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Nemzetközi Hungarológiai Központ XII

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Academic year: 2022

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OFFICINA. H UNC A RICA XII

Politiques Linguistiques en Europe

Nemzetközi Hungarológiai Központ

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officina lu il ig a ricci XII

Politiques linguistiques en Europe

(Actes du colloque organisé les 20-21 novembre 2000 par le Centre Interuniversitaire d'Études Françaises de l'Université Eötvös Loránd de Budapest)

Textes réunis par Yann Foucault

Nemzetközi Hungarológiai Központ

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Sorozatszerkesztő:

Tverdota György

Szerkesztő: Yann Foucault

A kiadást javasolta: Karafiáth Judit (Budapest) Kiadó: Tverdota György

Tördelő-szerkesztő: Princz László Fedélterv: Burján Ildikó

A nyomdai kivitelezés az Akaprint Nyomda munkája Felelős vezető: Freier László

ISSN 1217 4335 ISBN 963 8 4 2 5 15 6

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P r é f a c e

Le Centre International de Hungarologie est un institut qui s'occupe de soutenir et d'organiser la recherche et l'enseignement de la langue et de la civilisation hongroises dans les établissements d'enseignement supérieur basés à l'étranger. En outre, il considère comme une mission importante la publication, dans des langues de grande diffusion, des résultats des recherches des spécialistes qui travaillent à l'étranger ou qui sont locuteurs d'une langue étrangère dans le domaine de la hungarologie. C'est dans ce but qu'a été instituée la série Officina Hungarica, dans laquelle des monographies ayant la hungarologie pour objet et un angle linguistique, ethnographique, littéraire ou historique, ont vu et continuent de voir le jour en langue anglaise, allemande et française. Dans la publication des résultats sciehti fiques une inégalité est produite par le fait que, tandis que des réflexions intégralement développées peuvent voir le jour dans une langue de diffusion universelle, en revanche, en tant que publication du Centre, des études, des essais, des comptes rendus, des articles de controverse plus courts, avec la hungarologie pour thème, ont jusqu'à présent seulement paru en hongrois.

C'est afin de remédier à cette inégalité que nous inaugurons la publication d'une collection d'essais, de recueil d'études qui ont la hungarologie pour objet ou qui ont un rapport avec elle, que ce soit en anglais, en français ou en allemand. Le présent volume, qui est le premier numéro de cette nouvelle série, rassemble les actes d'un colloque organisé au Centre Interuniversitaire d'Etudes Françaises à Budapest.

Pour ceux qui connaissent, ne serait-ce qu'un peu, la situation présente et les perspectives futures de la hungarologie, ou qui sont conscients de l'importance et de l'actualité des questions de politique linguistique, pour ceux-là, il n'est pas nécessaire d'insister longuement sur le bien-fondé de cette entreprise.

Dans le domaine de la hungarologie, le bilan d'environ quinze ans de travail est à l'ordre du jour; u n e évaluation de la situation, un renouvellement des institutions et des approches sont en cours. Les spécialistes du domaine reconnaissent la nécessité, à tous les points de vue, tant théoriques que méthodiques, tant pratiques qu'organisationneis, de rester en prise avec les changements qui s'effectuent en Europe sur le terrain de la diffusion des cultures et des langues. La hungarologie ne pourra être un domaine d'enseignement et de recherche susceptible d'intérêt, vivant et reconnu, avec des relations internationales, que si elle ne se referme pas sur elle-même, mais soulève, désigne et résout ses propres problèmes et remplit ses propres missions en relation avec d'autres cultures, dans un contexte européen et, plus concrètement, d'Europe centrale.

Chacun sait que la magyaritude, en tant que fragment de la mosaïque linguistique et culturelle du bassin des Carpates, est à la fois un agent actif et un sujet passif des événements de politique linguistique.

C'est pourquoi les spécialistes de hungarologie s'occupent intensément des questions qui ont trait à ce domaine. Même si j e regarde en arrière à l'horizon d'une année et que je me limite à mon expérience personnelle des programmes relatifs aux dilemmes de politique linguistique que rencontrent les petites nations, même alors, je peux énumérer de nombreuses déclarations à la fois importantes, surprenantes et bouleversantes, qui portent toutes sur le même sujet : les problèmes de politique linguistique des petites nations. Au colloque organisé en août 2000 par le Centre International de Hungarologie, Nyomarkai István a parlé de la situation des Petites langues à la veille de notre entrée dans l'Union européenne. Au colloque qui s'est tenu en mars 2001 à l'université Lomonoszov pour le trentième anniversaire de l'enseignement du finno-ougrien dans ses murs, de nombreux représentants des petites nations finno- ougriennes qui vivent en Russie ont fait part aux participants des résultats encourageants et des soucis qui serrent le coeur de leurs instituts et universités respectives. A Riga, au mois d'avril, j'ai participé à un colloque international intitulé Les Petites langues en Europe du XXÍ siècle où j'ai pu écouter entre autres l'intervention de Miklós Kontra au titre explicite : A la différence cles locuteurs d'une langue majoritaire qui n'ont pas de langue maternelle, les locuteurs d'une langue minoritaire en ont-ils une ? intervention qui portait sur les anomalies linguistiques de l'enseignement minoritaire du hongrois en Transylvanie. Et enfin, au Ve Congrès Hungarologique qui s'est tenu en août à Jyväskylä, plusieurs symposiums et tables rondes, en traitant des problèmes variés depuis la disparition des langues j u s q u ' a u x problèmes linguistiques des minorités, en passant par les lois linguistiques, ont abordé les mêmes questions que celles qui jouent un rôle très accentué dans le présent volume. Les questions que se pose la hungarologie ne sont donc pas séparées par de grands murs des recherches que poursuivent les chercheurs d'autres pays de grandeur et de situation

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Politiques Linguistiques en Europe

historique analogues. Et il vaut m i e u x abattre les m u r s qui rendent plus d i f f i c i l e l'échange des expériences respectives.

Les études suivantes sont la p r e u v e des avantages q u ' i l y a à é c h a n g e r librement n o s expériences mutuelles. N o t r e recueil s ' o c c u p e d e la pratique actuelle de la politique linguistique hongroise. La condition linguistique de la m i n o r i t é hongroise est aussi directement traitée dans plusieurs écrits ayant un autre sujet principal. Mais le lecteur ne peut pas tirer m o i n s d ' e n s e i g n e m e n t s des autres écrits qui le confrontent avec la pratique des p a y s de l'Europe d u Sud-Est, de la Slovaquie ou de l ' A u t r i c h e . La situation linguistique de la minorité tzigane, elle, t o u c h e presque tous les spécialistes de l ' E u r o p e Centrale ou de l'Est. E n f i n , dernier point m a i s pas le m o i n d r e , je mentionne la f o r c e révélatrice de l'exemple français car, là, nous pouvons d é c o u v r i r la pratique actuelle d ' u n e politique linguistique ayant un long passé; celle d ' u n e langue qui, a u t r e f o i s , a été r é p u t é e langue universelle et qui garde t o u j o u r s sa place illustre. T o u t e f o i s , pour essayer d e contrebalancer l ' h é g é m o n i e actuelle de la langue anglaise, le français peut devenir l'allié et le porte-parole e f f i c a c e de toutes les petites langues qui s'inquiètent p o u r leur avenir à l'heure de la mondialisation. C ' e s t p o u r q u o i on peut considérer comme h e u r e u x le fait que ce recueil soit d i f f u s é dans cette langue depuis la H o n g r i e et, par-delà n o s frontières, atteigne des ateliers d ' e n s e i g n e m e n t et de recherche dont les collaborateurs lisent en langue française.

G Y Ö R G Y T V E R D O T A

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Le romani en évolution

MQII intervention portera sur u n e langue - le romani - différente de toutes celles traitées à ce colloque en ce que sa standardisation ne s'est pas encore e f f e c t u é e ; mais elle est spéciale aussi à d'autres égards.

I. Spéciale déjà par son n o m : on rencontre là un désordre total dans la dénomination. Les locuteurs n ' o n t pas d'appellation unitaire p r o p r e pour e u x - m ê m e s ou pour leur langue, une appellation globale qui vaille pour tous les groupes. Au contraire, il existe des n o m s innombrables qu'utilisent les différents groupes pour se dénoter ou pour désigner les autres :

Roms (Balkans) M a n o u c h e s (France) Sinti (Allemagne) Kaié (Espagne) Gypsies (Angleterre)

Il existe des appellations non m o i n s n o m b r e u s e s de la part des G a j é ( c ' e s t - à - d i r e des non R o m s ) :

Tsiganes ( t e n n e ignoré de tous les groupes de locuteurs du r o m a n i1, mais utilisé par une entité rom de langue r o u m a i n e : les Bàiaç emploient cîgân, cîgànkà pour se dénoter e u x - m ê m e s2)

Gitans (en France, en E s p a g n e ) B o h é m i e n s (en France) Romanichels (en France) H û n g a r o s (en E s p a g n e )3, etc.

Spécial aussi en ce que le r o m a n i est, à ma connaissance, le seul nom de langue en français p o u r lequel on ait proposé le genre f é m i n i n (car shib ' l a n g u e ' est féminin en romani). Certains l'utilisent d o n c au féminin en f r a n ç a i s4, mais ils constituent une minorité.

On a aussi proposé Rroni et rromani avec deux r5 pour m a r q u e r que dans certains dialectes, la consonne initiale a une prononciation d i f f é r e n t e du simple r, mais cette orthographe bizarre ne s'est pas répandue.

J'utiliserai l ' a n t h r o p o n y m e Rom pour les individus et romani p o u r la langue, c o n f o r m é m e n t à l'usage de ces deux dernières d é c e n n i e s6,7.

II. Avant de parler de la langue, un mot sur ses locuteurs. Les ancêtres des Roms ont dû quitter l'Inde entre les Ve et V I T siècles après Jésus-Christ. On les retrouve en Perse à une date difficile à d é t e r m i n e r8 ; ils y sont restés assez longtemps p o u r faire des e m p r u n t s nombreux ; ils ont dû partir de Perse avant que l'islamisation de la Perse, c o m m e n c é e au VIIe siècle, ne se fasse sentir car le lexique du romani ne comprend pas d ' é l é m e n t s a r a b e s9. C e départ s'est e f f e c t u é dans deux directions :

ben s (appellation de ceux prononçant ainsi l'équivalent du mot ' s œ u r ' ) : Syrie, Palestine, Egypte phens (appellation de ceux ayant une autre prononciation du m ê m e équivalent du mot ' s œ u r ' ) : Arménie, Anatolie, où ils ont dû séjourner à l ' é p o q u e byzantine, et ne pas rester longtemps après l'arrivée des T u r c s en 1071, car il n ' y a pas eu d ' e m p r u n t au turc à cette é p o q u e1 0. Puis, peut-être sous l ' e f f e t de la

1 Világ: 217

2 Varga : 18 Liégeois : 36

4 voir Gila-Kochanowski

<i parmi les nombreux exemples : « Asunen RromaMen » de Radio Belgrade, Courthiade 1997 et Rézműves

6 Courthiade 1989 : 87

7 On rencontre aussi romanès, mais ce mol signifie littéralement ' à la manière des Roms ; en romani'. Les expressions comme en romanes contiennent donc la même redondance qu'on trouverait, en parlant du magazine hebdomadaire britannique, dans le The Spectator.

8 selon certains (Akadémiai Kislexikon : 1/340) vers l'an 1000, selon d'autres (Fraser : 40-46) bien avant

9 Magyar Nagylexikon : 5/385

10 Fraser : 51 et Magyar Nagylexikon : 5/385

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Politiques Linguistiques en E u r o p e

p o u s s é e turque, ils arrivent en E u r o p e en plusieurs vagues. On les retrouve en E u r o p e du S u d - E s t au X I Ve

siècle1 en Europe centrale vers 1 4 0 01 2 et en E u r o p e de l'Ouest dès le X Ve siècle1 3.

Pour ce qui est d ' a u j o u r d ' h u i , il est plus facile d ' é n u m é r e r les pays où on n e parle pas le romani (surtout africains) que d e lister ceux où on le parle.

III. Les sources divergent f o r t e m e n t en matière du n o m b r e des R o m s et des romaniphones.

N o m b r e de R o m s en E u r o p e : 3 à 5 000 0 0 01 4

5 à 6 000 0 0 01 5

7 000 000 à 8 500 0 0 01 6

N o m b r e de R o m s d a n s le m o n d e : 5 à 6 000 0 0 01 7

12 à 15 000 0 0 01 8

les 85 000 000 p r o p o s é s p a r un auteur semblent exagérés1 9.

M a i s en cherchant le n o m b r e de locuteurs, on s ' a p e r ç o i t qu'il d i f f è r e du nombre des Roms, seule une partie des R o m s parlant le r o m a n i . La proportion des romaniphones p a r m i les Roms varie d ' u n pays à l'autre, allant de 0 % sur la p é n i n s u l e ibérique j u s q u ' à 9 5 % en Albanie, en Macédoine, et en G r è c e2 0. Une partie significative des R o m s n e parle p a s le r o m a n i . La Hongrie et la France se situent au milieu du peloton : en Hongrie, 2 02 1 à 4 02 2 % des R o m s parlent le romani. On avance également le c h i f f r e de 4 0 % pour la F r a n c e2 3.

Je disais 0 % de r o m a n i p h o n e s dans certains pays habités par des Roms car dans les zones les plus éloignées de l ' E u r o p e centrale, c'est-à-dire en Angleterre, sur la péninsule ibérique, en A r m é n i e et en Finlande, les Roms ne parlent pas le romani m a i s des créoles des langues de ces p a y s2 4,2 5 - ces créoles sont en dehors de notre sujet.

N o m b r e de locuteurs du r o m a n i : 3 000 0 0 02 6

3 000 000 en E u r o p e2 7

3 à 5 000 0 0 02 8

7 à 8 000 0 0 02 9

11 Liégeois : 18

1 2 Akadémiai Kislexikon : 1/340

1 3 Quid : 113

1 4 Magyar Nagylexikon : 5/386

1 5 Fraser : 277

1 6 Liégeois : 34 et H VG : 70

1 7 Akadémiai Kislexikon : 1/340

1 8 Q u i d : 113

1 9 Gila-Kochanowski : 17

2 0 Liégeois : 59

2 1 Világ: 217

2 2 Liégeois : 59

2-' Liégeois : 59

2 4 Világ: 217

2 5 Courthiade 1989 : 93

2 6 Crystal : 562

2 7 Liégeois : 58

2 8 Világ: 217

2 9 Courthiade 1997 : 21

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PÉTER BARTA : Le romani en évolution

IV. N o u s en arrivons à la langue. Pour la disposition géographique des dialectes, voir la carte de M a r c e l C o u r t h i a d e3 0 qui montre en m ê m e t e m p s les trois vagues successives par lesquelles les Roms sont a r r i v é s en Europe. O n y voit les n o m b r e u s e s rencontres des nombreuses variétés de la langue (certains vont j u s q u ' à parler de plus de 60 d i a l e c t e s3' ) . Bien entendu, ces interférences rendent la classification très difficile.

Voyons d ' a b o r d quel a été le point de départ dans l'évolution de la langue.

Le r o m a n i n ' e s t la langue nationale d ' a u c u n pays, il est partout minoritaire. 11 subit des i n f l u e n c e s nombreuses et diverses du fait de la dispersion de ses locuteurs et n'existe de ce fait que sous f o r m e de dialectes souvent fort divergents. Au cours des dernières décennies, la communication écrite entre R o m s de divers horizons s'est intensifiée, de n o m b r e u x périodiques, quelquefois éphémères, o n t vu le jour.

Au début, les publications en r o m a n i s'écrivaient dans un dialecte donné et suivaient plus ou m o i n s l'orthographe de la langue de l'environnement. Ainsi, Marcel Courthiade a réuni-1- cinq traductions du verset 3 du chapitre III de l'Évangile selon Jean.

Berlin 1930 :

O Jesuska pendass be godo "Tschatschimassa, Tschatschimassa, me penaw îuke: Ssite awellass, hod war ikon bo dui to de gerdjol, naschtig woï o Temm ci Dewlesko tschi dikella".

Riga 1933 :

Iisusos phendza leske ano otpheniben: lasses, lasnes rakirava tuke: ke(i kon nalocola opatunestir, nasti dikhel Davlesklro kra/uma.

Roumanie s.d. :

Ciaciniasa o Isus phendeas leskä: Ciaces-ciaces phenao tukä, ek mannt} kana ci kárdeol inkä äkdata ne-vo manuç na 'çtil te dikhâl e împâràtzia le Devleski.

Suisse s.d. :

O Jésus phendias leske: tchatchimasa, tchatchimasa, phenav touke, o manouch, kai tchi biandiol palpale, nachti dikhela o imperatsia e Devleski.

Sofia 1937 :

Mcycb .né exe nl)H3é: na<jnw <•launw myxe eaxepáea: xaùéxb me uà óéumuo.na ne ywcmapt, uauju me duKé.Tb o maeapuné JJee.iécxo.

11 propose un sixième texte c o m m e version centrale (nous verrons ci-dessous c o m m e n t il arrive à ce résultat) :

Thaj o Jesus phendä(s) lesqe: cacimaça, cacimaça vakerav tucje, o marná ka na biandöl palem, nasti dikhel o thagaripe e Devlesqo.

Inutile de multiplier les exemples ou d ' ê t r e r o m a n i p h o n e pour identifier tout de suite le principe qui, dans les cinq premiers textes, a régi le choix des différentes graphies (et des alphabets et des signes diacritiques éventuels). C e principe est le m i m é t i s m e , c'est-à-dire l'adoption des conventions de la langue du pays. On pourrait m ê m e dire que, de façon paradoxale, le seul point c o m m u n entre ces g r a p h i e s est q u ' e l l e s n e se ressemblent pas entre elles mais se modèlent sur la langue dominante du pays de l'édition. On r e p r o c h e r a aussi à ces graphies d ' i g n o r e r les oppositions phonologiques pertinentes en r o m a n i et de m a r q u e r celles caractérisant la langue du pays de l'édition.

Les échanges ont révélé la nécessité de standardiser, de centraliser la langue pour conserver et augmenter F intercompréhension.

V. Pour changer, trois voies se sont o f f e r t e s3 3 :

3 0 Liégeois : 54-55

3 1 Fraser : 278

3 2 Courthiade 1989 : 90-91

3-' Lewkovvicz : 214

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Politiques Linguistiques en Europe

a/ raviver u n e langue ancienne ( c o m m e cela a été fait p o u r l'hébreu)

b/ choisir un dialecte et en faire la l a n g u e littéraire ( c o m m e le francien est devenu le français) c/ une synthèse des dialectes ( c o m m e le hongrois se base sur plusieurs dialectes)

La possibilité a/ (c'est-à-dire, p o u r le romani, le retour au sanskrit) n ' a j a m a i s été prise au sérieux (la m ê m e idée de retourner au sanskrit avait été évoquée au m o m e n t de l'accession de l'Inde à l ' i n d é p e n d a n c e et elle a également été r e j e t é e3 4) .3 5

La possibilité b/ ne manque pas d e partisans. En H o n g r i e , par exemple, on a eu l ' i d é e de faire du dialecte lovari le r o m a n i par excellence, s u r la base d ' u n j u g e m e n t de valeur peu pertinent en linguistique qui le p l a c e3 6,3 7, lui et ses locuteurs, au s o m m e t de la h i é r a r c h i e sociale, du m o i n s en Europe centrale. Au centre de ce débat '8, je crois voir u n e opposition, d ' u n e part, entre les masses et l'élite, d ' a u t r e part, au sein des masses.

La position des masses se caractérise p a r une volonté de simplicité, m a i s aussi par la subjectivité : ils portent souvent un j u g e m e n t de valeur s u r les dialectes et idiolectes en fonction de la place q u e le locuteur ou le groupe de locuteurs occupe sur l ' é c h e l l e sociale. L'élite, par contre, a n i m é d ' u n désir d'objectivité et de globalité, travaille quelquefois sur u n e langue qui n'est p a s sa langue maternelle-'9.

La possibilité c/ sera illustrée p a r le vœu q u ' a f o r m u l é la Commission p o u r la langue de l ' U n i o n tsigane internationale lors du Premier c o n g r è s international des Roms à Londres en 1971 : « A u c u n dialecte n'est meilleur que les autres ; ce qu'il n o u s faut, c'est une l a n g u e centrale normalisée... »4 0,4 1

VI. Les premières tentatives de généralisation de l ' a l p h a b e t romani ont é c h o u é à cause de l'esprit de clocher, chacun tenant à l'alphabet f o n d é sur son dialecte. Cela a mené à ce q u e certaines publications en romani donnent le texte en plusieurs dialectes alors que le but de ces œuvres n ' e s t nullement leur étude contrastive. Elles veulent ainsi éviter de p r e n d r e position p o u r l ' u n ou pour l'autre. Le nombre des variétés utilisées dans le m ê m e ouvrage peut être considérable4 2. Intéressantes pour un linguiste, ces publications risquent d'être sources de confusion p o u r le grand public, q u e l q u e f o i s peu alphabétisé.

Il aura fallu u n e approche tout à f a i t autre - globale - pour arriver au résultat désiré. La première question à poser était de savoir s'il s ' a g i t b i e n d'une langue ou d e plusieurs.

Certains c h e r c h e u r s4 3 se sont s e u l e m e n t demandés s'il s ' a g i t d ' u n e langue disposant de n o m b r e u x dialectes ou si le r o m a n i est arrivé à u n s t a d e de son évolution où il faut parler d ' u n e famille de langues proches les unes des autres ; d ' a u t r e s c h e r c h e u r s4 4, invoquant entre autres le m a n q u e d'intercompréhension entre les variétés du romani, ont c a r r é m e n t o p t é pour la d e u x i è m e réponse.

Or, la question de l'unicité d ' u n e l a n g u e ne doit pas être tranchée sur la b a s e de l'intercompréhension des dialectes. Et, d a n s le cas du romani, cette question de l ' u n i c i t é n'est pas soluble non plus sur la base du critère traditionnel de la langue écrite u n i q u e (élément capital d a n s le cas du chinois, par exemple).

Pour répondre à la question, il faut c o n s i d é r e r : la phonologie et la m o r p h o s y n t a x e c o m m u n e s la conscience collective existante

les traditions culturelles partagées.

3 4 Világ: 1294

même la tentative de sanskritisation de Gila-Kochanowski visait plus le rapprochement aux langues indo- aryennes vivantes qu'au sanskrit, voir Gila-Kochanowski : 150

3 6 Saip : 206 Hegyi-Ignácz : 27

-,8 voir p. ex. Amaro Drom septembre 1997, novembre 1997, décembre 2000, avril 1998

3 9 p. ex. Elemér V á r n a g y , Jean-Pierre Liégeois, Veronika G ö r ö g , József Vekerdi, Zita Réger

4 0 cité par Courthiade 1989 : 88

4 1 cette solution c/ sera d'autant plus naturelle que les idiolectes, quand examinés, témoignent de l'impact de plusieurs dialectes, voir p. ex. Tálos : 191-195.

4- p. ex. 5 dans Rézműves et 6 in Courthiade 1992 : 17

4:1 p. ex. Angus Fraser dans Fraser : 280

4 4 p. ex. József Vekerdi dans Világ : 218

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PÉTER BARTA : Le romani en évolution

S o m m e toute, il s'agit d o n c d ' u n e c o m m u n a u t é , certes dispersée, et d ' u n e seule langue, avec des variétés quelquefois très éloignées.

Il n e faut pas surévaluer la distance qui sépare les dialectes romanis. Revenons à notre exemple biblique. La version f r a n ç a i s e n ' e s t pas unique elle non plus ! Courthiade donne la traduction s u i v a n t e :

1989 :

El Jésus lui dit : << En vérité, en véritéje te le dis, qui ne naît pas à nouveau/d'en haut, ne pourra voir le royaume de Dieu »45

mais on trouvera facilement d ' a u t r e s variantes : 1855 :

Jésus lui répondit : En vérité, en vérité je vous le dis : personne ne peut voir le royaume de Dieu, s'il ne naît de nouveau,46

1 8 8 8 :

Jésus lui répondit : En vérité, en vérité je te dis que si un homme ne naît de nouveau, il ne peut voir le royaume de Dieu 47

1975 :

Jésus lui répondit : En vérité, en vérité je te le dis, si un homme ne naît de nouveau, il ne peut voir le royaume de Dieu.48

1977 :

Jésus lui répondit : En vérité, en vérité je te le dis : à moins de naître de nouveau, nul ne peut voir le royaume de Dieu 49

1980 :

Jésus lui répondit : Vraiment, vraiment, je te dis : si on ne, naît de nouveau, on ne peut voir le règne de Dieu.50

Cette pluralité est d u e non seulement aux d i f f é r e n c e s d'interprétation du texte original, m a i s aussi aux variations possibles en français, langue riche, sans q u ' i l nous vienne à l'idée que ce dernier nécessite des r é f o r m e s p o u r autant.

VII. Mais pour sauvegarder le romani, ces r é f o r m e s ont été inévitables. Elles s'inscrivent d a n s le cadre d ' u n e planification linguistique consciente5 1 appelée standardisation5 2, qui se c o m p o s e des activités suivantes.

1. Normalisation : choisir ou créer une n o r m e qui deviendra incontournable car institutionnalisée La seule réponse possible à ce défi semble être d ' é l a b o r e r une variété interdialectale (polylectale).

2. C o d i f i c a t i o n du romani standard en matière de prononciation, d'orthographe, de lexique et de g r a m m a i r e

2.1. Codification de l'écrit

Les d i f f é r e n t e s réalisations du m ê m e lexème à l'oral se laissent ramener à une f o r m e commune, généralement celle dont elles sont issues, m a i s qui peut ne plus exister dans aucun dialecte m o d e r n e ou m ê m e n ' a v o i r jamais existé. Ainsi, les d i f f é r e n t s équivalents de dit dans nos exemples m è n e n t à u n élément

4 5 Courthiade 1989 ; 90

4 6 Traduit par Le Maistre de Saci. Bruxelles, Société Biblique britannique et étrangère

4 7 Traduit par Jean-Frédéric Ostervald. Londres, Société Biblique britannique et étrangère

4 8 Traduit par Louis Segond. Beme, Société Biblique de Genève

4 9 Traduction œ c u m é n i q u e de la Bible. Paris, Alliance biblique universelle

5 0 Traduit par Charles Augrain. Apostolat des Éditions, Éditions Paulines

5 1 Crystal: 454

5 2 Courthiade 1989 : 94-95

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Politiques Linguistiques en E u r o p e

f é d é r a t e u r p h e n d à ( s ) , u n e innovation. En cas d'impossibilité d ' u t i l i s e r cette méthode, on peut procéder en déclarant vainqueur la f o r m e majoritaire dans les dialectes5 3.

Les tâches sont les s u i v a n t e s : créer un alphabet et codifier les règles d ' o r t h o g r a p h e et de ponctuation.

Ce sont des choix p o l i t i q u e s5 4 et scientifiques à la fois. Voici les deux extrêmes possibles :

l'écriture historisante (p. ex. chinois) : en regroupant les variétés de la langue dans le temps et dans l'espace, elle engendre et maintient le s e n t i m e n t d'identité et d ' u n i t é , mais sa création et son utilisation exigent un investissement considérable (apprentissage, éventuellement matériel d ' i m p r i m e r i e )

écriture tout à fait p h o n é t i q u e : facile à utiliser mais rompt les liens dans le temps et dans l'espace, p.

ex. Zsánáv ábá te gináv55, u n manuel scolaire, a été écrit en lovari selon l'orthographe hongroise. Il limite trop fortement le cercle d e s utilisateurs possibles et au lieu d ' u n i r , sépare les c o m m u n a u t é s roms de dialectes différents.

L e vœu de normalisation et de codification a été formulé il y a trente années ; depuis, on est plus près du but : en 1990, à V a r s o v i e , la 4e C o n f é r e n c e mondiale des R o m s a adopté une décision sur le principe du fonctionnement polylectal de la graphie centrale.

2.2. Codification de l ' o r a l

P o u r le moment, u n i q u e m e n t en théorie et dans la m e s u r e nécessaire à l'établissement de l'écrit standard. La graphie étant unitaire ou presque (phendä /phendâs), la prononciation sera propre à c h a q u e dialecte : par exemple le q d e lesqe dans notre texte en version centrale sera prononcé [k] ou [g] en fonction du dialecte, ö sera [o] ou [jo], â sera [a] ou [ja], ç sera [s] ou [j] ou [h] ou [ts] ou [ 0 ] , etc.

Selon certains, s t a n d a r d i s e r l'oral contredit le principe de la démocratie, principe p r o f o n d é m e n t ancré dans la conscience r o m5 6, cette étape ne sera d o n c jamais franchie. Je pense au contraire que le romani écrit standard favorisera la naissance et la d i f f u s i o n d'un r o m a n i parlé standard, où la prononciation c o n v e r g e r a5 7.

2.3. Codification du lexique

D a n s les textes traduits de l'Évangile selon J e a n qui nous servent d'exemples, parmi les équivalents de royaume, ce sera thagar qui sera codifié car c ' e s t un mot de s o u c h e romani, alors que les autres sont des e m p r u n t s ou s é m a n t i q u e m e n t difficiles à délimiter.

2.4. Codification de la m o r p h o s y n t a x e : les problèmes sont m o i n s nombreux, m a i s aussi plus difficiles à détecter. Citons n é a n m o i n s la négation, d o m a i n e important de la morphosyntaxe, où les groupes de dialectes s'opposent dans la distribution des m o t s négatifs chi ou na5^,59.

3. Modernisation

Elle est nécessaire a v a n t tout dans le d o m a i n e lexical. 11 faut d ' a b o r d en fixer les principes :

P e u t - o n recourir à la f o r m a t i o n propre ? Si le romani n'utilise pas la composition, il fait usage de la d é r i v a t i o n6 0 ; les p r é f i x e s sont p l u s rares que les s u f f i x e s .

O u faut-il recourir p l u t ô t à l'emprunt, et si oui, à partir de quelles langues ? Pour emprunter au hindi - procédé à la mode - , il n e s u f f i t pas de s ' i d e n t i f i e r subjectivement à ce peuple certes parent, car les deux langues et les deux cultures sont désormais très éloignées.

Puis, sur ces bases, on p o u r r a développer le lexique.

4. D i f f u s i o n

Elle est en cours. C e r o m a n i standard est d é j à utilisé dans d e nombreuses publications et enseigné sporadiquement du p r i m a i r e au supérieur (en F r a n c e , à l ' I N A L C O , en Hongrie il y a eu des tentatives à E L T E et dans les Écoles n o r m a l e s de Kaposvár et d e Zsámbék, par exemple) ; si la d i f f u s i o n est n é a n m o i n s particulièrement difficile, c ' e s t q u e

5 3 Saip : 204

5 4 Crystal : 455

5 5 Zsánáv

5 6 Courthiadc 1997 : 21

5 7 et peut-être même, plus tard, la place de l'accent, non encore codifiée, s'unifiera-t-elle, cf. Saip : 204-5

5 8 Rostás-Farkas : 64

5 9 Hegyi-Ignácz : 27-28

6 0 Calvet : 4-9 et Courthiade 1989 : 103-105

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PÉTER BARTA : Le romani en évolution

le soutien (moral et matériel) q u ' e l l e a de la part d ' É t a t s et d'institutions est aléatoire et nullement comparable à celui dont bénéficient les langues nationales, m ê m e si le Conseil de l ' E u r o p e et l ' U n i o n européenne financent certaines recherches et publications

l'emploi du romani standard n ' a s s u r e pas une carrière aussi brillante que celui, par exemple, de l'anglais d ' O x f o r d

le m o n d e contemporain est bien loin d ' a c c o r d e r la priorité aux tâches culturelles ceux directement concernés n ' o n t pratiquement aucun pouvoir politique ni économique.

V I I I . Au lieu de conclure sur une note aussi pessimiste, il est p r é f é r a b l e de constater que la planification du romani a m e n é à des résultats positifs et négatifs, tout aussi instructifs les uns que les a u t r e s6' . La romologie reste un chantier passionnant, un grand défi pour le linguiste car elle nécessite des connaissances dans toutes les branches de la linguistique.

résultats tels que le livre de lan Hancock sur les problèmes de la création du romani standard, paru en 1980, par exemple

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Politiques Linguistiques en E u r o p e

Bibliographie

A k a d é m i a i Kislexikon Akadémiai Kislexikon. B u d a p e s t , Akadémiai Kiadó, 1989.

Calvet Calvet, Georges, Dictionnaire tsigane-français. Paris, L'Asiathèque, 1993.

Courthiade 1989 Courthiade, M a r c e l , La langue r o m a n i (tsigane) : Évolution, standardisation, unification, r é f o r m e , in : La R é f o r m e des langues - Histoire et Avenir (dir. par István Fodor - C l a u d e Hagège).

H a m b u r g , Helmut B u s k e Verlag, 1989.

C o u r t h i a d e 1992 Kurtiàde, M a r c e l , Sirpustik amare chibàqiri. Béziers, T h a n Rromane R o d i m a t e n q o - C R D P Midi Pyrénées, 1992.

Courthiade 1997 Courthiade, M a r c e l , / chib rromani si but kuc amenqe — A rromani nyelv számunkra nagyon drága, in A m a r o D r o m , 2000. szeptember, pp. 20-24

Crystal Crystal, David, A Nyelv enciklopédiája. Budapest, Osiris, 1998.

Fraser Fraser, Sir Angus. A cigányok. Budapest, Osiris, 1996.

G i l a - K o c h a n o w s k i G i l a - K o c h a n o w s k i , Vania de. Parlons Tsigane - Histoire, culture et langue du peuple tsigane. Paris, L ' H a r m a t t a n , 1994.

H e g y i - l g n á c z Hegyi, Ildikó - Ignácz, József, R o m a népismereti t a n k ö n y v az általános iskolák 5.-6.

osztálya számára (à paraître)

HVG Heti Világgazdaság, melléklet: Romasor. 1997. j ú n i u s 14.

L e w k o w i c z Lewkowicz, A n d r z e j B., Obstacles in L a n g u a g e C o m m u n i c a t i o n among Gypsies ( R o m s ) and Perspective of the D e v e l o p m e n t of the G y p s y (Romani) Language, in : C i g á n y N é p r a j z i T a n u l m á n y o k 2. - A z I. N e m z e t k ö z i C i g á n y Néprajzi, Történeti, Nyelvészeti és Kulturális K o n f e r e n c i a előadásai ( B u d a p e s t , 1993. m á r c i u s 16-20.) (dir. par Bódi Zsuzsanna). Budapest, M i k s z á t h Kiadó, 1994.

Liégeois Liégeois, Jean-Pierre, Roma. Tsiganes, Voyageurs. Strasbourg, Conseil de l ' E u r o p e , 1994.

Magyar Nagylexikon Magyar Nagylexikon. B u d a p e s t , Magyar N a g y l e x i k o n Kiadó, 1993 Quid F r é m y , Dominique et M i c h è l e , Quid98. Paris, L a f f o n t , 1997

R é z m ű v e s Rromane G a r a d u n e L a v a - Roma T a l á l ó s Kérdések - R r o m a n i Riddles. Budapest, Fővárosi Ö n k o r m á n y z a t Cigány H á z , 1999.

Rostás-Farkas Rostás-Farkas, G y ö r g y , Cigányságom vállalom - Grizhij muro romanipe. Budapest, C i g á n y T u d o m á n y o s és M ü v é s z h e t i T á r s a s á g - Kossuth Könyvkiadó, 1992.

Saip Saip, Y u s u f , T h e N o r m a n d its Construction, in : Cigány N é p r a j z i T a n u l m á n y o k 2. - A z I.

N e m z e t k ö z i Cigány N é p r a j z i , Történeti, Nyelvészeti és Kulturális K o n f e r e n c i a előadásai (Budapest, 1993. március 16-20.) (dir. p a r Bódi Zsuzsanna). Budapest, Mikszáth Kiadó, 1994.

Tálos Tálos, Endre, Rostás Mihály nyelve, in : A mesemondó Rostás Mihály /Ciganisztikai t a n u l m á n y o k 51. Budapest, M T A N é p r a j z i K u t a t ó Csoport, 1988.

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Világ A világ nyelvei (Fodor, István, sous la direction de). Budapest, A k a d é m i a i Kiadó, 1999.

Zsánáv Zsánáv ábá te gináv. Budapest, Nemzeti T a n k ö n y v k i a d ó , 1993.

P É T E R B A R T A

12

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La politique linguistique en S l o v a q u i e

La Republique Slovaque est un pays multinational qui compte 5,4 millions d'habitants. Contre la population majoritaire, les Slovaques, qui sont 4,5 millions, plusieurs nationalités minoritaires habitent le pays.

Ce sont les Hongrois dans les régions du sud, qui représentent plus de 11 % de la population-600 000, les Romani - 480-520 000, les Ukrainiens - 110 000, les Tchèques - 5500, les Allemands, les Polonais, les Croates, les Bulgares, etc.

Situé en Europe Centrale, le pays a été exposé dans son histoire aux influences culturelles occidentales et orientales. Les régions frontalières étaient bilingues et même trilingues et le sont restées j u s q u ' à nos jours.

L'enseignement des langues étrangères a une longue tradition dans notre système scolaire. Dans les lycées classiques de la première République Tchécoslovaque, à côte du grec et du latin, les langues vivantes étaient également enseignées.

Après la deuxième guerre mondiale, à la suite des événements politiques, le russe comme première langue étrangère obligatoire a été imposé à tous les niveaux de l'enseignement et les autres langues ont été réservées en tant que langues étrangères secondes à l'enseignement secondaire et supérieur.

Après le changement du système politique en 1989, le russe à perdu sa position dominante dans notre système scolaire en faveur des autres langues étrangères. Le gouvernement favorise l'enseignement des langues à tous les niveaux et dans tous les types d'écoles.

Dans l'enseignement primaire, la première langue étrangère est introduite obligatoirement à partir de la 5e classe (âge de 11 ans) et en T classe la seconde langue étrangère facultative. Si les conditions de l'école le permettent, l'enseignement des langues étrangères peut commencer en 3e et en 5e classe.

Au niveau de l'enseignement primaire les langues suivantes sont enseignées (dans l'ordre suivant le nombre d'élèves) : l'allemand, l'anglais, le russe, le français et l'espagnol.

L a n g u e s a p p r i s e s p a r les éleves s l o v a q u e s ( e n s e i g n e m e n t f o n d a m e n t a l )

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Politiques Linguistiques en E u r o p e

L a n g u e s a p p r i s e s par les é l e v e s s l o v a q u e s ( p r e m i e r e t s e c o n d degré)

Dans les lycées de quatre ans, deux langues étrangères sont enseignées obligatoirement (à raison de trois heures par s e m a i n e pour chaque langue).

La première langue est l'anglais, l ' a l l e m a n d se place deuxième, le français troisième, le russe quatrième, l'espagnol c i n q u i è m e et l'italien sixième.

A v i s d e s R o m a n i s u r l a n é c e s s i t é d e l ' e n s e i g n e m e n t e n l a n g u e r o m a n i

X école supérieure

école secondaire

école primaire

• t o u t e s les matieres

• q u e l q u e s matieres

• a u c u n e matière

• n e sait pas

Les résultats du s o n d a g e d é m o n t r e n t que la d e m a n d e de l'enseignement en langue romani d i m i n u e au

14

A v i s d e s R o m a n i s u r l ' u t l i s a t i o n d e l e u r l a n g u e a l ' é c o l e m a t e r n e l l e

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ANNA BUTASOVA, VIERA URBAN1COVA : La politique linguistique en Slovaquie

niveau de r e n s e i g n e m e n t secondaire et que m ê m e au niveau élémentaire, le pourcentage de ceux qui d e m a n d e s n t l'enseignement romani et non romaniest en équilibre.

L'Institut national de pédagogie, organisme dépendant du Ministère de l'Education slovaque, a été chargé d ' e x a m i n e r les p r o b l è m e s spécifiques de l'éducation des e n f a n t s r o m a n i et de proposer des solutions possibles.

Un projet international (avec la participation de spécialistes espagnols, français, italiens et slovaques) planifié sur deux ans a été m i s en place. Le but de ce projet est de d i f f u s e r auprès des enseignants slovaques concernés les résultats des recherches et les méthodologies développées dans l ' U n i o n e u r o p é e n n e ainsi que de créer, à long terme, u n centre de ressources, de recherches et de coordination au sein de l'Institut national de pédagogie. L ' a p p o r t du projet sera particulièrement sensible en Slovaquie où il répondra à des priorités nationales fixées par le gouvernement en permettant l'amélioration des pratiques pédagogiques ainsi q u ' u n e meilleure f o r m a t i o n initiale et continue des enseignants engagés dans l ' é d u c a t i o n de la jeunesse romani. Car le c h a n g e m e n t de statut social de cette partie de notre population n ' e s t pas réalisable sans c h a n g e m e n t dans son éducation et sa formation.

Or, toutes les écoles sont ouvertes aux R o m a n i c o m m e aux autres jeunes, mais seulement un nombre très limité d ' e n t r e eux m o n t r e n t de l'intérêt.

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Politiques Linguistiques en E u r o p e

Bibliographie

Loran, T., Bjelová, M., O t á z k y v y e h o v y a vzdelávania ziakov zo sociálne a zdravotne rizikovych r ó m s k y c h lokalit. SPÚ, Bratislava, 1997

Skuttnab, K.T., Jazyk, g r a m o t n o s t ' a menáiny. M R G , Bratislava 1993 Statistické analyzy a i n f o n n á c i e , S Ú

ANNA BUTASOVA, VIERA URBANICOVA

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Politiques linguistiques et plurilinguisme en A u t r i c h e

1. Plurilinguisme en Autriche

Avant de parler de politique linguistique, permettez-moi de vous donner quelques faits concernant les langues parlées en Autriche. Bien que la plus grande majorité des Autrichiens et Autrichiennes soit germanophone, et que l'allemand soit, selon la constitution, la langue nationale officielle ; l'Autriche est, dans une certaine mesure, un pays plurilingue. Et ceci est dû à :

1. d'abord six minorités linguistiques autochtones officiellement reconnues par la constitution : les Slovènes, les Croates, les Hongrois, les Tchèques, les Slovaques et les Rom / Sinti 2. à des minorités allochtones immigrées en Autriche depuis les 30 à 40 dernières années et 3. à la minorité des sourds / malentendant employants la langue des signes autrichienne.

Les résultats du dernier recensement de 1991 (les chiffres les plus récents accessibles) que vous avez dans le tableau 1, vous montrent qu'environ 7,2 millions, c'est-à-dire 92 % des gens habitant en Autriche parlent l'allemand en tant que langue courante, environ 160 000 (2 % ) le serbo-croate (aujourd'hui on dirait « b o s n i e n / croate / s e r b e » ) , et environ 120 000 (1,5 %) le turque, 60 000 le croate, 33 000 le hongrois, 30 000 le slovène, 20 000 le tchèque.

Tableau 1 : population habitant l'Autriche et langues (langue courante et nationalité 1991)

Laneue courante Taux de Population Autrichiens

Total 7 795 786 7 278 096

Allemand 7 198 027 7 107 41 1

Croate 59 854 29 596

Slovène 29 498 19 289

Tchèque 19 458 9 822

Hongrois 33 459 19 638

serbo-croate 157 886 16 657

Turque 120 101 6 193

«windisch» 903 902

Autre 176 474 68 571

Inconnue 126 17

Source : Österreichisches Statistisches Zenlralamt 1993

Puisqu'il n'y a pas de chiffres plus récents sur les langues parlées en Autriche, j'ai regardé les statistiques indiquant la nationalité des habitants en Autriche (tableau 2), et les chiffres du lc rj a n v i e r 2000 montrent qu'il y a une nette augmentation des immigrants de nationalité ex-yougoslaves (de plus de 100 %, c'est-à- dire environ 5 % de la population) et une légère augmentation des immigrés de nationalité turque (d'environ 13 %) de sorte qu'on peut supposer une montée identique des locuteurs de ces langues.

Tableau 2 : Taux de population selon la nationalité (1991, Ier janvier 2000) Autriche Autriche Vienne Vienne

1991 2000 1991 2000

Taux de Population 7 795 786 8 106 985 1 539 848 1 608 144 Autochtones 7 278 096 7 348 961 l 343 196 1 323.453

Etrangers 517 690 758 024 196 652 284 691

Européens (C.E.E) . . . 102 575 . . . 26 458

Etrangers (hors C.E.E) . . . 655 4 4 9 . . . 258 233

Allemands 57 310 68 023 9 017 12 776

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Politiques Linguistiques en E u r o p e

Ex-yougoslaves 197 886 4 0 3 102 87 358 123 739

T u r q u e s 118 579 134 5 2 0 43 876 4 3 3 4 3

Autres 143 915 180 827 56 401 91 151

S o u r c e : Statistik Österreich

Cela montre que le p l u r i l i n g u i s m e en A u t r i c h e est en premier lieu dû à la p r é s e n c e de minorités linguistiques immigrées, et pas aux m i n o r i t é s dites autochtones.

N o t a m m e n t dans les écoles, « les élèves de langue maternelle autre que l'allemand » c o m m e on dit officiellement, représentent un p o u r c e n t a g e de plus de 10 % pour toute l'Autriche dans les établissements à scolarité obligatoire (12,4 %, soit 85 0 6 3 élèves ; écoles primaires : 12,6 % , collèges [Hauptschulen] : 11,7

%, établissements spécialisés [ S o n d e r s c h u l e n ] : 21,7 %) ; lycées d ' e n s e i g n e m e n t général ( A H S ) seulement 6,6 % . )

A Vienne, le p o u r c e n t a g e est d ' a i l l e u r s nettement plus élevé : dans les établissements à scolarité obligatoire, il y a 34,1 % d ' é l è v e s de langue maternelle autre que l ' a l l e m a n d (écoles p r i m a i r e s : 31,9 % ; collèges : 38.7 % ; établissements spécialisés : 34,7 % : lycées d ' e n s e i g n e m e n t général : 15,1%).

Si, par contre, on c o n s i d è r e les p e r s o n n e s de nationalité autrichienne, on a des c h i f f r e s nettement d i f f é r e n t s , ce qui m o n t r e q u e relativement peu d ' i m m i g r a n t s possèdent la nationalité a u t r i c h i e n n e ; ou bien, si j a m a i s ils l'ont reçue, ils se déclarent g e r m a n o p h o n e s sans peut-être l'être vraiment. T o u t cela tient à la politique de naturalisation relativement restrictive de l'Autriche.

Si l ' o n considère finalement l'évolution des minorités linguistiques autochtones en A u t r i c h e au X Xe

siècle (tableau 4), on r e m a r q u e u n e régression spectaculaire des locuteurs depuis 1945, une légère augmentation en 1991 d a n s le B u r g e n l a n d et à Vienne qui est probablement due au c h a n g e m e n t de critères du recensement de 1991.

T a b l e a u 3 : Ecoliers de l a n g u e maternelle autre q u e l'allemand (jusqu'à 6 a n n é e s scolaires en A u t r i c h e ; sans g r o u p e s e t h n i q u e s a u t r i c h i e n s )

A u t r i c h e V i e n n e Ecoles primaires

(Volksschulen)

49 314 (12,6 % ) 20 193 ( 3 1 , 9 % ) Collèges

(Hauptschulen)

30 413 (11,7 % ) 11 2 3 7 (38,7 % ) Ecoles spécialisées ( A l l e e m e i n e S o n d e r s c h u l e n ) 3 2 7 6 ( 2 1 . 7 % ) 1 396 (34,7 % ) Ecoles polytechniques

(Polvtechn. Schulen)

2 0 6 0 ( 1 0 , 4 % ) 801 ( 3 6 , 9 % ) Etabl. à scolarité ohlig.

(Alig. Pflichtschulen)

85 063 (12,4 %) 3 3 627 (34,1 % ) Lycées d'enseignement général ( A H S ) 12 267 (6,6 % ) 7 601 (15,1 % ) Ecoles d'enseignement p r o f e s s i o n n e l ( B e r u f s s c h u l e n ) . . . .

Collèges d ' e n s e i g n e m e n t professionnel ( B M S ) 4 670 (8,9 % ) 2 192 (30,8 % ) Lycées professionnels

( B H S )

6 577 (5,6 % ) 3.384 ( 1 6 , 2 % ) Centres de formation p r o f e s s i o n n e l l e 88 (0.9 % ) 4 0 ( 1 , 8 % )

Total des écoles 108 665 4 6 844

S o u r c e : Ministère fédéral de l ' E d u c a t i o n , des Sciences et de la Culture

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RUDOLF DE ClLLIA : Les politiques linguistiques et plurilinguisme en A u t r i c h e

T a b l e a u 4 : Minorités a u t o c h t o n e s , résultats du recensement de 1910, 1951, 1981, 1991.

Habitants de C a r i n t h i e Slovènes

Habitants du Burgenland Croates

Habitants du Burgenland Hongrois

Viennois T c h è q u e s

1910 66 4 6 3 43 633 26 225 98 461

1951 42 095 34 427 7 669 5 275

1981 16 552 18 648 4 025 4 106

1991 13 9 6 2 19 109 4 9 3 7 6 429

Selon Österreichische R e k t o r e n k o n f e r n z 1989 et Österreichische Statistisches Zcntralamt 1993 Les c h i f f r e s sur les Slovaques et les Rom / Sinti, reconnus depuis seulement 1993, n ' a p p a r a i s s e n t pas d a n s le recensement. Reiferer 1996 d o n n e le c h i f f r e de 1 182 (dont 779 citoyens) pour les Slovaques viennois.

Cependant, je dois attirer votre attention sur le fait que les recensements o f f i c i e l s ne donnent pas d ' i n f o r m a t i o n s fiables sur l ' i m p o r t a n c e e f f e c t i v e d ' u n groupe minoritaire, et surtout pas dans les cas où il existe une grande pression d ' a s s i m i l a t i o n de la part d ' u n e population majoritaire sur une autre c o m m e en Carinthie (voir Österreichische R e k t o r e n k o n f e r e n z 1989 : 60), les c h i f f r e s réels devraient n o r m a l e m e n t être supérieurs.

2. Le cadre de la politique linguistique autrichienne

En Autriche, des règles de politiques linguistiques fixées par la loi concernent d ' u n e part la langue d ' E t a t : l'allemand, et d ' a u t r e part les m i n o r i t é s linguistiques autochtones.

2.1. L'allemand - la « langue d'Etat »

La plus grande disposition linguistique légale concernant l'allemand est une définition constitutionnelle : Selon l'article 8 de la constitution, l'allemand est la langue nationale officielle de la R é p u b l i q u e Autrichienne. (« L ' a l l e m a n d est, sans préjudice du droit fédéral établi des minorités linguistiques, la langue d ' E t a t de la République »).

Depuis 1998, il existe en droit autrichien sur la nationalité la précision q u e les d e m a n d e u r s de la nationalité autrichienne, les immigrants donc, doivent faire preuve de leurs connaissances de la langue allemande, pour obtenir la nationalité autrichicnnc(Note sur la loi de la nationalité du 8 juillet 1998).

Une troisième précision importante concerne encore la langue allemande : l'allemand est défini p a r la loi c o m m e langue d ' e n s e i g n e m e n t officielle dans les écoles autrichiennes (exception faite des réglementations pour les minorités autochtones). Il n'existe d'ailleurs quasiment pas d'autre disposition linguistique légale concernant l'allemand : ainsi, en quelque sorte, il n ' y a pas de réglementation générale concernant le droit du c o n s o m m a t e u r qui garantisse que le client autrichien ait droit à une description du produit ou une notice d ' e m p l o i en allemand, ou en ce qui concerne les droits des média : il n ' y a pas de quota qui prévoie l'émission d ' u n certain pourcentage de production autrichienne à la télévision et à la radio).

2.2. Fondement constitutionnelle de la politique linguistique des minorités autochthones

Historiquement, la protection des minorités linguistiques est relativement jeune, et les fondements idéaux d ' u n e protection étatique des minorités ont été élaborés surtout pendant la monarchic a u t r i c h i e n n e ( H a a r m a n n 1993: 110). Ils se situent surtout dans l'article 19 de la constitution du 21 décembre 1867. Les dispositions légales de la protection des minorités sont également définies dans le Traité d ' E t a t de Saint- Germain de 1920 (articles 62 à 69). Les deux lois fondamentales sur la protection actuelle des m i n o r i t é s autrichiennes sont l'article 7 du « Traité d ' E t a t de 1955 » et la « loi sur les groupes ethniques » de 1976.

A r t i c l e 7 d u T r a i t e d ' E t a t d e 1 9 5 5

L'article 7 du Traité d ' E t a t du 15 mai 1955 détermine dans le p a r a g r a p h e 1, que

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Politiques Linguistiques en Europe

« les ressortissants autrichiens de la minorité slovène et croate en Carinthie, dans le Burgenland et au Steiermark (...) jouissent des mêmes droits et donc des mêmes conditions de vie que tous les autres ressortissants autrichiens, y compris le droit d'organisation, de rassemblement et de presse dans leur propre langue ».

Le paragraphe 2 d é t e r m i n e

« le droit à l'enseignement élémentaire en langue slovène ou en croate et un nombre proportionnel de leurs propres collèges ».

Le paragraphe 3 fixe l'autorisation de la l a n g u e slovène et croate en plus de l'allemand en tant que langue administrative sur le territoire plurilingue et la promesse d'inscriptions topographiques dans les deux langues sur le territoire. Le p a r a g r a p h e 4 détermine la participation égale aux institutions culturelles, administratives et judiciaires. Et le p a r a g r a p h e 5 enfin d e m a n d e ,

«d'interdire l'activité d'organisations qui visent aux particularités et les droits de la population croate ou slovène en tant que minorité ».

(Österreichisches V o l k s g r u p p e n , vol. 1: 2 5 )

L'article 7 du traité d ' E t a t évite s c i e m m e n t l'introduction de quotas concernant l'autorisation des droits des minorités. L ' a d m i n i s t r a t i o n et le ressort j u r i d i q u e de Carinthie, du Burgenland et du Steiermark avec la population slovène, croate ou mixte a p p a r a i s s e n t comme dispositif territorial.

« L o i s u r les g r o u p e s e t h n i q u e s » d e 1 9 7 6

Ce principe de quota introduit en e f f e t la loi sur les groupes ethniques de 1976, que le gouvernement autrichien considère c o m m e loi exécutive d e l'article 7. 11 a en e f f e t été r e f u s é par les représentants des minorités, car c o n s i d é r é comme anticonstitutionnel. V o l k s g r u p p e - groupe ethnique est aussi le t e n u e officiel en Autriche p o u r les minorités linguistiques. Selon cette loi, les inscriptions dans les deux langues ne seront utilisées q u e dans les territoires dans lesquels on d é n o m b r e 25 % de la population de c h a q u e ethnie respective ; et d a n s la réglementation linguistique administrative, seuls seront pris en compte les territoires dans lesquels 20 % de la population se r e c o n n a i s s e c o m m e ethnie. Dans ce cas, des fonctionnaires et des j u g e s bilingues ne s o n t pas prévus : u n i q u e m e n t la mise à disposition d ' u n interprète ou d ' u n e traduction s u r demande.

A la suite de cela, la loi sur les g r o u p e s ethniques prévoit la mise en place de soi-disant conseils de groupes ethniques, si je traduis littéralement. Ce sont des commissions de conseils pour chaque groupe ethnique, à l'occasion de quoi les m i n o r i t é s hongroise et t c h è q u e ont été explicitement m e n t i o n n é e s et par la suite officiellement reconnues. La b o n n e volonté des groupes ethniques à coopérer est la condition pour que chaque groupe e t h n i q u e puisse j o u i r d ' u n encouragement financier digne de ce nom de la part de l'Etat.

U n e représentation politique p r o p r e aux minorités (par exemple au niveau du conseil régional ou national comme en Italie ou dans le S c h l e s w i g Holstein ou bien une représentation à la c h a m b r e des députés ou au p a r l e m e n t ) n ' e s t pas p r é v u e p a r la loi en Autriche.

En ce qui c o n c e r n e la politique de la langue d'enseignement à l'école, il y a en Carinthie pour la minorité slovène et d a n s le Burgenland p o u r les minorités croate et hongroise une loi à part sur l'enseignement, la loi sur l'enseignement des minorités de C a r i n t h i e (BGBl 1959/101 dans la version du BGBl 1988/326 et 1 9 9 0 / 4 2 0 ) et la loi sur l ' e n s e i g n e m e n t des minorités du Burgenland ( B G B l 1994/641).

D a n s le Burgenland, des dispositions légales de 1937 f u r e n t valables j u s q u ' e n 1994 ; en Carinthie, les réglementations sur la l a n g u e d ' e n s e i g n e m e n t ont été depuis 1945 un motif constant de discussions sur le plan éducatif, à l ' o c c a s i o n de quoi les cercles nationaux-allemands ( c o m m e par ex. le « Schulverein S ü d m a r k » ou le « H e i m a t d i e n s t de C a r i n t h i e ») ont lutté contre les réglementations soi-disant favorables aux slovènes. Ainsi, a p r è s 1945, l ' e n s e i g n e m e n t dans les deux langues a été introduit sur l ' e n s e m b l e du territoire bilingue d e C a r i n t h i e pour tous les élèves. L ' A u t r i c h e avait à peine obtenu le traité de paix en 1955, que ces cercles n a t i o n a u x - a l l e m a n d s ont manifesté de violentes réactions, et que, par la suite, les

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RUDOLF DE ClLLIA : Les politiques linguistiques et plurilinguisme en A u t r i c h e

parents slovènes qui le désiraient ont dû explicitement inscrire leurs enfants dans les cours bilingues, ce qui exigeait un très grand loyalisme linguistique et ce qui a m e n a u n e très forte diminution des classes bilingues.

La loi actuelle sur r e n s e i g n e m e n t , avec certaines d i f f é r e n c e s en Carinthie et d a n s le Burgenland, q u e j e n ' é v o q u e r a i s pas plus en détail, repose en principe sur les réglementations suivantes: dans les p r e m i è r e s années de l'école primaire, les deux langues sont utilisées c o m m e langues d ' e n s e i g n e m e n t ; dans la d e r n i è r e classe de l'école primaire, la langue minoritaire est encore enseignée c o m m e m a t i è r e principale. D a n s l'enseignement secondaire, l ' A u t r i c h e possède un double système (collège et lycée): au collège la l a n g u e minoritaire est u n i q u e m e n t proposée c o m m e matière optionnelle, au choix avec l ' a n g l a i s - c'est p o u r cela que le croate et le slovène sont rarement choisis en option. Il y a un seul collège bilingue à G r o s s W a r a s d o r f / Veliki Boristof dans le B u r g e n l a n d . P a n n i les lycées, il y a un lycée à K l a g e n f u r t / Celovec où le slovène est la langue d ' e n s e i g n e m e n t , u n e école de c o m m e r c e bilingue à Klagenfurt et un lycée bilingue ou trilingue (avec l'allemand, le croate et le hongrois c o m m e langues d ' e n s e i g n e m e n t ) à Oberwart/ Borta.

C ' e s t seulement pour les élèves de ces écoles q u ' u n e socialisation bilingue i n i n t e r r o m p u e est possible. P o u r les Viennois Tchèques, Hongrois, les R o m et Sinti, il n ' y a pas de réglementation officielle de la l a n g u e d ' e n s e i g n e m e n t .

2.3. Politique linguistique et nouvelles minorités

II n ' y a pas grand chose à dire sur la politique linguistique à l'égard des minorités linguistiques immigrantes officiellement non reconnues: il n ' y a ni réglementations légales qui garantissent les droits linguistiques (par exemple devant les fonctionnaires et l'administration etc.). ni un encouragement d i g n e de ce nom en pratique de la politique linguistique de l'identité linguistique et culturelle des m i n o r i t é s d ' i m m i g r a n t s .

A l'école, les écoliers « d e langue maternelle autre que l ' a l l e m a n d » sont considérés p e n d a n t au m a x i m u m deux ans c o m m e écoliers exceptionnels, ensuite, on attend d ' e u x , en principe, q u e leurs connaissances en allemand soient identiques à celles des locuteurs allemands.

Dans les écoles à enseignement obligatoire (écoles primaires, collèges), il y a des e n s e i g n a n t s supplémentaires p o u r aider ces élèves, à l'occasion de quoi trois mesures légales sont prévues :

1) L ' e n s e i g n e m e n t en langue d ' E t a t allemande est obligatoire (jusqu'à 12 heures par semaine, l ' a l l e m a n d est enseigné ou bien en c o m m u n avec les g e r m a n o p h o n e s ou bien en petit groupes sous f o r m e d'option).

2) Cours optionnel en langue maternelle (3 à 6 heures par semaine, environ un quart des écoliers choisissent cette possibilité)

3) Et le principe d ' « apprentissage interculturel » dans toutes les matières.

Au lycée, ces mesures ne sont pas appliquées : seules deux heures d ' a l l e m a n d p a r semaine c o m m e langue étrangère et deux heures de cours par semaine en langue maternelle sont proposées. Un fait qui a été plusieurs fois sévèrement critiqué et qui est responsable du taux très bas de bacheliers parmi les écoliers étrangers.

Finalement, il n'existe a u c u n e réglementation linguistique en Autriche concernant le l a n g a g e minoritaire des signes (« Österreichische Gebärdensprach e »), puisque la langue des signes a u t r i c h i e n n e n'est pas r e c o n n u e c o m m e telle. Des m e s u r e s éducatives sont fixées dans le cadre du système scolaire p o u r les handicapés et visent à l ' a p p r e n t i s s a g e de la parole; des modèles b i l i n g u e s sont encore en expérimentation.

3. Evaluation

Pour résumer rapidement l'évaluation : la politique linguistique autrichienne est essentiellement e n g a g é e dans un concept monolingue - la langue officielle allemande est au centre. D e p u i s une c i n q u a n t a i n e d'années, la politique linguistique à l ' é g a r d des minorités en Autriche est en p r i n c i p e une p o l i t i q u e d'assimilation. On constate leur diminution de façon importante, non seulement du fait du bon vouloir d e s minorités à s'assimiler, m a i s aussi et plutôt du fait d ' u n e politique linguistique restreinte : d e s réglementations linguistiques i n s u f f i s a n t e s dans l'enseignement; des réglementations linguistiques

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Politiques Linguistiques en E u r o p e

administratives très restreintes. Le p r i n c i p e fondamental d e la politique linguistique autrichienne est d ' a c c o r d e r aux m i n o r i t é s seulement à c o n t r e c œ u r leurs droits respectifs c o n f o r m é m e n t à la constitution : les panneaux bilingues au Burgenland p r o m i s depuis 1955 ont seulement été a c c o r d é s en été 2000. Un autre exemple p a n n i tant d'autres: une r é g l e m e n t a t i o n de la l a n g u e administrative p o u r le croate dans le Burgenland a pu être obtenue seulement a p r è s décision du tribunal constitutionnel.

Du reste, si on c o m p a r e la situation en Autriche à celle d u Tirol du Sud, et non pas certes celle du coté germanophone, mais du coté ladin, on p e u t remarquer q u ' u n e politique linguistique favorable aux minorités p e n n e t une évolution complètement o p p o s é e . Lors du dernier recensement d e la Monarchie austro- hongroise en 1910, environ 74 000 S l o v è n e s furent recensés en Carintliie, e n v i r o n 9 000 Ladins au Tyrol du Sud. En 1991, les proportions se sont inversées : environ 14 000 Slovènes f u r e n t recensés en C a r n i t i n e contre 18 500 Ladins. En principe, le slovène a u j o u r d ' h u i n'est parlé que d a n s le milieu religieux et familial ; le ladin, lui, est utilisé aussi e n public. L ' A u t r i c h e se considère, m a i s v o u s le savez peut-être, c o m m e puissance protectrice des m i n o r i t é s linguistiques au T y r o l du Sud. Le p r o g r a m m e politique du F P Ö (parti libéral autrichien) prévoit m ê m e u n e réunification p o s s i b l e entre le Tyrol d u Sud et l'Autriche.

U n e autre caractéristique de la p o l i t i q u e linguistique autrichienne est que, souvent, la réglementation de la majorité linguistique est imposée a u x minorités contre leur propre volonté. Un exemple : la législation scolaire en Carintliie, j u s q u ' a u dernier d é c r e t scolaire de 1988, qui a été a d o p t é e malgré la résistance des minorités et de tous les scientifiques r e n o m m é s d ' A u t r i c h e . Elle précise en e f f e t q u ' à partir de n e u f inscriptions aux cours de slovène, les e n f a n t s de langues diverses devront suivre les cours séparément les uns des autres, c ' e s t pourquoi elle f u t s u r n o m m é e « m o d è l e d e l'apartheid ». L e processus d'assimilation a atteint chez les minorités autochtones d e telles proportions q u e l'on craint u n e disparition totale de ces minorités dans les prochaines décennies, si l'Autriche ne m o d i f i e pas délibérément sa politique linguistique - c'est ce q u ' e s t i m e par exemple 1'« österreichische R e k t o r e n k o n f e r e n z », l'association des recteurs de toutes les universités autrichiennes (cf. Österreichische R e k t o r e n k o n f e r e n z 1989).

La présence d ' a u t r e s langues à l ' é c o l e est du reste t o u j o u r s sujet à conflit, ce dont j e veux donner un exemple pour conclure.

Pendant la c a m p a g n e électorale a v a n t les élections législatives de 1999, les électeurs viennois ont reçu un tract, sur lequel on pouvait lire :

« Le saviez-vous?...

... des textes turcs et serbo-croates sont imposés à nos enfants viennois dans leurs livres de lecture d'allemand. »

Ici, il est suggéré que les enfants de l a n g u e maternelle autre que l'allemand ne sont pas considérés c o m m e des « e n f a n t s v i e n n o i s » , bien q u ' i l s vivent à Vienne, et que beaucoup d ' e n t r e eux y soient nés.

Deuxièmement, o n a f f i n n e à tort q u e d e s langues c o m m e le serbo-croate ou le turc sont imposées aux enfants g e n n a n o p h o n e s et que ceci leur est peut-être nuisible d ' u n e certaine manière. Les langues étrangères sont perçues ici c o m m e u n e m e n a c e et les p r é j u g é s des g e n n a n o p h o n e s à l'égard des nouvelles minorités sont renforcés. Le parti qui a e m p l o y é cette p r o p a g a n d e électorale o c c u p e a u j o u r d ' h u i la moitié du gouvernement autrichien.

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RUDOLF DE ClLLIA : Les politiques linguistiques et plurilinguisme en Autriche

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RUDOLF DE CILLIA

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Ábra

Tableau 2 : Taux de population selon la nationalité (1991, I er  janvier 2000)  Autriche  Autriche  Vienne  Vienne

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