de l’Atelier, véritable source d’amitié, d’inspiration et cœur de toute cette entreprise poétique pour laquelle ils ont apporté tout leur sérieux, leur enthousiasme, leur énergie et leur maîtrise admirable du français.

-Le Collegium József Eötvös, le berceau de cet Atelier Sauvageot, qui a formé ce château aux salles protectrices, loin du vacarme du monde, où la poésie peut naître, et son directeur, M. László Horváth, qui a immédiatement soutenu ce projet de publication et lui a donné corps. Je tiens également à remercier Mme Emese Egedi-Kovács, qui m’aura aidé et soutenu sur toutes mes initiatives, tout au long de l’année, ainsi que Mme Anikó Kalmár.

-La Fondation Franco-Hongroise pour la Jeunesse, qui a été un soutien précieux pour toute cette année, et en particulier pour ce projet, d’emblée reconnu et soutenu, et pour lequel Mme Mariann Körmendy, Directrice de la Fondation, a proposé la publication, ce qui a constitué une marque de confiance immense et le point de départ vers l’actualisation de ce rêve.

-L’Institut français de Budapest en son ensemble, qui a

apporté une subvention pour ce projet, et qui a été également un

lieu de rencontres et de tous les possibles, sans compter la

médiathèque de l’Institut, auquel je me suis si souvent

approvisionné en nourriture poétique tout au long de cette

année.

(17)

Préface

admirable pour la mise en page et la confection de l’œuvre finale, et sans lesquels rien de tout cela n’aurait été possible, ainsi qu’Anna Farkas, pour ses illustrations magnifiques, qui ont su donner une forme graphique à cette entreprise poétique.

Nils Renard Budapest, Collegium Eötvös, le 10 mai 2019.

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Les auteurs

Kinga Csizmadia

Formation initiale des professeurs de FLE et de hongrois, 4e année

Imaginez un château vétuste sur les pentes du mont Gellért. Au sous-sol, une cellule monacale ornée d’étagères avec des livres improbables. Des doubles fenêtres qui laissent entrevoir l’obscurité de la nuit qui tombe. Rassemblés autour d’une table, semblables à des moines d’un scriptorium : les étudiants de l’Atelier Sauvageot. Dans ce coin perdu de Budapest, nous nous retrouvons, chaque semaine, pour promener notre esprit, sur douze pieds, dans un paysage littéraire. L’angoisse de la feuille blanche fait table rase des souvenirs confus de la journée. Une promenade solitaire, solidaire, avec des mots, le silence, le grésillement de la lampe autour de laquelle un papillon nocturne gravite, fasciné par la lumière.

Si, comme le dit Mallarmé, « tout, au monde, existe pour aboutir à un livre

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», celui-ci recèle un monde dans lequel les empreintes d’une promenade poétique sont inscrites. Si la littérature a pour mission de garder la mémoire, nous avons confié à ces pages l’écho de nos pas. Dans cet espace hors du temps, chaque instant s’éternise. Nous invitons le lecteur à cette halte : il saura lire entre les lignes le portrait fidèle de notre visage.

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Les auteurs

Jakab Daróczi

Formation initiale des professeurs de FLE et de hongrois, 2e année

On peut utiliser de grands mots ou des métaphores bien composées. Mais j’ai toujours été l’homme de la simplicité. J’ai toujours essayé de réduire le nombre de mes mots au strict nécessaire. J’ai succombé dans cette lutte plusieurs fois, mais ce fait ne m’a jamais empêché de réessayer. Et le meilleur moyen pour pratiquer la restriction de nos mots est la poésie.

La poésie est un voyage. Un voyage assez effrayant parce qu’on peut rencontrer tous les personnages qui habitent dans notre tête. C’est un voyage où on cherche la quintessence de n’importe quel sujet, parce que la poésie peut utiliser tous les sujets. Mais pendant cette recherche, on doit faire face aux obstacles inattendus et difficiles qui peuvent nous rendre désespérés. Et, en même temps, on a souvent tendance à penser qu’on a trouvé ce qu’on cherchait, et on s’arrête. Mais, en général, c’est le moment où il faut vraiment continuer notre chemin, car jusqu’à la vraie solution, la quintessence indiscutable, on doit faire seulement quelques pas.

Le petit livre que vous tenez dans vos mains est le résultat

d’une telle recherche. On a essayé de faire face à nos obstacles,

et j’espère pouvoir dire qu’on a gagné plus souvent qu’on n’a

perdu. C’était un voyage intéressant et unique pour tout le

monde. Et j’ai eu la possibilité d’y participer.

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Veronika Farkas

Licence en études françaises, 4e année

Elle se méfiait, pendant une dizaine d’années, de la poésie.

Pourquoi autant d’images déprimantes peintes avec des mots solennels dont le sens profond reste un mystère – du moins, pour une petite fille en quête de connaissance et… de joie (comme tous les jeunes, rien d’extraordinaire), se demanda- t-elle très souvent. Parfois, elle ne comprenait pas le message caché derrière ce rideau de tissu obscur d’expressions vagues.

Ce qui devint clair en général à première vue, c’était la prédominance de la souffrance, du malheur comme « idées habituellement exprimées » par les poètes depuis des siècles.

Détrompez-vous, elle ne niait pas du tout la valeur artistique de la poésie, elle était bien capable, en effet, de distinguer le niveau stylistique d’avec le niveau sémantique.

Puis, en septembre 2018 tout changea (ou presque,

puisque évidemment, les poèmes écrits il y a cent ans ou trois

cents ans ne changèrent point, mais l’angle sous lequel nous

étudiions la poésie française et surtout, l’ambiance dans laquelle

nous le faisions) : en effet, entre les vieux murs – couverts de

livres presque aussi vieux – du Collegium (qui lui est très cher),

un voyage imaginaire commença, une promenade loin d’être

solitaire, une promenade poétique pleine de rires et de

découvertes, une création commune, des échanges culturels,

l’expression sincère de sensations, de pensées intimes, sans peur

d’être jugé par les membres de l’Atelier, au contraire, c’était

(21)

Les auteurs

C’est nous-même qui sommes cachés derrière les lignes.

Quant à elle, elle s’efforça toujours – soit d’une manière consciente, soit malgré elle – de faire en sorte que l’espoir – souvent, sous forme d’un petit rayon de soleil – apparaisse dans la plupart de ses écrits. Il est indéniable que les mots ont du pouvoir : créateur ou destructeur, l’Histoire en est une preuve, mais surtout, notre monde actuel dans lequel l’arme la plus puissante des télécommunications est la parole, si elle a l’occasion de faire entendre sa voix sur la scène du monde, elle veut créer, faire réfléchir, elle veut partager un sourire, au lieu d’exprimer des douleurs réelles – ou pire – imaginaires. Ne lisons-nous et n’écoutons-nous pas assez de paroles, ne voyons- nous pas assez d’images chaque jour qui dévastent notre cœur ? Pourquoi ne pourrions-nous pas exprimer par la poésie autre chose que la douleur ? De quoi avons-nous le plus besoin : d’un voile sombre devant nos yeux ou du soleil qui nous éclaire ?

Fanni Filyó

Licence en études françaises, 3e année

Je ne préfère pas révéler l’arrière-plan de la poésie. Je laisse plutôt le lecteur l’imaginer. Parce qu’en effet les arts n’expliquent pas le travail en amont, ils ne donnent que le fruit.

Imaginez, vous mangez une pomme : comment en est le goût

quand vous savez qu’elle a été transportée avec des péripéties

dans le magasin ? Et quand vous ne le savez pas, vous imaginez

seulement comment elle peut avoir un goût si délicieux. Eh

bien, c’est dans l’imagination que se croisent le lecteur et le

poète, non pas dans l’univers explicité.

(22)

Blanka Halápi

Licence en études françaises, 1ère année

Je ne suis ni poète, ni artiste. Je suis curieuse avant tout.

Je ressens cette immense soif de savoir, cette chasse infinie de la vérité et je ne peux pas me débarrasser du besoin instinctif de la création. Je suis pour toujours à la recherche de quelque chose qui me dépasse. J'échoue, je recommence. Rien n'est jamais sur le point d'être terminé. Tout est en évolution – nous reconstruisons, formulons, réduisons, détruisons sans cesse.

Moi, je n'ai que mes rêves à offrir. Peut-être que je vois des choses dont personne ne s'aperçoit? Peut-être que tout ce que je pense, sens, découvre et reflète n'est que l'ombre pâle d'un monde invisible, une expérience commune dont je fais partie?

Peut-être que ce n'est que de la répétition, je ne fais que raconter d'anciennes histoires de nouveau. Peut-être que personne ne s'y intéresse, peut-être que cela a peu d'importance.

Ce que je sais, c'est que pour moi, c'est essentiel.

Nils Renard

Lecteur de français au Collège Eötvös József ELTE en 2018-2019, et élève normalien agrégé d’Histoire (lauréat 2018), a dirigé le travail de l’Atelier Sauvageot, en parallèle de ses recherches en Histoire.

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Les auteurs

Kinga Sümegi

Formation initiale des professeurs de FLE et d’anglais, 3e année

Csillag Tarnai

Études japonaises (majeur), études françaises (mineur), 1ère année

Ce n’est pas difficile de se sentir solitaire dans un monde assez vaste et en même temps assez personnel et minuscule. On se perd en jouant à cache-cache avec soi-même dans le forêt décevante de la construction tremblante de ce qu’on appelle le Soi mais on est tout aussi perdu en se bousculant parmi les lumières oscillantes et lointaines des autres personnes. Le monde semble souvent assez froid quand on attend aux bords de l’univers saupoudré par les fragments fragiles de l’amour.

Mais quelquefois, le monde a tendance à nous surprendre en fournissant les plus belles opportunités inattendues. Les belles citations françaises, les rires qui ne cessent pas de tinter même après que le son s’est déjà tu, les yeux pleins d’amour, de chagrin et d’espérance, une atmosphère magique dont les traces sont gardées par les mots gravés dans le corps du papier vierge.

Un voyage, une séparation, une retrouvaille à chaque fois.

J’ai tricoté un manteau des soirées passées avec l’Atelier

pour me réchauffer quand le vent chuchote trop fortement parmi

les étoiles.

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I. « Je suis poète, mes talents sont nombreux »

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I. « Je suis poète, mes talents sont nombreux »

Kinga Csizmadia : Art poétique

À Csillag

Je suis poète, mes talents sont nombreux, disent-ils. Pour moi, chaque instant est comme le premier ; au petit-matin, j’assiste à la création du monde. Je m’étonne que les saisons se succèdent, que les choses naissent et périssent. Mes amis restent des étrangers et les étrangers que je côtoie sont des amis inconnus. Dans mon enfance, mes jeux étaient sérieux et je ne cesse de jouer en étant adulte. Je ne comprends pas les « bonjours » et les « comment vas-tu ? », mais les yeux d’un chien me parlent. Le soir, j’ai peur de la mort de ceux que j’aime mais pour moi, la mort n’est qu’une autre aventure. La feuille blanche connaît la trace de ma main comme la cage d’escalier conserve l’écho de mes pas. Je suis poète, disent-ils, mais eux aussi, qui voient et qui respirent, sont des poètes qui s’ignorent.

Jakab Daróczi : Je suis poète, mes talents sont nombreux...

Je suis poète, mes talents sont nombreux, J’ai les yeux pour me détourner et regarder, J’ai les oreilles pour être sourd et écouter, J’ai les bras pour repousser et embrasser, J’ai les mains pour frapper et caresser,

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I. « Je suis poète, mes talents sont nombreux »

J’ai les pieds pour rester et m’en aller, J’ai le corps pour mourir et vivre,

J’ai ma conscience pour douter et accepter, J’ai l’âme pour détester et aimer,

J’ai la mémoire pour oublier et me rappeler, Et j’ai la bouche,

La bouche pour parler.

Veronika Farkas : Je suis « Poétesse »

Je suis Poétesse, mes talents sont nombreux, Pour moi, écrire, c’est comme voyager Dans un monde mystérieux.

C’est un monde bien particulier, Difficile à comprendre, certes, Mais grâce auquel je peux oublier, Oublier les soucis quotidiens

Puisqu’ici, c’est mon imagination qui règne.

Comme je le sais, beaucoup d’entre les meilleurs ouvrages de l’histoire ne sont pas nés quand celui ou celle qui les avaient créés voyait la vie en rose. Moi, je ne suis pas du tout une grande écrivaine, mais écrire, c’est souvent un remède pour moi aussi ;

Quand les émotions s’accumulent, Quand je ne veux plus parler à personne,

Quand la solitude devient ma meilleure compagnie, M’exprimer par l’écriture,

C’est ce qui peut m’apaiser.

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Le papier ne me juge pas,

Même si mes mots et mes rimes sont fort simples.

Le stylo veut rester dans ma main, Je commence une nouvelle ligne,

Comme celle-ci, et voilà, les pensées viennent l’une après l’autre ; Quelque chose de nouveau naît

Que je crée moi-même.

Ainsi, je vois ma confiance en moi revenir, je me redresse et je continue à…

Écrire.

Blanka Halápi : Je suis poète, mes talents sont nombreux...

Je suis poète, mes talents sont nombreux,

j'essaie de montrer plus que ce que je vois avec les yeux.

Mes visions sont sûrement des illusions ni justes, ni vraies – plutôt des rêves du monde et de mon existence.

Les mots ne sont que des outils, ils sont complètement vides jusqu'à ce que quelqu'un les lise et leur donne du sens.

Peut-être que je peux lui ouvrir une fenêtre sur une autre dimension

et lui faire sentir que tout est en union – l'union éternelle dans le temps congelé...

(29)

I. « Je suis poète, mes talents sont nombreux »

C'est trop que je désire

mais si je peux faire quelqu'un oublier, vivre, respirer et penser,

cela suffit pour que ma vie ne soit pas en vain...

Et si personne ne m'écoute ? Et si personne ne me comprend ? Et si ce que je dis n'est pas important ? Peu importe.

Enfin, la vie – qu'est-ce que c'est? – n'est plus qu'un joli rêve.

Morten Nissen : Je suis poète...

Je suis poète,

Mes talents sont nombreux, Je vis dans une cage, J’écris des poèmes, J’envoie les messages, Je les jette sur la mer, Je suis poète,

Mes souffrances sont nombreuses, Il n’y a pas une vie plus malheureuse.

Les autres ont des talents – des cadeaux Mais j’écris pour moi et pour eux, Ah, c’est un fardeau.

(30)

Kinga Sümegi : Je suis poète, mes talents sont nombreux...

Je suis poète, mes talents sont nombreux, Je peux faire rire et penser les autres.

Je m’adresse à tout le monde, bref, A tout le monde qui me lit,

Je cherche à changer les choses Avec rien d’autre que des mots écrits.

La joie de mes lecteurs est Ma joie à moi – pas la même, Mais ce que je ressentais autrefois.

Mes mots peuvent agir

Mieux que moi, qui ne possède comme outil Que de dessiner mes pensées, je crois.

J’espère, mais je ne peux savoir, Si mes mots aideront les autres à voir Plus clairement et plus précisément Les choses qu’ils veulent observer

Dans ce monde courant des idées perturbées.

Mes poèmes sont des remèdes… Des autres ? Je sais pas.

Mes remèdes, certainement, quand je les écris Et j’espère qu’ils me sauveront de l’oubli.

(31)

I. « Je suis poète, mes talents sont nombreux »

Csillag Tarnai : Je suis poète, mes talents sont nombreux...

Je suis poète, mes talents sont nombreux Je vois la merveille à la danse des étoiles Et le vent fort me raconte des histoires Pour rester poète, il faut être courageux Car en écrivant des mots, la nature est mutilée La langue est source de malentendus

Le silence nous rend séparés et tendus Et quelquefois, je ne peux que crier Je n’arrive pas à finir une seule phrase En créant, je détruis tout ce qui est né Je ne peux pas écrire cette destinée Pourtant, je crois, je suis la peur sage Je vois les secrets du silence et du cœur

Et toutes les souffrances d’homme sont les miennes Mais je ne peux pas te libérer des tiennes

Mon pouvoir reste à la danse, au silence et aux jeux Assieds-toi à côté de moi ;

Écrivons des choses éternelles7, Et quand rien n’est clair

On rit et on s’embrasse, en disant n’importe quoi

7 Antoine de Saint-Exupéry, Le Petit Prince, Édition du groupe « Ebooks gratuits », 1943, p. 64.

(32)

II. La ville

Kinga Csizmadia : Budapest, Statue de la Liberté

À Nils

À l’aube, la ville est encore habillée en brouillard. Du haut de la montagne, tu observes cette voie lactée qui s’étend à tes pieds. La nuit, tu n’as point fermé l’œil. Petit à petit, les premiers rayons du soleil chassent la brume qui entraîne avec elle le sommeil des habitants. Tandis que tu observes le ruban argenté du fleuve qui sépare en deux cette carte en relief, des oiseaux te rendent visite et s’installent sur tes épaules. Tu promènes ton regard guidé par les ponts sur un paysage auquel la lumière du jour redonne ses couleurs habituelles. Vers midi, le bourdonnement de cette fourmilière te fait oublier le chant des oiseaux. Tu te réfugies, immobile, à l’ombre de ta feuille de palmier que le vent essaie vainement d’agiter. L’après- midi, tu assistes au changement de décor rituel : les nuages prennent des couleurs rougeâtres et les fenêtres de la ville s’enflamment tout d’un coup. Tu appelles à l’aide : l’obscurité tombant du ciel vient calmer cet incendie. Le firmament nocturne se réveille : il ouvre ses innombrables yeux qui trouvent leurs jumeaux exilés dans les réverbères. Arrivent pour toi les heures de la solitude des souverains : abandonnée et entourée par une ville entière, tu as été et seras toujours libre.

(33)

II. La ville

(34)

Jakab Daróczi : Bonjour mon amour !

Bonjour mon amour ! Comment vas-tu ? Moi ? Je suis perdu.

Je t’ai quitté et tu as changé.

Je ne trouve pas les arbres au bord de ton fleuve.

Je ne trouve pas le parc où j’ai lu.

Je ne trouve pas les rues où je me suis baladé.

Je ne trouve pas mes amis.

Tu as beaucoup changé, mon amour.

Tes vieux miracles, où sont-ils ?

Pourquoi tes bâtiments sont-ils si petits ? Pourquoi ta promenade est-elle si ennuyeuse ? Où est mon banc préféré ?

Et moi, où suis-je ? Je m’arrête dans ton cœur, Dans ton nouveau cœur, Moderne et élégant, Et je suis perdu.

Tu m’as quitté, mon amour.

(35)

II. La ville

Flóra Farkas : La promenade ruminative Les escaliers Mont-Gérardiens

dessinés par les lumières oranges, où le ciel et l'enfer se mélangent, mon Dante, cependant qui ne sent rien, à côté de toi ce Virgile triste vient, sachant mieux les explications, toutes les infernales complications, nous descendons. Ce cerveau flamboyant,

dans lequel nous, qui sommes ensemble, guérissons mes blessures; nous accompagnons les hérissons, entre les feuilles, qui marchent sans soucis, mais quelquefois ils ont peur aussi,

quand cette promenade profonde, nous la finissons Je porte en moi leur cœurs qui battent, visibles ici.

Veronika Farkas : Envie de partir

Voyager, découvrir des mondes lointains, Je veux partir, toute seule, disparaître soudain.

Endroits magiques, hautes montagnes, cascades sauvages, Faites-moi rêver, soyez mon Espoir,

Dans les moments difficiles, ô, Beaux Paysages !

(36)

Forêts vertes, fleurs de mille couleurs, Chemins cachés,

Inconnus, Mystérieux,

Non ! Je n’ai pas peur !

En effet, il faut oser partir, Oublier tout chagrin, S’enrichir,

S’enfuir, car les jours se ressemblent Tous… trop…

Et je souffre et je repense Au passé, aux blessures…

S’envoler, comme un oiseau libre,

Vivre des aventures comme dans les livres – c’est ce que je désire au fond du cœur – Avant qu’arrive la dernière heure, Parce que chaque minute est précieuse

Sur cette terre, dans cette vie – ô, oui, je suis chanceuse ! Cependant, sache que c’est à toi de la rendre belle, De garder la foi,

De ne jamais abandonner et, De pouvoir bien décider !

(37)

II. La ville

Blanka Halápi : Souvent, quand le sommeil m’évite...

Souvent, quand le sommeil m'évite mais mon esprit libre quitte ses murs, sa cage insupportable je rêve en étant réveillé

et des images diffuses remplissent la nuit longtemps foncée

Je rêve d'un monde mystérieux que personne n'a jamais vu qui n'était même pas réel n'est plus qu'un enfant naïf de mon imagination turbulente

Le lieu où l'harmonie règne où les âmes ne sont pas en peine et ce qui ne compte pas

c'est « le mien » ou « le tien » parce qu'on partage la joie la tristesse et la souffrance

et la possession n'a pas d'importance Personne ne se dépêche

ou collecte de la fortune Tous sont capables de rejoindre le moment

en donnant

aux autres ce qu'ils peuvent

(38)

L'ennui, le besoin et le péché n'entrent pas dans ce paradis

car les gens travaillent et apprennent ce dont ils ont vraiment besoin.

Les hommes sages conduisent le peuple,

eux qui ont toujours en vue l'intérêt de ceux

qui ne sont pas eux Et comme ça, la richesse et le bonheur

dans les cœurs apparaissent

Les esprits sont allumés pour savoir que l'égalité peut être dans la diversité.

(Ce monde ne viendra-t-il jamais ou est-il temps que l'on agisse ?)

(39)

II. La ville

Klaudia Illés : L’arrivée du printemps, une belle floraison...

L’arrivée du printemps, une belle floraison, Pas de nuage dans le ciel ciel, doux comme le miel On est tout au début des temps, bonheur sans raison, Le monde entier est tout proche du ciel.

Les gens chantent un peu partout Mais un jour tout changera L’harmonie se perdra Comme si un loup Avait mangé Le soleil.

Tout au centre de la ville La malice envahit les âmes Ils sont tous coupables Hommes et femmes.

Le soufre, le feu tout consumera Sodome, tu disparaîtras.

(40)

Kinga Sümegi : Balatonszéplak-alsó Ma petite ville, elle n’est pas en France

C’est le paradis de presque toutes mes vacances La grande source de mes souvenirs d’enfance Une petite île où n’existait pas de souffrance Elle est à côté de la mer de Hongrie

Pleine de maisons où tout le monde rit Si je ne me baigne pas alors je lis

Toute allongée et en mangeant dans mon lit Ici habite ma plus chère amie

On s’y promène presque chaque nuit L’été, comme ça, elle s’enfuit très vite L’été, elle passe mais restent les souvenirs Mon cher Balatonszéplak-alsó

Pour moi, tu es la plus belle des villes

(41)

III. Poésie en vers

(42)

III. Poésie en vers

Kinga Csizmadia, Klaudia Illés : Cette chronique secrète et volumineuse...

Cette chronique secrète et volumineuse Recèle l’histoire fameuse et lumineuse D’un légendaire bon roi qui a mérité L’admiration de tous par sa témérité Le Royaume pleure à cause de son absence Ayant perdu pour toujours son unique essence Ce roi qui fut vainqueur de fameuses contrées Monta sur un papillon qui l’a emporté.

Veronika Farkas, Blanka Halápi, Csillag Tarnai : Trois demoiselles – une création

Des feuilles de mille couleurs couvrent les chemins Peut-être oublierai-je mes chagrins

Je trouve enfin ce que je cherche demain En effet, je veux partir loin,

Très loin.

(43)

III. Poésie en vers

Les vallées où j’ai trouvé mon courage, La plage où je l’ai demandée en mariage…

Mon Amour, je vois encore ton visage.

Ô, ma Jeunesse, mes Mémoires, ô ces belles images ! Adieu !

Dans mon cœur se réveille un nouvel espoir.

Enfin, se termine ce terrible soir.

Je laisse partir mon Passé Et j’ose croire

Que mes rêves ne sont pas illusoires.

Au revoir !

(44)

IV. L’automne répond au poète

Veronika Farkas : L’arrivée de l’automne

Les feuilles dorées chuchotent et chantent Des chansons d’adieu tristes, ensemble, Avant l’agonie sombre de l’automne Qui va s’emparer de ce monde Bientôt.

Le soleil s’éloigne De la terre hivernale, Laissant la place

Au règne du temps épouvantable.

Les pluies glacées viendront Et nous oublierons

Les petites pluies rafraîchissantes Dans la chaleur brûlante

De l’été.

De tristes nuages gris couvriront les cieux Et, admirer la lumière et le ciel bleu,

Ce sera le privilège des avions et des oiseaux Qui s’envolent, libres, vers les pays équatoriaux.

(45)

IV. L’automne répond au poète

Chacun des flocons de neige est unique, Chacune des fleurs de givre est magnifique, Et quand le vent siffle

C’est déjà comme une musique : Une musique lente…

Est-ce que tu l’entends ? Sur les quais du Danube,

Les passants marchent, silencieux…

Je ne vois que des fourrures blanches ou noires, Les gens, cachés derrière les chapeaux et les écharpes, Ils se baladent, ils attendent ou se hâtent… quelque part.

D’où viennent-ils ? Ils vont où ?

Parfois, ils ne lèvent même pas les yeux

Et ne voient pas la beauté qui est autour d’eux...

Mais le printemps va arriver enfin,

Et les visages apparaissent soudain, sincères, Souriants, car l’amour et la passion renaissent Avec la Nature qui, lentement, se réveille.

(46)

Blanka Halápi : L'apologie de l'automne

Mois, je suis la solitude incarnée dès le début du temps, j'ai été prédestiné à apporter le chagrin, la mélancolie, à faire tout souvenir

de la fuite de la vie C'est ma prison éternelle que je ne peux jamais quitter si je perdais tout cela

je cesserais d'exister Ne crains rien

je suis mortel dans mon immortalité je ne désire qu'un peu d'espoir et quelques éclats de gaieté.

Csillag Tarnai : Chanson d’automne

Le temps passe et nous sommes tous les victimes de cette jolie fille cruelle. Le cercueil est presque prêt et les rêves froids et éternels t’attendent. Mes pieds sont assez lourds, mon ami, du crime dont je suis accusé mais que je n’ai jamais commis. N’aie pas peur, car mon étreinte peut sembler être un cage mais la liberté de l’hiver te coûtera ton âme. Je suis aussi une victime, mais je ne peux pas chanter ou crier; il faut que je fasse mon travail en silence et en pleurant pour toute l’éternité.

(47)

V. Poèmes en prose

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V. Poèmes en prose

Kinga Csizmadia : Fermez ce livre...

Fermez ce livre.

Regardez le soleil qui se lève et se couche toujours à la bonne heure, comme un servant fidèle.

Regardez les montagnes qui deviennent vallées en s’agenouillant et plaines en se couchant.

Regardez les arbres qui s’habillent en vert au printemps, en orange en automne et qui laissent tomber leur manteau en hiver parce que la terre a froid.

Écoutez la pluie : il pleut, il pleure comme un enfant abandonné parce que le monde, il est seul au monde.

Écoutez les battements d’ailes des oiseaux, l’écho des intermittences de votre cœur.

Écoutez le vent souffler : il fait chanter les bois.

Regardez les vagues qui s’évanouissent sur la plage.

Écoutez les vagues qui gémissent sur la plage.

Regardez les vagues qui s’évanouissent en gémissant sur la plage.

Écoutez les vagues qui gémissent en s’évanouissant sur la plage.

Poésie de la vie, poésie du monde – et tout le reste est littérature.8

(49)

V. Poèmes en prose

Veronika Farkas : Le poème…

C’est comme un fleuve sauvage, Indomptable,

Qui cherche lui-même Son chemin,

Qui le creuse profondément Dans la terre,

Sans cesse, Sans pitié,

Il emporte même les pierres D’une vitesse stupéfiante Il les emmène

En ce voyage mystérieux, irréversible

Dont la destination finale est encore imprévisible.

Les mots…

Ces petites gouttes d’eau, ils veulent couler libres, sans barrières, Ensemble,

Sans règles sévères.

Aujourd’hui donc, chers Poètes, chères Poétesses, Nous devons libérer le poème de ses chaînes ; Des rimes imposées,

De la tyrannie de l’alexandrin, Et, surtout,

Des jugements immédiats qui n’épargnent ni forme, ni poète, ni création.

(50)

En effet, ce qu’il faut défendre ce sont tous ces chefs-d’œuvre que nos artistes nous donnent et qui valent, tous, de l’or.

Blanka Halápi, Csillag Tarnai: Qu'est-ce que c'est, que la poésie?

La poésie est la poésie,

comme une rose est une rose est une rose.9 Pourquoi un vrai poète

ne supporte-t-il pas les règles ?

C'est une puissance incommensurable, l'inspiration, qui l'envahit comme une vaste inondation

plus forte que l'homme qui tente de lui donner une forme

A quoi ça sert de suivre un chemin qui ne donne aucune rédemption d'essayer d'encadrer l'inexprimable par les limites illusoires – périssables des langues.

En se libérant des mots

qui circulent dans nos cerveaux on s’approche de mieux en mieux de la vérité qui est déguisée dans le néant

A la fin, il ne reste que du silence.

(51)

V. Poèmes en prose

Renions la parole et l'écriture et restons muets dans le futur.

(52)

VI. Personnages littéraires

Kinga Sümegi : Je ne t’aime pas si tu es mon père...

Je ne t’aime pas si tu es mon père.

On t’attendait chaque année

Mais pas parce qu’on voulait te rencontrer Bon, pas comme ça, si ce n’est pas vrai Tu n’existes pas et c’est moi qui suis désolée.

Pendant longtemps j’étais curieuse

Mais ça a été un choc et je suis devenue furieuse Un choc absolu: tu n’es que mon père!

Et tu étais mon père pendant toutes ces années.

Il faisait sombre et j’avais sept ans C’était une longue nuit de décembre Quand mon frère et moi, on a découvert Ton secret. Bon, maintenant je sais Qu’il l’avait déjà découvert avant.

Mais pour moi, ça a été douloureux Je m’attendais à des rennes, A un traîneau et à toi aussi…

Mais pas comme ça !

Tu aurais dû porter des vêtements rouges

Et ta longue barbe blanche… est aussi un mensonge Cher Père Noël! Le chocolat c’est gentil, mais Je ne t’aime pas si tu es mon père.

(53)

VI. Personnages littéraires

Blanka Halápi: L'idiot saint

Tu es tombé sur Terre

une personne toujours étrangère Tu étais la clarté,

un rayon de soleil plus qu'un humain et quand même inférieur sans prendre conscience de ta valeur

le monde n'était pas prêt à s'apercevoir de ta pureté

« Idiot! Fou! Retardé! » – c'est ce qu'ils disaient parce qu'il avaient peur de s'avouer que c'étaient eux pleins de péchés et d'erreurs Tu ne comprenais rien la seule chose qui t'a stupéfié la misère,

la souffrance et tu voulais aider

En leur donnant ton âme et ton cœur Mais ils étaient égoïstes, orgueilleux Leur monde rigoureux

étroit, froid, superficiel t'a brûlé

t'a brutalement consumé leur crasse ne pouvait pas

(54)

obscurcir ta lumière Tu es monté au ciel.

Ton esprit d'enfant n'a pas pu supporter la peine et l'ignorance l'indifférence des autres

Tu étais abandonné Il fallait t'en échapper Donc tu as créé un univers idéal dans ta tête perplexe Enfin, personne ne supporte que quelqu'un soit si innocent tellement mieux et supérieur à eux pourtant humble et généreux – Comme ça tu as disparu quand même survécu dans notre mémoire comme l'idéal.

Csillag Tarnai : Estragon et Vladimir On attend la fin du monde

On attend pour toute l’éternité

On attend quelqu’un qui ne vient jamais On attend un peu de clarté

On attend un chemin

qu’on peut suivre main dans main On attend le sauvetage

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VI. Personnages littéraires

sans vouloir mourir On attend la vie sans pouvoir vivre On est attachés à un rêve

dont l’existence n’a jamais été vérifiée.

Tout ce qui reste, c’est l’espoir d’être trouvés.

On trottine, on tombe, on meurt et qui sait si l’on se réveille vraiment le matin ?

On ne vit que dans une existence stérile et lointaine En attendant quelqu’un qui ne vient pas.

J’attends quelqu’un qui ne vient pas.

(56)

VII. Prose poétique

Kinga Csizmadia : À Judit

Si tu devais mettre en scène qui tu es, tu procéderais par la théologie négative en présentant tout ce que tu n’es pas : écrivaine, musicienne, peintre.

Le livre que tu n’écriras pas se développe autour de cette situation initiale : après être montées au sommet de la montagne Gellért, nous nous asseyons sur un banc en tournant le dos au paysage. Devant nous, un rocher s’élève vers le ciel. L’important, c’était le chemin.

Enfin, nous pouvons discuter.

Les branches squelettiques des arbres défeuillés attrapent tes paroles suspendues dans l’air. Sur la toile bleue du ciel se dessine le mirage des contours carrées du château de Buda, comme une falaise norvégienne. Le tableau s’estompe sous notre regard. La lumière s’évanouit, le chagrin nocturne des étoiles se déploie dans l’espace.

Où que tu ailles, ces espaces infinis seront éternellement silencieux.

Derrière tes paupières closes les cadrans du soleil et de la lune se succèdent. De quel astre es-tu tombée sur terre pour avoir la nostalgie d’un ailleurs ? Tu ne sortiras jamais du ciel qui te contient.

Le livre que tu n’écriras pas a une reliure tissée de jours et de semaines. Ses pages ne sont pas numérotées et on peut le lire même à l’envers. Le début et la fin des chapitres se déplacent, la narration se prolonge lorsque l’histoire s’arrête. Le livre s’écrit au fur et à mesure que tu respires. Si jamais tu te perds dans la lecture, je remettrai

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VII. Prose poétique

Csillag Tarnai : Prose poétique sur le lac Balaton

Et voilà ! On se rencontre à nouveau. Tu t’es rajeuni comme toujours en restant plus vieux et plus sage que les mots et le temps. Je te regarde. Sans son, sans mouvement, insensible comme les étoiles et froid comme la solitude du matin, je te regarde.

Tu t’avances et tu te recules d’un pas – comme un chat enjoué dans le jardin ensoleillé ; comme la mort patiente et inévitable qui m’attend avec un sourire significatif sur des lèvres froides.

Indomptable, inchangeable, éternel. Tu ne t’intéresses pas aux affaires des humaines, petites flammes qui sont destinées à s’éteindre ! Et tu m’as fait croire que tu m’avais aimé, un nouveau-né encore plein d’espoir.

Je t’ai pleuré tous mes chagrins, tu m’as toujours consolé quand je n’arrivais pas à échapper au suspense du devoir de vivre, tu m’as fait endormir en me berçant et j’ai rêvé de la certitude et des mirages de ta vie éternelle. Je croyais que tu m’aimais.

Mais il a fallu que je me trompe. Un nouveau-né encore une fois, trop aveugle pour voir que je n’étais pour toi qu’une tache obligatoire.

Et quand même, lors des nuits froides et sans étoiles quand j’ai besoin d’un peu d’amour, je vais te voir.

Et voilà ! On se rencontre à nouveau la dernière nuit de ma vie.

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Une fois, je suis arrivé, le visage rouge, et je t’ai maudit pour toute l’éternité et tu n’as pas répondu ! Il m’a fallu réaliser qu’un éternel n’avais pas d’émotions et que je n’étais qu’un jouet pour toi.

Et c’est la dernière fois que je viens. Je te dis adieu, je pars ce soir.

(59)

VIII. Poèmes inspirés par des images de Paris

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VIII. Poèmes inspirés par des images de Paris

Veronika Farkas : L’agonie de l’hiver et le triomphe du soleil Le ciel est couvert de nuages, le ciel de Paris,

De cette vieille ville qui a l’air particulièrement lugubre aujourd’hui.

Le brouillard – que quelques rayons de soleil percent çà et là – étreint la tour Eiffel.

Les arbres, nus, silencieux, en attendant le printemps s’abandonnent au sommeil sur le quai.

La Seine, elle, comme si elle ne se rendait même pas compte du changement des saisons,

Elle poursuit son chemin, lentement, paisiblement, depuis des siècles et des millénaires.

Oh, combien de Parisiens se sont aimés et se sont tués, combien d’histoires, réelles ou imaginaires

se sont passées

sous le ciel de la Ville Lumière.

L’air est encore froid, ce sont les dernières semaines de l’Hiver.

Les troupes d’avant-garde du Printemps assiègent les derniers remparts de son prédécesseur. Depuis quelques jours, l’agonie de l’Hiver devient de plus en plus ensoleillée.

Et petit à petit, le Soleil reconquiert Paris.

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VIII. Poèmes inspirés par des images de Paris

Csillag Tarnai : J’ai visité Paris...

j’ai visité Paris pour rencontrer mon plus grand amour, la mort

on s’est regardé dans le blanc des yeux dans le musée

à travers la cavité orbitaire d’un dinosaure à la fête de la mort, à la fête de la mémoire à la fête de toi et moi

on a rigolé ensemble en sautillant sur les étoiles du fleuve

grinçant du temps ;

les promesses froides et inutiles des amoureux de demain

elle m’a acheté un souvenir pour les touristes

« Musée d’Orsay » il a dit pour me faire comprendre que je ne suis qu’une réplique, une variante d’une vie déjà finie mais même la mort a sa beauté

si tu tends une oreille attentive à ses pas jumelle de la vie, patrie de tous

les amoureux des âmes et lorsque je lui demande :

est-ce que la vie est contente de vous ? elle me répond:

elle m’a cherchée partout

sans savoir que c’était moi qu’elle a cherchée

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Csillag Tarnai : Qu’est-ce qu’une sculpture ressent...

Qu’est-ce qu’une sculpture ressent

quand elle voit son image réfléchie dans le miroir de l’eau ? La frustration.

C’est comme si c’était le destin cruel

qui l’a condamnée à ne regarder qu’elle-même pour toute la vie. C’est l’ennui, c’est la monotonie, c’est la souffrance.

La souffrance d’être vue tout le temps par les yeux des inconnus, d’être vue mais de ne pas pouvoir regarder.

D’être sa seule amie, son amie et son ennemie, de voir tout le temps son corps qui a été fabriqué par des mains froides et étrangères, dont le cerveau ne connaissait jamais les souffrances de l’immobilité, le cerveau qui lui a donné sa forme.

Sa forme éternelle, son image torturante.

La tristesse.

L’absence de la possibilité de bouger, l’absence de la possibilité de changer. L’absence de la vie.

Les saisons changent, l’entourage change, l’eau change.

Son image réfléchie reste. Sa souffrance reste.

Elle reste la même.

Je ne peux regarder que mon visage et

les fautes et les souffrances gravées sur sa peau et sur mes mains.

(63)
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IX. Chute de poèmes et poèmes à chute

Csillag Tarnai : Le secret de la chute

Il y a une certaine gloire dans la chute.

Je te vois voler avec les voiles et les ailes de la volonté exaspérée et de la soif inextinguible.

Je vois la faim dévorante dans tes yeux, la détermination

de la personne qui a déjà surmonté son humanité et qui est prête à le faire encore une fois.

Tu te dis : « Le juste milieu est pour les humains – le ciel est le domaine de la gloire divine. »

Et alors, tu voles.

Vers un domaine sacré, vers un monde longtemps désiré ;

vers le pays perdu, vers le grand retour à la maison.

Et alors, c’est la tragédie de l’humanité.

« Ce que les mouches sont pour des enfants espiègles, nous le sommes pour les dieux :

ils nous tuent pour leur plaisir. »10 C’est la chute solitaire et majestueuse d’un dieu fabriqué par lui-même.

(65)

IX. Chute de poèmes et poèmes à chute

La seule personne dont le sol ait connu le nom – je vois encore

la faim dévorante dans tes yeux même si personne d’autre ne te regarde.

C’est ce qu’on ne t’a jamais dit : je rirai à ventre déboutonné

avant que les vagues m’aient embrassé.

(66)

X. Poèmes à mots imposés

Blanka Halápi: Ode

L'objet de mes rêves, des anciens siècles si doux et si amers

doux comme l'amour amer comme la perte toi, qui es à la fois la cause et le remède de tous mes bonheurs et chagrins

Mystérieux, trompeur, mélange du ciel et de l'enfer Manifesteur des mirages illusoires

pourtant, tu m'arraches sur terre

Ton sang rouge n'est pas complètement différent de celui qui coule dans mes veines

Ta beauté indomptable

m'évoque la force des sauvages Tu es toujours plein de suspense on ne sait jamais ce que tu caches derrière ta peau rude

soit le nectar des dieux soit l’haleine fétide du diable

Mais enfin, ne me jette pas dans le désespoir, Tout cela était pour toi,

le nec plus ultra,

Ô, cher pamplemousse !

(67)
(68)

XI. Poèmes écrits à plusieurs mains

Le moment où j’ai vu...

Le moment où j’ai vu

mon sang couler dans tes veines j’ai enfin compris

que mes larmes de plomb n’étaient pas si lourdes Ta peau était si transparente qu’elle a reflété

les rayons faibles du soleil tournant – mais non, c’est la Terre qui bouge sauf nous – nous sommes glacés dans le temps

Où sommes-nous ? Sommes-nous ?

Une lumière pâle qui m’aveugle Où es-tu ?

Es-tu ?

Le vent d’hiver qui fait couler mon sang...

il quitte mes veines il me quitte

moi je reste glacé

(69)

XI. Poèmes écrits à plusieurs mains

Je suis

froide, distante épuisée, lente

c’est le Soleil qui me manque.

L’hiver est si lugubre sans la neige blanche.

Cette lumière pâle cette lueur vague elle me tourmente

et d’innombrables images me hantent Cette nuit…

Ma peau devient pâle

et sombre, dans le froid et la nuit.

Je voulais être glacé à côté de toi et tu as souri en me prenant la main –

je me souviens encore de ce sourire, je me souviens du contact de ta bouche –

Le grand mystère.

Comment se souvient-on de quelqu’un qui n’a jamais existé ? Comment un « je » qui n’a jamais existé

se souvient-il d’un « tu » qui est sa trouvaille ? Le secret des pensées inexistantes

d’un cerveau qui n’a jamais existé.

Le secret du temps qui se croit exister

« Je » n’est qu’un mot

« Tu » n’est qu’une promesse

« On » n’est qu’une illusion Reste un rêve pour toujours.

(70)

Quatre fois un, cela fait un poème

Un verre de vin, quelques anecdotes, beaucoup de rire…

A chaque fois que nous nous revoyons, chacun a tellement de choses à dire

Que même si le temps semble s’arrêter Il ne va jamais suffire.

Une amitié, quatre personnes, beaucoup d’histoires.

Nos yeux brillants éclairent le bar,

Nos yeux ; ces petits miroirs de notre âme.

Le chat noir miaule devant la cuisinière, Il a déjà consommé les âmes de ceux Qu’on a maudits hier.

La lune, pâlie, sourit somme si elle savait Le secret de l’ombre qui gémit

Au-dessous de la table En silence…

Il faisait chaud et on riait

Il y a toujours des nouvelles à dire Même après deux cents ans d’amitié.

Et quand le feu s’éteint – il ne reste que des cendres

Les souvenirs autrefois flamboyants – Et les bougies se consomment

Dans la lumière agonisante

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XI. Poèmes écrits à plusieurs mains

Le passé et le spectre des possibilités Que l’on a gaspillées.

Hélas ! Le temps passe En épuisant mes fantômes

Ils boitent dans la lumière qui clignote Oui, ils s’endorment, se lassent, Comme n’agonise plus la lumière Et je ferme les paupières.

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XII. L’invitation au voyage en Francophonie

Poèmes écrits à plusieurs mains : Farkas Veronika, Filyó Fanni, Goburdhun Marine, Halápi Blanka , Tarnai Csillag.

A bord du bateau voile...

A bord du bateau voile Les Phéniciens s’éloignent Chercher des cochenilles De pourpre colore les guenilles

Devant le bateau, c’est toujours l’éternité Il fend les eaux, solitaire,

En hiver et en été.

Un jour il en croisera d’autres Au moins il l’espère, le bateau, Et ils feront une croisière Sur océan, golfe, mer,

J’ai longtemps rêvé d’un voyage Et d’une fleur qui porte mes larmes J’ai longtemps voulu voler

J’ai longtemps voulu oublier En m’approchant du but Je l’entends, le discute Est-ce que je vais trouver Ce que je peux aimer ?

Hivatkozások

KAPCSOLÓDÓ DOKUMENTUMOK

Réponds-moi, mon Adèle, ma bien-aimée, mon adorée Adèle, réponds-moi comme tu répondrais à Dieu; aie pitié de moi, si par bonheur je ne sais quel démon de jalousie

tique, qui est un produit du christianisme perfectionné. L'amour chrétien dans sa forme actuelle est trop naïf pour être pratique. Ne pas appartenir à la société, c'est

pauvre petite Didine. Ta mère me lit tes lettres. Fais-les bien longues. Nous vivons de ta vie là-bas. Moi, c'est à peine si je puis écrire. Je t'embrasse bien tendrement, et

Mais il «a fallu bien des circonstances extraordinaires pour q u 'il fût perm is à un chansonnier de s’ im m iscer dans les hautes questions d'am éliorations

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